LAOUNA K. NOCTE ► marie avgeropoulos.

Parfois quelqu'un vous fait tellement de mal que cela ne vous blesse plus. Jusqu'à ce quelque chose vous fasse ressentir à nouveau. Et alors tout revient... Chaque mot, chaque blessures, chaque moment. Comment pourriez-vous comprendre d'où cet enfant vient ? Même si vous demandez, même si vous écoutez, vous n'entendez et ne voyez pas. Vous ne ressentez pas vraiment. Vous ne vous souviendrez pas de son histoire car vous n'avez pas emprunté son chemin. Vous n'avez pas vu ce qu'elle a vu. Son passé la définit et c'est ce qu'elle est. Elle est invisible, non entendue, non désirée. Voilà ce qu'elle est, quand bien même elle serait quoi que ce soit.

C'est comme si la chose qui vous faisais tenir bon, vous faisait tomber vers le bas. Dans un monde sans dessus dessous où l'ordre a disparu. Rien n'est comme cela devait être et une tristesse infinie emplit votre âme. Petit à petit, vous vous perdez au fond de vous même et rien ne peut vous le faire prendre conscience. Piégée dans la misère de la vie, perdue dans une âme en peine. Incapable de voir la lumière en été, incapable de voir l'aube de l'automne, incapable de sentir l'odeur de l'hiver, incapable d'espérer et de rêver du printemps... Vous vous apercevez que les jours les plus sombres de votre vie continuent de revenir. Qu'à travers vos yeux les nuits les plus noires ne s'arrêtent jamais. Tout vous semble sombre, sans couleurs et qu'il n'y a que des nuits, des cauchemars et aucuns matins. Et vous vous demandez peut-être « pourquoi ? ». Mais vous essayez avant tout de ne pas y penser et vous essayez de faire avec, vous essayez de survivre. Et tout le reste semble tellement insignifiant lorsque vous souhaitez que les choses plus importantes reviennent. Comme souhaiter que vous pourriez voir votre mère sourire à nouveau et l'entendre chanter l'une de vos chansons préférées qui vous calmait toujours lorsque tout allait de travers. Ou si vous ne pouviez l'avoir derrière vous, au moins prendre soin de votre petit frère, parce que vous savez qu'il a besoin de vous et qu'il va être si effrayé tout seul. Qui va tenir sa main et lui murmurer que tout va bien se passer pour lui ? Et qui vous le murmurera ?

Vous savez que vous êtes impuissant, dépendant et désespéré. Mais qu'arrive t-il quand ceux dont vous avez le plus besoin menace votre existence ? Vous avez entendu des tas de promesses et elles se ressemblent toutes. Insistez assez fort et tôt ou tard elles se révèlent être vides. Le soleil se lève tout les matins mais savez-vous où ? Car vous ne le voyez pas. Chaque lieu est quelque peu différent. C'est dur de trouver l'Est lorsque vous ne cessez de vous déplacer. Mais au moins il se lève. Il se lève toujours. Vous en êtes venue à en dépendre...

Et lentement, lentement les saisons changent autour de vous. Il semblerait cette fois, que le monde ne se dérobera peut-être pas sous votre peine. Les pieds en sécurité, les racines commencent à grandir. Des petits bourgerons d'espoir. Lentement, vous tentez de croire en cette nouvelle vie. Vous souhaiteriez que quelqu'un vous dise que ça va aller. Ce jour là, peut-être que vous vous sentirez normal et que vous ne serez plus toujours seul. Que vous aurez une maman qui vous étreindra, qui sera forte pour vous. Parce qu'il se peut, que vous ne sachiez pas faire tout ça par vous-même.

C'est votre passé, votre histoire, Votre vécu. Ce n'est pas votre faute. Ce n'est pas à cause de vous. Et ce n'est pas ce qui doit définir votre avenir. Vous êtes attachant, vous êtes digne d'attention et cette lueur d'espoir, fait toute la différence. Ces lueurs donnent l'espoir qu'un jour, votre été viendra.


Vous ne vous souviendrez pas de mon histoire, car ce n'est que le passé d'une inconnue. Vous ne pourrez pas me guérir. Vous ne pourrez pas me sauver ou me cacher. C'est mon histoire. Je dois faire la paix avec elle... Je ne veux pas commencer mon histoire par : « Il était une fois, une petite fille pour qui tout tourne mal. A force d'être bousculée, elle n'apprenait pas à croire. Toujours sur ses gardes. », mais je ne vais rien vous cacher...

Quelques fois, ma vie ressemble à un cercle. Un tourbillon ne cessant de tourner. Et je ne sais pas comment l'arrêter, dois-je le ralentir ou le briser ? Lorsque j'y arrive, cela revient à cause d'un son familier. Une tempête, une tornade qui détruit tout en moi. Quelques fois les choses semblent aller mieux, quelques fois les choses semblent devenir normales. Cela ne fait pas de moi une meilleure personne, mais je fais de mon mieux pour être en paix. Il semblerait que quelques fois je sois... Heureuse. Peut-être que je peux écrire mon histoire sans avoir peur et oublier quelques secondes le passé.

«  Il était une fois, une jeune fille de sept ans. Sa vie avant aujourd'hui n'avait été que plus navrante. Née en Alaska à Fairbanks dans une famille pauvre, cette petite perle grandit dans un foyer violent. Son père ne travaillait pas et était un grand ivrogne et sa mère se soumettait à toutes ses volontés. Aux trois ans de la petite perle, un garçon naquit dans les mêmes circonstances. Louna et Bucky... Deux oisillons qui comptaient uniquement l'un sur l'autre pour ne pas voir la violence autour d'eux. Quand le père frappait la mère, Louna emmenait son petit frère dehors et tout deux regardaient le ciel. A l'école, personne ne voyait les larmes sur les joues de Louna. Jusqu'au jour où son père lui laissa des marques sur le visage. Du jour au lendemain, les policiers et le service de protection des enfants arrivèrent. Louna et Bucky furent séparés pour aller en famille d'accueil. Sans son petit frère, elle était devenue vide, silencieuse, souffrante et colérique. Elle brisait tout ce qu'elle avait sous la main. Déplacée de familles en familles, elle grandissait et sa violence également. Mais fort heureusement, le destin finit par changer et la mère adoptive appelée Kara décida de prendre les décisions. Les décisions qui seraient les meilleures pour le bien être de la petite perle. Louna retrouva son frère et tout deux commencèrent enfin a vivre... Kara était célibataire, mais elle faisait une mère excellente. Également professeur dans une école pour enfants instables, elle restait toujours proche de ses deux oisillons. Elle les aimait comme ses propres enfants.

Louna dessinait à l'encre de Chine sur un galet comme elle le faisait bien souvent. De longs cheveux blonds foncés noués en un chignon, vêtue d'un jean large et d'un T-shirt trop grand pour elle, ses bras étaient ornés de dessins de tourbillons qu'elle s'était faite elle même. Kara se leva puis se pencha sur le travail de la jeune fille.

« - Qu'est ce que c'est ? »
« - Un tourbillon... Une tornade... »
« - Tu sais qu'il y a des tornade dans l'espace ? »
« - Non... »
« - C'est à partir d'elles que naissent les étoiles. »

Il y eut un silence. Le professeur se redressa puis lança un sourire à la Louna, cette dernière grimaça un petit sourire. Elle ne souriait jamais, elle n'avait plus l'habitude. Pendant douze ans de sa vie, elle avait été blessée et détruite. Pour se reconstruire, elle avait un long chemin à faire. Chacun de nous peut devenir une victime, Blessée par les agissement d'autrui. Mais qu'il s'agisse des dégâts causés par une famille violente, ou d'un coups porté par l'objet de notre affection. Il arrive un moment ou nous devons nous relever Et poursuivre notre route. Et si nous en sommes incapables Il nous reste plus alors qu'à prier pour que quelqu'un viennent nous secourir... La fin des cours résonna à travers les murs de l'école. Tandis que Louna rangeait ses affaires, Kara lui rappela que sa mère avait le droit de rendre visite à cette dernière et Bucky. Arrivés au centre familiale, Bucky était assis la tête contre les épaules de sa grande sœur qui lui caressait les cheveux avec affection tandis que Kara allait chercher cette mère qui avait toujours été absente.

« - N'oubliez pas madame que c'est votre dernière visite avec Bucky avant son adoption. »
« - Je ne peux vraiment rien faire ? »
« - Vous avez fait beaucoup d'efforts, mais vous n'avez plus la garde de vos enfants. Du moins pour Bucky. Madame Nocte, vous pourrez peut-être récupérer Louna un jour. Mais il va falloir vous battre plus fort... »

C'était toujours la même chose, toujours la même scène en boucle. La mère des deux oisillons cherchaient à attirer leur attention avec des jouets et des promesses. Elle essayait de se racheter, mais surtout de dire au revoir à son fils qu'elle ne reverrait plus jamais. Tout peut très vite arriver, en moins de temps qu'il n'en faut à la balle d'un tireur pour venir se loger dans la jambe de ses victimes, au médecin pour dire à une épouse que son mari ne rentrera pas dîner, à un père pour faire connaissance avec son fils qui vient de naître... Oui, comme chacun le sait, la vie peut changer plus vite qu'un battement de cœur. La vie peut changer en une fraction de seconde... Des amitiés improbables peuvent s'épanouir et fleurir. Un espoir éteint depuis longtemps peut être ravivé... Quelque soit les changements que la vie nous réservent, Nous devrions lui en savoir gré. Parce qu'un jour vient, toujours trop vite, où il n'y a plus de changement possible.. Et pour Mme Nocte, c'était trop tard, elle avait perdue son fils... Les larmes aux yeux, elle tendit les bras afin d'étreindre une dernière fois Bucky. Mais ce dernier refusa et alla dans les bras de sa sœur.


Louna avait construit un faux ciel sur le plafond représentant l'espace. Ils passaient souvent leurs temps allongés sur le sol à observer ce faux ciel et s'imaginer dans une fusée. Loin de la Terre, loin des problèmes. Voler... Partir...

« - Louna, nous avons de la visite ! »

Dans le salon, un couple typés mexicains se présentait à Kara.

« - Bonsoir, je suis David Alvarez et voici ma femme Anna. »
« - Heureuse de faire votre connaissance, entrez. »
« -  Nous sommes vraiment excités de rencontrer Bucky. »
« - Oh, à ce sujet... »

Kara baissa la voix.

« - Le juge pour enfant m'a confié qu'il serait bien de ne rien dire à Louna. Elle ne pourrait supporter d'être à nouveau séparée de lui aussi brusquement. »
« - Non, bien sûre. »
« - Très bien... Je vais le chercher. Je vous en prie, installez-vous. »

Le couple firent la connaissance du petit Bucky qui les avait déjà adoptés. Louna n'aimait pas recevoir de la visite, elle était bien mieux seule. Généralement la petite perle se rendait à vélo à la plage ramasser des galets et regarder l'océan. La seule paix que la Louna pouvait ressentir se trouvait dans la présence de son frère et dans la nature. L'oisillon aimait les étoiles, la pureté qu'elles dégageaient, mais également les arbres sur lesquels elle grimpait pour voir le ciel. Elle aimait le son de la pluie sur le calme plat d'une rivière, le vent aussi frais que chaud lui caressant la peau, la lumière dorée du soleil sur les feuilles luxuriantes des cimes. L'odeur de l'herbe fraîche tout juste recouvert du voile de rosé le matin. Louna avait réussi à apprécier cela grâce à l'amour de Bucky.

Et comme chaque jours, la jeune fille se rendait à l'école. Elle avait cours d'Arts avec sa mère adoptive. Mais arrivée sur les lieux, une remplaçante était assise au bureau.

« - Kara n'est pas là ? »
« - Non, elle a dut quitter le travail. »

C'est là qu'elle comprit... Un des oisillons avait quitté son nid. Pleine d'espoir, espérant avoir mal réfléchit, elle pédalait sur son vélo en direction de sa maison. Elle laissa tomber son sac puis son vélo et entra par la porte d'entrée.

« - Bucky ! Bucky ! »
« - Louna ! Louna, attends. »

La petite perle ouvrait chaque portes afin de retrouver son frère. A cette heure là, il n'était pas à l'école. Et la maison semblait calme. Trop calme. Sans se fatiguer, elle hurlait le nom de son oxygène. Kara attrapa sa protégée par les bras afin de la faire cesser. Prise comme une lionne sans son petit, Enfermée comme un chien ayant subit mille et une tortures, Louna ne pouvait concevoir que Kara avait fait cela.

« - Bucky ! »
« - Écoutes moi, c'est arrivé très vite ! Ils ne voulaient pas que je te le dise ! Je n'avais pas le droit ! »

Puis finalement la normalité retombe, ça recommence. Quand Louna ferme les yeux, elle voit la vie, la vie qu'elle a toujours désirée. Elle voit les choses différemment. Mais l'oisillon se sent seule dans son nid trop grand pour elle. Louna arracha le faux plafond qu'elle avait peint, puis tout ses dessins. La tempête s'emparait d'elle. Lorsqu'elle arriva en classe le lendemain, elle balança son cartable au visage de Kara. Elle prononçait les paroles de son père.

« - C'est ta faute !! C'est uniquement ta faute !! »
« - Calme toi ! Louna ! »
« - Ne me touche pas ! »

Plus elle grandissait, plus l'espoir disparaissait... Forcée d'aller voir un psychiatre avec Kara et sa mère. La petite perle restait silencieuse, elle se laissait porter par le vent. Tandis que le psychiatre parlait, Louna restait discrète sur son fauteuil sans écouter.

« - Il est important d'être présent dans ces moments là. Elle n'a pas connu la douceur hormis celle de son frère. Quand elle est en crise, elle pense violence. Elle hurle violence. Elle est violence. Je pense sincèrement que la médication peut adoucir son quotidien. »
« - Louna n'a pas besoin de médicaments, elle a besoin d'une thérapie plus approfondie et de revoir plus souvent son frère et sa mère. »

Vous voyez ce qu'elle fait mais vous oubliez pourquoi... Bien que pour elle, sa vie ait commencée à l'âge de sept ans, sa vraie vie précédente était affreuse. Mâture pour son âge, c'est elle qui habillait son frère, qui le nourrissait, qui faisait le ménage, qui nettoyait son propre sang sur le sol versé par les coups de poings de son père. Le petit oisillon à toujours été coincée au cœur d'une tempête...

« - Nous avons eut de la chance d'avoir le droit de revoir Bucky. On iras chez les Alvarez ce week-end. »
« - Pourquoi ils pensent qu'il peuvent juste l'avoir ? Ils ne sont pas ses parents. »
« - Bucky a la chance de pouvoir être stable et de ne pas vivre ce que tu vis... »
« - Et quoi ?! Je ne suis pas assez bonne pour lui ? Je te déteste ! »

Vous oubliez ce qu'elle a entendu. Vous oubliez sa souffrance. Elle explose intérieurement. Quelques fois lentement, quelques fois d'un coup. Assise sur son lit, un bouquin dans les mains, Kara profita du calme pour faire son apparition.

« - Qu'est ce que tu lis ? »
« - Le magicien d'Oz. »
« - Vraiment ? C'est bien ? »
« - C'est mieux que le film. Dans le livre, Oz à sa vraie place. Il n'est pas dans le rêve de Dorothy, il est chez lui. C'est la tornade qui la capture et qui l'emmène loin de chez elle. Elle essai de s’échapper mais la tornade la rejette toujours en son centre. Alors elle tournoie et tournoie à l'intérieure.  »
« - Ce n'est peut-être pas une question échappatoire ? Elle doit peut-être essayer d'apprendre à survivre à l'intérieure.  C'est ce que tu vis... Coincée au milieu de la tornade... Mais tu peux soit la cacher au fond de ton cœur et l'utiliser à bon escient, ou alors choisir de la laisser t'affecter. Les histoires de ta maman ne doivent pas répercuter sur ton histoire. Ton avenir peut être différent. Souviens toi de cela. »

Reprenant tout doucement gout à la vie, Louna se préparait pour voir son petit frère. Quelques semaines avant sa venue avec les Alvarez, elle repeigna le plafond. Elle peignait l'espace, des planètes puis une tornade spatiale. Et quand l'heure fut venue, les deux oisillons restaient allongés sur le sol à observer le plafond.

« Bucky, tu sais ce qu'est une tornade dans l'espace ? C'est quand une étoile va naître, elle va sortir de la tempête. C'est très haut. C'est très dangereux. C'est très dur d'y survivre. Mais à la fin, une lumière brille... Nous sommes des étoiles, Bucky ! »

Louna respira le parfum des cheveux de son petit frère.

« - Au milieu de tout ce vent, nous sommes des étoiles. »

Il était une fois, une petite fille pour qui tout tourne mal. A force d'être bousculée, elle n'apprenait pas à croire. Toujours sur ses gardes. Mais née d'une tempête, elle était devenue une étoile. »


Peut-être avez-vous aussi aussi franchi des montagnes et creuser des vallées de tristesse. Mais plus personne ne pourra briser la force que j'ai au fond de moi. Et plus personne ne pourra me dire qui je dois être. Et quand je commence à avoir mal, j'ai le choix de passer outre. Je vais vous dire une chose : « Nous sommes des étoiles. Nés du feu et du vent. Nés dans le chaos. Mais un jour, un jour, on brillera. »