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tu es dans ta chambre en train de faire gigoter ce petit bout de papier entre tes doigts. son adresse. l'adresse de nikolaï. t'en as appris beaucoup sur lui et sa petite vie depuis que tu es arrivé. il a une femme, des enfants et toutes ces choses que tu n'as pas. pas pour l'instant. tu ne sais pas quoi faire. au final peut-être est-il temps que tu ailles le voir. six années ce sont écoulées depuis la dernière fois que tu as vu son visage ou simplement parlé avec lui. six années, c'est long. assez long pour t'avoir fait le haïr plus que raison. lui et nadya. ce que tu veux, c'est te venger par dessus tout. c'est de leur faute, te répètes-tu sans cesse. oui, c'est bel et bien de leur faute si t'as fini à l'armée. pendant ce temps, ils ont eu le temps de faire leur vie. d'avoir tout ce que tu voulais. aujourd'hui, t'es de retour. en chair et en os et il est temps que tu leur montres ta présence. alors tu te lèves avec difficulté de ton lit trop moelleux et tu files enfiler tes chaussures puis ta veste. tu soupires un long coup avant de sortir de ta chambre. tu arpentes les couloirs du campus avant de trouver la sortie. l'air te fouette le visage et tes cheveux volent au vent. tu aimes cette sensation, elle te ferait presque même oublier que tu vas revoir ton portrait craché. ton jumeau. celui que tu as longtemps aimé. celui qui t'a abandonné et vit désormais une vie comme tu aurais rêvé. le truc c'est que tu sais que tu ne pourras jamais l'avoir, cette vie. c'est trop tard pour toi. t'as aucune chance. il a tout eu et toi, rien. tu marches encore et encore. tu évites de peu de te faire écraser par une voiture, trop à fond dans tes pensées. tu marches. tu pousses des gens au passage. ce n'est pas croyable à quel point les gens peuvent être lents. puis d'un seul coup, tu te dis qu'il faut que tu ailles moins vite. tu n'as pas hâte de le revoir. tu ralentis en grognant dans ta barbe naissante. ah oui, tu as oublié de te raser aussi. t'imagines pas la tête que tu dois avoir. tu dois probablement avoir les yeux défoncés et des cernes de la taille de la russie. il va être choqué, niko. ton petit nikolaï. peut-être va-t-il ressentir des remords? tu n'en sais rien. tu espères, au fond. tes yeux sont fixés sur le bout de papier jusqu'au moment où tu lèves la tête et que tu y es. un sourire s'étend sur ton visage. ce n'est pas un sourire de joie. tu ne sais pas ce qu'il veut dire mais tu souris tout de même. tu as envie de rire parce que la situation est risible. tu croyais ne jamais le revoir et te voilà devant chez lui. une belle et magnifique maison. qu'est-ce que tu donnerai pour le détruire sur le champ. il a eu le temps de se construire une vie parfaite pendant que tu galérais à l'armée. la vie ne t'a fait aucun cadeau et tu as l'impression que pour lui, ça a été tout le contraire. tu ne sais pas si tu as envie que ce soit sa femme qui ouvre ou lui. tu perds toute ta confiance en toi à ce moment précis. tu es anxieux. tu penses que c'est normal après le temps qui s'est passé depuis votre dernière rencontre. tu sens la pression du lien invisible qui vous unit parce que vous êtes des jumeaux et qu'il y a un truc entre vous. quelque chose d'inexplicable qui te manquait au tout début. plus maintenant. c'est comme si tu avais oublié la sensation que ça pouvait te procurer. que tu as oublié ce que c'est d'avoir un jumeau. une famille. tu inspires profondément et tu frappes à la porte. tu attends quelques secondes qui te paraissent une éternité. avant que tu ne puisses t'échapper, quelqu'un ouvre la porte. tes yeux ne quittent pas le bois qui s'ouvre jusqu'à ce que tu aperçoives une tignasse blonde. nikolaï. ton sourire s'étend un peu plus. tu es prêt à jouer ton petit jeu. tu es prêt à l'anéantir. à le détruire. je t'ai manqué? tu guettes sa réaction, toujours avec ce sourire aussi hypocrite que toi à cet instant.
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