MAKSYM KHALSKI ► toby regbo

tu n'as jamais connu ton père. tu n'as jamais eu une figure paternelle dans ta sombre vie. t'avais ton frère alors tu supposes qu'il y avait quand même une image masculine dans ta vie. t'as jamais cherché à savoir où étais ton père mais tu as très vite appris que ce n'était pas normal que tu n'en ais pas. maman, pourquoi je n'ai pas de papa? ça doit faire mal quand ton enfant te pose une question aussi délicate. elle t'a toujours répondu avec calme mais précipitation. c'était comme si le sujet était trop délicat. au fur et à mesure, tu as réussi à faire sans. tu en as frappé des figures. le mot bâtard était dans toutes les bouches des enfants de ton âge. tu revenais avec les jointures et le visage en sang, des bleus partout sur ton corps. la vérité était que tu n'en avais pas grand chose à faire. tu protégeais l'honneur de ta famille. de nikolaï. de nadya. de ta mère. tu n'as jamais été un enfant facile. on pourrait même dire que tu étais le pire de la fratrie khalski. tu n'as jamais été très bon à l'école, ou peut-être était-ce parce que tu ne travaillais pas? tu ne sais pas vraiment. ce que tu sais, c'est que t'en faisais des conneries. tous les jours de ta vie. t'entraînais ton jumeau avec toi. t'entraînais l'ange avec le démon. c'est de ta faute s'il a fait autant de conneries dans sa vie. même quand il disait non, tu trouvais toujours un moyen de le faire dire oui. t'avais toujours les bons arguments pour le faire changer d'avis. ça avait le don d'énerver ta mère mais que pouvait-elle faire? t'étais comme ça. tu renonçais devant rien pour faire des conneries. les rues de kiev étaient ton refuge. tu y passais le plus clair de ton temps. tu passais même plus de temps là-bas que chez toi. tu t'étais fais une sacrée réputation. on te connaissait comme le casse-cou près de chez toi. parfois, nikolaï était embarqué à ta place dans des merdes. on le confondait souvent avec toi. en même temps, vous étiez et êtes les mêmes. des portraits crachés. on peut dire ce qu'on veut mais au fond, tu les as aimé plus que raison tes jumeaux. ils étaient tout pour toi et t'aurais tout donner pour eux. absolument tout. seulement, il a fallu que la vie en décide autrement et que vos chemins se séparent. que votre amour se transforme en une haine cuisante.

c'était le jour j. le jour où vous alliez savoir si vous étiez acceptés à harvard. tu ne te faisais aucun soucis pour nadya, mais toi comme nikolaï, vous n'étiez pas sûrs de vous. votre jumelle était la plus forte d'entre vous et sortait toujours avec des notes bien au dessus de ce qu'on pouvait espérer. le voile était tombé. les trois enfants khalski étaient acceptés dans cette grande école. les ukrainiens allaient arrivés. c'était ce que tu pensais. tu pensais être à leur côté. seulement, après avoir abusé de l'alcool, tu avais pris ta voiture avec ton frère sur le siège passager et ta sœur sur la banquette arrière. fermes ta gueule niko! t'avais l'alcool mauvais, tu le savais parfaitement mais ça ne t'empêchait pas de boire autant que tu pouvais. une petite remarque et tu étais sorti de tes gonds. tu ne sais pas combien de temps à durer votre dispute, mais le reste s'est passé trop vite. beaucoup trop vite. tu n'arrivais plus à contrôler la voiture et tu l'as vu au dernier moment. cet homme. l'homme que tu as tué. l'homme qui a perdu la vie à cause de ta connerie. de la connerie de ton jumeau. en une fraction de seconde, tout était terminé. tout était tracé. ton destin tragique. les flics sont arrivés vite, eux aussi. nadya et nikolaï ont tout de même eu le temps de s'enfuir. tu t'es retrouvé seul. ils t'ont embarqué sans se douter une seule seconde que tu avais été accompagné. tu étais foutu. tu le savais comme si c'était écrit sur le front des flics. tu ne les as pas dénoncé. tu ne pouvais pas. la famille passe avant toute chose. du moins, avant.

ouvres la lettre. je peux pas le faire. tes mains tremblaient. harvard était la chance de ta vie et tu espérais que cette lettre allait envoyée une bonne nouvelle. au fond, tu savais que ce n'était pas le cas mais tu te retenais à l'espoir jusqu'au dernier moment. c'est ta mère qui l'avait ouverte. à la vue de son visage, ton monde s'est écroulé. ils avaient rejeté ta candidature à cause de ce qui s'était passé. ça ne faisait que rajouter un peu plus d'intensité à la haine et à la déception que ta mère ressentait pour toi depuis l'accident. il ne s'est pas passé beaucoup de temps avant qu'elle ne te dise qu'elle en avait marre et qu'elle ne t'envoie à l'armée. c'était une façon de te dire qu'elle préférait que tu sois loin d'elle et de ses enfants. des enfants qu'elle aimait. tu n'as même pas essayé de dire au revoir à nikolaï et nadya, et tu es sorti avec précipitation de la maison pour rejoindre la voiture qui t'attendait. ce n'était pas comme si tu étais un amoureux des adieux.

six années se sont passées. six années qui ont endurcies ta haine pour nikolaï et nadya. l'armée n'a pas été une tendre affaire mais tu t'en es bien sorti. au fur et à mesure que le temps passait, tu as appris à te faire au programme intensif qu'elle proposait. les journées étaient longues et éprouvantes. si tu avais voulu y aller en premier lieu, peut-être que tu aurais pu y trouver ton compte mais ce n'était pas le cas. tu as eu du mal. beaucoup de mal. tu n'as eu aucune nouvelle de ta famille. tu demandais souvent si tu avais du courrier mais à chaque fois, c'était la même réponse. tu te retrouvais à pourrir dans une base alors que les deux autres enfants khalski devaient faire leur vie de leur côté. ce silence radio a eu raison de ton amour fraternel pour eux. tu as vite abandonné ce sentiment pour l'échanger contre une haine intense et une envie de vengeance qui te hante. la seule personne qui a rendu tes journées supportables était un jeune homme que tu as rencontré trois ans après t'être engagé dans l'armée. tu t'es posé beaucoup de questions quant à ta sexualité grâce à lui. tomber amoureux dans l'armée est pas la meilleure chose au monde, mais tout s'est passé dans le plus grand des secrets. il est le responsable de ta demande pour harvard. il n'arrêtait pas de te dire que tu devais absolument retenter ta chance et c'est ce que tu as fais. ta demande a été acceptée comme si ton passé n'était qu'un mauvais souvenir, ou presque. si eskil était persuadé que tu le faisais simplement pour changer de vie et reprendre tes études, tu avais également d'autres idées en tête.

tu es arrivé à harvard en septembre deux mille quinze et pour l'instant, tu n'as toujours pas croisé le chemin de nadya et nikolaï mais tu sais que ça ne ferait que tarder. tu es bien décidé à les faire souffrir. tu sais qu'avec ton jumeau, la tâche sera simple. tu n'auras qu'à te ramener devant lui avec un grand sourire pour que tout redevienne comme avant. la naïveté de ton frère le perdra un jour, tu en es persuadé. tu vas revenir peu à peu dans sa vie et tu vas le faire souffrir. tu as déjà une bonne idée en tête de ce que tu vas faire. avec le temps, tu vas le détruire. tu vas lui prendre tout ce à quoi il tient et tu finiras par le détruire. avec nadya, ça va être plus compliqué mais tu es persuadé que tu y arriveras. tu espères faire payer ta mère de la même manière.

tu t'intègres plutôt bien à ton nouvel environnement. tout est comme tu te l'étais imaginé et tu n'es pas déçu d'avoir fait ce choix. tu fais de ton mieux pour y arriver, tout en passant le plus clair de ton temps à faire la fête. depuis ton retour de l'armée, tu rattrapes le temps que tu as perdu. l'alcool, la drogue et le tabac coulent à flot. tu es rapidement devenu le roi de la débauche.