claareth (+) knockin' on heaven's door

Le froid qui s'est abattu sur Cambridge m'immobilise chez moi. Oui, je l'avoue, c'est une simple excuse pour jouer à l'ermite. J'ai allumé la vieille cheminée dans le salon, ma soeur n'est pas là, je vais pouvoir me prendre un bain et glander. Je me deshabille sur le chemin de la salle de bain et plonge dans l'eau bouillante et mousseuse. Je soupire de bonheur et me réchauffe enfin. J'aurais espéré que ce moment puisse être paisible mais un flot de pensées fracassantes vinrent perturber mon espace de détente. J'ai merdé. J'ai abandonné LA fille qui m'intéresse le plus et mon premier amour est atteint d'une leucémie. Vive l'année deux mille quinze ! Je n'en peux plus. Je plonge sous la surface et tout à coup, plusieurs jappements sourds se font entendre. Je surgis de l'eau, le coeur à mille à l'heure. Iris aboie. J'hurle pour la faire arrêter, les voisins n'en peuvent déjà plus et c'est malheureusement le seul endroit que je peux me payer. Je ne voudrais pas me faire expulser. Je sors du bain, noue une simple serviette autour de ma taille et pars à la recherche de la chienne infernale. Elle est plantée devant la porte à grogner. Tout à coup, une petite voix fluette m'interpelle de l'autre côté de ma porte d'entrée. Claarys. Et merde. Qu'est-ce qu'elle peut bien faire ici après ma fuite honteuse. Je l'entends me signaler qu'elle sait que je suis là. Je suis grillé mais heureux à l'intérieur qu'elle soit là, derrière cette simple paroi en bois. Je saute sur les clés, déverrouille la porte, oubliant que je suis en petite tenue et ruisselant. " Aheum, j'étais à la salle de bain, un problème ? Entres. " je me décale sur ma droite pour la laisser passer et referme derrière moi immédiatement. Ce n'est plus un rêve, la fille qui me plaît le plus à Harvard et dans le monde entier est chez moi. " Tu veux que je prenne ton manteau ? " je suis alerte comme jamais, agité comme une puce et maladroit. J'ai très envie de m'excuser et mettre enfin derrière moi ma maladresse de la dernière fois. Seulement, je ne trouve pas les mots ni la manière d'aborder les choses. Je me contente de faire comme si rien ne s'était passé...

J’étais prête, fin prête. Mes valises étaient bouclées, j’avais mon billet d’avion, mon passeport. Tout était prêt. J’allais rentrer à la maison. Australia me voilà. J’étais contente, satisfaite. J’avais hâte d’être entouré de ma famille, ma mère, ma sœur, mon père : ma petite famille. Je disais au revoir à ma meilleure amie, Palmyr, à Samaël, à mes deux colocataires, je mettais mon chien dans sa cage et j’y allais. J’étais partie assez tôt, trop tôt même mon avion ne partait pas avant plusieurs heures, mais j’avais un arrêt à faire avant, chez Seth. J’avais retardé cette petite confrontation pendant assez longtemps, j’avais envie, besoin de le voir. De lui demander ce qu’il lui avait pris surtout. Quelle mouche lui avait piqué. On ne laisse pas une fille comme ça, au milieu d’un repas sans explication ni rien, et on ne disparait pas de sa vie en un clin d’œil. Au moins, si j’allais chez lui, il ne pourrait pas fuir. Au moins ça. « Seth ? » Je frappais à la porte, mais je n’entendais pas de réponse. J’aurais l’air bien bête s’il n’était pas là, à crier à sa porte comme un témoin de Jéhovah. Je viens prêcher la bonne parole. C’est ce que j’avais l’impression d’être. Une stalkeuse. Mais je ne me décourageais pas pour autant. Je continuais de frapper, et les aboiements de sa chienne me pris par surprise, très vite suivi par la voix de Seth. Au moins, il était là. « C’est Claarys. Je sais que tu es là Seth, je veux juste te parler. » Je soupirais. La porte venait de s’ouvrir et c’était un Seth, à moitié nue et le corps encore ruisselant qui me regardait. « Non aucun… » J’entrais d’un pas décidé, suivi par mon chien. « J’espère que ça ne t’ennuie pas, j’ai emmené Berlioz avec moi. Je ne pouvais pas le laisser seule dans la voiture. » Je regardais au sol la petit Iris, et je ne pouvais me retenir de la caresser. Elle était belle. « Non c’est bon, je ne comptais pas rester très longtemps je voulais juste… » Je regardais le jeune homme dans les yeux, mais mon regard se perdait gentiment sur le reste de son corps, et je pouvais déjà me sentir rougir. « Tu devrais aller te changer, tu seras plus à l’aise. Je trouverais une place pour mon manteau ne t’inquiètes pas. » Je lui adressais un faible sourire et essayais de concentrer toute mon attention sur autre chose que lui, comme sa chienne. Berlioz et Iris faisait déjà ami-ami.

Pourquoi est-elle là si tout va bien ? Pourquoi aurait-elle aussi besoin que ça aille mal pour venir me voir ? J'ai vraiment un grain à voir la vie en noir. La demoiselle entre et me présente son toutou à elle, Berlioz. Je craque devant sa bouille mais je ressens immédiatement une crainte. La rencontre entre lui et Isis. Elle n'est pas sauvage avec les êtres humains mais avec ses congénères, ça part parfois en baston généralisée. Par chance, elle semble apprécier son nouveau compagnon. Je laisse la rousse envahir les lieux sans émettre de restrictions. Lorsque j'essaie d'ôter le par-dessus de la demoiselle, j'apprends rapidement qu'elle n'est que de passage. C'est peut être un dernier au revoir... Rien que d'y penser j'en ai la poitrine en lambeaux. Je crois que ma nudité partielle l'a dérange, elle ne finit pas sa phrase et ses pupilles parcourent nerveusement mon corps. Je reste médusé autant qu'elle jusqu'à ce qu'elle m'ordonne presque d'aller enfiler une tenue descente. Je m'exécute et disparais dans le couloir menant aux chambres. J'enfile un boxer, un tee shirt blanc et un bas de jogging servant aussi de pyjama. Cela fera l'affaire, je ne vais pas non plus me mettre sur mon 31 pour quelques minutes à peine. Et puis je suis chez moi. Je réapparais dans la pièce principale où Claarys s'intègre dans le décor peu à peu. " Tu veux quelque chose à boire ? " je continue de tourner autour du pot par peur d'affronter la réalité. Tiens, la problématique de ma vie entière revient à la charge. Je frôle Claarys en passant devant elle et je me loge devant le réfrigérateur. J'avais envie d'une bière de toute façon. J'ouvre le frigo et me sers tout en attendant la réponse de la jeune femme presque muette. Je saisis ainsi qu'il n'est pas question d'une rencontre amicale et que l'on va devoir jouer cartes sur table. Je décide enfin de prendre les devants, comme un homme devrait le faire. " Écoutes Claarys, j'aurais dû m'excuser bien avant pour la dernière fois, je n'ai pas voulu t'en parler parce que j'ai tout simplement honte de piquer une crise de panique devant une future psychologue ou je ne sais quoi ". Quel bien fou de vider son sac, j'ai perdu une tonne en cinq secondes. Et si c'était simplement le poids de ma virilité ?

J’avais hâte d’être en Australie, avec ma famille, d’être entouré de ceux que j’aime, mais je ne pouvais pas oublier ce à qui je tenais ici aussi. Je ne pouvais pas partir en laissant notre situation en suspens, pas du tout. Je l’étais donc permise de passer par chez lui, c’était un petit détour, mais je ne pouvais pas m’en empêcher. J’étais contente de le voir, même si il était dans une tenue auquel je n’étais pas habitué. J’aurais voulu pouvoir regarder ailleurs, mais je ne pouvais pas. C’était devant moi, et ce n’étais pas désagréable à regarder, mais je ne voulais pas que ça me déconcentre de ce que j’étais venue lui dire. « Oh, oui. Merci. Ce que tu veux. » Seth revenait, habillé, et je tenais mon chien dans les bras, mais je le déposais au sol pour qu’il aille faire ce que bon lui semble, il était bien élevé je savais qu’il ne ferait pas de dégâts. Je prends la bière qu’il me tend avec un sourire, et avant que je n’ai le temps de boire une gorgée, il partait dans un petit discours. Au moins, je n’aurais pas la tâche difficile de lancer le sujet. J’étais soulager qu’il l’aborde, mais anxieuse à l’idée de répondre. « Je ne suis pas qu’une future psychologue. » C’est vrai, j’étais une personne, et je n’étais pas définie par ce que j’étudiais, au contraire. J’étais bien plus qu’une étudiante en psychologie, et même si j’ai tendance à vouloir régler les problèmes des autres, je n’étais pas du genre à les juger. Je n’aurais jamais jugé Seth. « De quoi tu as peur, vraiment ? Je pensais qu’on était cool, qu’on avait je sais pas… quelque chose ? » Je détournais mes yeux des siens et regarder ma bouteille. « Je voulais juste comprendre… Pourquoi tu me fuis ? »