LOÏS WINSFELD ► chloe moretz

Un ange sorti de l'enfer.

« Félicitations Mademoiselle Winsfeld, c’est une magnifique petite fille ! » Depuis ma naissance, j’avais porté un nom que je chérissais tout autant que la personne qui me l’avait transmise. Ma mère avait toujours été un vraie battante, une personne invulnérable que rien ne pouvait atteindre, malgré le peu de moyens que nous avions et le fait que je n’avais aucun modèle paternel, elle s’était toujours promise de faire de ma vie un conte de fées. «  Elle est magnifique.. » Voilà la première phrase qu’elle avait lancée, son regard plongé dans le mien et des larmes humidifiant soudainement ses yeux. Ce qui était plus que certain c’était le fait qu’elle n’avait pas eu un passé bien facile, elle avait longtemps été battue par son compagnon et lorsqu’elle avait appris sa grossesse et qu’après cette annonce les coups n’avaient faits que s’amplifier, elle avait fini par craquer et par partir de l’appartement qu’elle partageait avec lui. Elle avait passé sa grossesse seule, tentant d’éviter le papa de sa fille pendant six mois et espérant qu’il ne chercherait pas à reprendre contact avec elle en scandant haut et fort que cette enfant était aussi la sienne et qu’elle n’avait pas le droit de partir ainsi sans qu’il ne lui donne son avis. Il faut dire que son cher ex-compagnon n’avait pas du tout accepté leur rupture, la manipulation dont il avait fait preuve sur son ex-compagne avait était tel qu’il était persuadé qu’elle ne lui échapperait plus jamais, seulement c’était sans compter cette grossesse non prévue qui avait fait ouvrir les yeux à la future maman qui ne voulait pas de cette vie pour moi. Au fait, j’avais réussi à lui ouvrir les yeux avait même de naître, j’avais de quoi être fière d’avoir une mère capable de se mettre en danger pour éviter que je ne vive le même enfer qu’elle.


La révélation

« Maman, est-ce qu’il est mort mon papa ? » Voilà l’une des fameuses questions que a mère appréhendait d’entendre et dont elle ne savait que répondre. Elle ne voulait pas que je me considère comme étant l’enfant d’un monstre et pourtant je l’étais bel et bien… Non, sans cesse elle tentait de dévier la discussion, de me rassurer comme elle le pouvait mais du haut de mes huit ans, je n’étais très certainement pas dupe… « Maman s’il-te-plaît dis-moi, j’ai besoin de savoir ! » Elle baissa la tête, visiblement perturbée. « Ma chérie, tu es trop jeune pour comprendre… » Je m’asseyais et la regardais en croisant les bras, faisant une petite bouille vexée, ma chevelure blonde tombant en cascade sur mes épaules. « Maman tu te souviens l’année dernière ? Quand on a dû déménager précipitamment et se cacher pendant des semaines, c’était à cause de lui n’est-ce pas ? » Elle déglutit difficilement, tentant de trouver ses mots, la situation n’avait rien de simple, surtout depuis que mon père avait tenté de reprendre contact avec elle et de prendre de mes nouvelles, l’air de rien. A cet instant, ma mère avait dû partir avec moi pour éviter que la situation ne se retourne contre elle. Ce fameux manipulateur, avec sa voix doucereuse au téléphone et ses promesses d’avoir changé après toutes ses années n’arriverait très certainement pas à ses fins une nouvelle fois, c’était certain… « Ma chérie je… » Elle s’assied à côté de moi en prenant mes mains dans les siennes avant de prendre la parole. « Avant que je te mette au monde, ton p… géniteur n’était vraiment pas… gentil avec moi et… » Je lui coupais immédiatement la parole avec toute l’innocence qui me caractérisait : « Il te frappait c’est ça..? » Ma mère baissa à nouveau la tête, laissant une larme couler le long de sa joue. « Maman, est-ce qu’il te frappait ? » Elle hocha doucement la tête sans réussir à trouver ses mots. « Je m’en fiche, si un jour je le vois je lui dirai que je le déteste et que jamais je n’aurais envie d’être avec lui ! » Elle sourit doucement, ne masquant pas son émotion pour autant. « Il ne faut surtout pas que le vois Loïs, tu comprends ? Jamais je ne veux que tu ne te retrouves face à face avec lui, jamais je ne le laisserai toucher à ma petite princesse… » Mon air résigné s’éclaircit peu à peu alors que je serais ma maman très fort dans mes petits bras fluets. « Je t’aime maman, tu le sais ça ? Rien ni personne ne pourra nous séparer ! »  «  Moi aussi je t’aime ma chérie… »


Un monde qui s'effondre

« Mademoiselle Winsfeld ? Venez avec moi s’il-vous-plaît… » J’étais assise à ma table, en plein cours de mathématique lorsque le proviseur était arrivé et m’avais demandé de le suivre l’air très grave. J’ignorais ce qui était en train de se passer mais je ne pouvais réprimer une boule au creux de mon estomac, comme si j’avais déjà deviné que quelque chose de particulièrement grave venait d’arriver. J’avais suivi le directeur jusqu’à son bureau où deux agents de police semblaient m’attendre. « Loïs, c’est bien toi.. ? Ecoute nous avons une mauvaise nouvelle à t’annoncer… Ta maman a eu un accident de voiture et elle est… » J’écarquillais les yeux et je lui coupais soudainement la parole, voulant en venir immédiatement aux faits, j’avais peur, peur que le pire soit arrivé. « Je vous en supplie ne me dites pas qu’elle est morte… » Le deuxième agent prit la parole à son tour, visiblement ému et contrarié de devoir s’afférer à cette tâche plus que délicate. « Elle n’a pas survécu… Je suis désolé… » Tout à coup je m’effondrais en larmes, me laissant tomber sur le sol du bureau. Je ne pouvais pas, jamais je ne réussirais à vivre sans ma mère, j’étais totalement perdue…
Suite à ce jour, j’avais été placée en foyer, me contentant de survivre plutôt que de vivre, j’étais effondrée et je savais que jamais je ne pourrais me remettre de la perte du seul membre de ma famille. J’étais au fond du gouffre, persuadée que rien de pire ne pouvait m’arriver, à moins que… « Loïs ? Nous avons quelqu’un qui s’est présenté pour venir te chercher… Il semblerait que ce soit ton père… »


Le dernier jour de mon ancienne vie

« Tu n’es qu’une lâche, une incapable, tu es encore pire que ta mère, si tu savais à quel point j’ai honte de toi ! » J’étais en larme, de nombreux hématomes recouvrant mon corps frêle. Depuis un an maintenant, mon père me faisait vivre un véritable enfer, le même enfer qu’avait vécu ma mère dans le passé. J’étais vide, je n’étais plus que l’ombre de moi-même, je passais mon temps à devoir cacher les bleus qui recouvraient mon corps et à devoir trouver des raisons aux quelques fractures qu’il m’avait causé par tant de violence, c’était comme s’il se vengeait du départ de ma mère, comme s’il la voyait à travers moi. « Je suis désolée… Arrête je t’en supplie… » Mon visage était tuméfié, rempli de larmes, je ne savais plus comment faire pour lui échapper je n’osais même plus sortir de chez moi de peur qu’il ne me rattrape. Le téléphone sonna alors qu’il avait levé sa main pour me porter un nouveau coup. J’étais recroquevillée, à même le sol de la cuisine, les yeux fermés, attendant qu’il se déchaîne à nouveau contre moi mais il se stoppa dans son élan. « Reste ici, je n’en ai pas fini avec toi ! » Quelques secondes plus tard, il revint en trombe et recommença de plus belle, jamais il ne s’arrêterait, j’allais mourir, c’était certain. Cramponnée au plan de travail, j’attrapais un couteau que je plaçais dans mon dos, sans réfléchir. Il me gifla avec une telle violence que je m’étalais à nouveau sur le sol puis il montait à califourchon sur moi pour m’immobiliser et s’apprêta à me mettre un coup de poing puis tout à coup, plus rien, le silence le plus complet, un silence de mort… Je le poussais sur le côté, la main droite et le visage tacheté de sang et le laissais retomber sur le sol, inerte. Je me relevais, l’observais quelques secondes et me rendait compte de ce que je venais de faire, je venais de tuer mon propre père. Je portais mes mains à mon visage, étalant le sang qui s’y trouvait et laissait tomber le couteau de cuisine à même le sol. Qu’est-ce que j’avais fait, mon dieu qu’est-ce que j’avais fait ? Ni une ni deux je montais les escaliers, me rinçais le visage et les mains et préparais rapidement quelques affaires avant de prendre la fuite. Je n’avais plus le choix, j’étais devenue une criminelle, il fallait que je m’enfuie, aussi vite que possible.


Un goût de renouveau

« Damon, Damon ça sonne à la porte ! » J’avais passé la nuit chez le jeune homme qui partageait son appartement avec ses colocataires, partis depuis un moment déjà. Il m’arrivait régulièrement de passer du temps chez lui, où je me sentais particulièrement à mon aise. Sortant de la douche, je m’empressais d’enfiler des sous-vêtements pour aller ouvrir la porte à sa place. Damon était tout pour moi, il m’avait tendu la main quand j’en avais besoin et aidé financièrement quand j’avais débarqué dans le pays, en fuite et sans un centime en poche. Il était à la fois mon meilleur ami, mon confident et mon frère… De cœur ou non peu importe, cet amour fraternel que je ressentais pour lui était bien plus fort que n’importe quel lien du sang. Lorsque j’avais fait sa rencontre, j’étais perdue, déboussolée et sans repère, il avait su lire cette détresse dans mon regard et m’avait pris sous son aile sans demander son reste, je lui devais énormément, j’ignorais où j’en serais s’il n’avait pas été là dans ma vie. Pour moi, il était tout bonnement devenu un ange gardien, un ange gardien qui était à présent totalement indispensable dans ma vie. « Euh… Bonjour… Est-ce que Damon est là ? » Je lui souriais, le plus naturellement, étonnée de le voir si mal à l’aise… Quoique, il ne devait sans doute pas s’attendre à me voir en tenue aussi légère, je me mordillais la lèvre inférieur sans savoir comment me justifier, j’avais tellement l’habitude d’être à mon aise chez Damon que je n’avais pas vraiment fait attention à la situation compromettante dans laquelle je me mettais. « Une minute il… » Sans que je puisse continuer Damon  arriva dans mon dos, visiblement surpris. « Loïs, ça ne va pas de te balader comme ça devant mes potes ? Va t’habiller ! » Je le regardais puis levais les yeux au ciel avant de faire demi-tour et de me diriger dans la salle de bain, tout en marmonnant entre mes dents : « Roh ça va, t’avais qu’à ouvrir la porte toi-même ! » Puis je partais me mettre quelque chose sur le dos avant de me faire hurler dessus. Quelques minutes plus tard, je le rejoignais dans le salon, tout naturellement.  « Ca y est t’as trouvé tes fringues ? T’as pas honte, tu t’imagines des cauchemars qu’il va faire ce soir après avoir vu ça ? » J’attrapais un coussin du canapé et lui balançais en plein visage. « Ca va, il s’en remettra ! Et puis je te l’ai dit, t’avais qu’à ouvrir la porte ! »


I Love Harvard

Pendant longtemps j’avais été traitée comme une moins que rien par mon père, j’étais moi-même incapable de me souvenir le nombre de fois où il m’avait scandé haut et fort que j’étais une ratée et que je ne pourrai rien faire de ma vie. Pourtant, j’avais toujours eu de bons résultats à l’école, malgré tous les bouleversements de ma vie mais cela n’avait jamais été assez pour lui. En pensant à cela, tenant une lettre dans mes mains tremblantes, je ne pouvais m’empêcher de ricaner intérieurement, lui qui avait osé me rabaisser sur mes capacités alors qu’il n’avait bien évidemment rien fait d’extraordinaire dans sa vie, si seulement il était là juste pour voir ce sourire satisfait sur son visage, si seulement il avait été là juste pour lire le contenu de cette lettre que je tenais entre les mains…

« Mademoiselle Winsfeld,
Nous avons le plaisir de vous informer que votre candidature dans l’université d’Harvard a retenu notre attention et que vous commencerez donc votre scolarité parmi nous dès la rentrée prochaine… »

Ma revanche, je l’avais obtenu et cette satisfaction intérieure de constater que je n’étais pas la ratée que j’avais pensé être valait plus que tout l’or du monde. Je savais que je devrais travailler dur et que je ne pouvais me permettre d’arrêter d’enchaîner les petits boulots pour pouvoir me payer mes études mais cela valait le coup, c’était certain. Je n’avais pas eu à réfléchir à deux fois pour décider de quelles seraient mes options, passionnée de dessin et de danse depuis mon plus jeune âge, mon choix c’était imposé à moi tout naturellement.
Moi intégration avait été plutôt facile, meme si j’étais perdue dans un premier temps, j’avais tout doucement réussi à me faire une place. Je n’étais pas du genre à m’imposer mais pour autant, je savais que je passerai un bon nombre d’années entourée des mêmes personnes et autant dire que plus le temps passait et plus cela me réjouissait d’avance. « Mademoiselle Winsfeld ? Bonjour Mademoiselle, je vous souhaite la bienvenue dans l’université d’Harvard ! »