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- Nous étions samedi soir. La plupart des jeunes de Boston se préparaient à sortir en boîte ou à faire la fête. Pour moi c’était tout le contraire: Je me préparais pour aller travailler. C’était toujours le même rituel, je passais une bonne heure à la salle de bain, essayant tant bien que mal de trouver l’équilibre parfait pour le chignon que je devais porter et d’ajuster au mieux ma jupe crayon ainsi que mon chemisier blanc. J’étais habituée à ce que mes soirées se passent là-bas puisque pour pouvoir payer absolument toutes mes factures et pouvoir vivre un minimum, je devais m’y rendre en semaine également, les weekends ne suffisant plus.
Mon travail, en tout cas au début, était simple, il fallait que j’accueille les clients du Peery Hotel et que je les place dans leur chambre, que je réponde au téléphone et que j’aide le patron dans ses comptes. J’aimais ce que je faisais, c’était agréable et j’avais l’opportunité de rencontrer beaucoup de monde. Parfois, j’accueillais des personnes de l’autre monde, de la haute société et ça me plaisait de voir que moi aussi je pouvais mettre un pied, ne serait-ce que ce petit pied dans ce monde si différent du mien.
Puis au fur et à mesure, je me rendais bien compte que ce n’était pas suffisant, je travaillais cinq heure et demi par poste et seulement quatre jours par semaine ce qui me revenait à mille dollars par mois. Je travaillais dur et j’essayais tant bien que mal de quémander à mon patron une augmentation même si je savais pertinemment qu’il refuserait.
Puis un jour, un client régulier et particulièrement riche et important devait faire son apparition. Mon patron était particulièrement stressé à l’idée de l’accueillir cette fois-ci, car un autre hôtel avait ouvert ses portes quelques mois plus tôt et la concurrence qui s’exerçait entre les deux enseignes était redoutable. Il voulait innover quelque chose, trouver un moyen de faire rester son client sachant que son établissement commençait à devenir vieux et dépassé.
C’est à ce moment-là qu’il me demanda d’endosser le rôle d’ « escort ». Il ne me proposait rien de sexuel, je devais juste accompagner le client et le servir dans tout ce qu’il désirait. Bien entendu, ce travail était bien plus payé que celui que je faisais habituellement. Devant l’insistance de mon patron, sa proposition alléchante et le bénéfice que cela pouvait m’apporter, j’avais finalement accepté, ne me doutant pas que cela pouvait dégénérer.
Cette soirée avait mal tourné. Comme je l’avais pressenti, j’en avais été réduite à Call-girl. Bien sûr, cet évènement aurait dû me faire tourner les talons, tout le monde aurait arrêté et aurait cherché quelque chose d’autre sauf qu’en l’espace d’une soirée j’avais gagné la totalité de ma paie mensuelle. Mon patron, lui, avait reçu les félicitations de ce client si important et il m’encouragea à continuer si je voulais gagner cette somme à chaque fois.
J’avais longuement réfléchi à cette proposition et rien ne m’obligeait à continuer mais devant tout cet argent et la facilité à le gagner, j’avais malheureusement accepté.
Durant des mois j’avais offert mes services à des clients d’une classe prestigieuse, il y avait des pères et leur fils, parfois ils étaient attirants, d’autres fois pas du tout. Malgré ça, j’avais continué et j’avais remarqué d’autres filles qui commençaient à venir travailler avec moi. La pression était presque insoutenable, d’autant plus que je n’arrivais plus du tout à gérer mes cours, mon travail et le reste.
Je gagnais bien ma vie et à ce moment-là c’était tout ce qui m’importait car j’avais beaucoup de choses à payer, à rembourser…
Revenons à ce samedi soir.
Je pensais beaucoup à Noah, mon petit-ami depuis quelques semaines et bien évidemment, depuis que nous nous fréquentions, j’avais stoppé cette activité vénale, prétextant à mon patron que pour des raisons de santé, je ne pouvais pas avoir de relations sexuelles. Bien évidemment, ce n’était qu’une excuse et plus le temps avançait et plus mon patron s’impatientait, voulant que je reprenne mes services. D’ailleurs, j’étais censée, ce soir-là, accueillir un milliardaire et lui offrir mes soins pour toute la soirée. J’avais dans l’idée d’éviter à tout prix le moment fatidique et de m’éclipser avant que quoi que ce soit n’arrive.
J’étais stressée, j’essayais de trouver tant bien que mal une solution à ce problème dans lequel je m’étais mise toute seule. J’étais sur le chemin, à pieds, je tenais mon parapluie entre mes deux mains car la pluie venait alourdir encore plus ce tableau morne et triste.
Un kilomètre et demi plus tard, je me retrouvais dans l’enceinte de l’hôtel, préparant mon bureau d’accueil et quelques affaires par-ci, par-là.
J’aperçus quelques minutes plus tard mon patron qui s’approchait de moi. Je le saluai et lui souris en même temps. « Amanda, j’espère que tu es prête, notre client ne va pas tarder à arriver. » Me dit-il d’un air très sérieux et presque aussi stressé que moi. Je lui souris un petit peu, toujours, et lui répondit : « On ne peut plus prête… »
A vrai dire, j’avais menti, je n’étais pas prête du tout et j’avais juste envie de m’enfouir en courant. Le visage de Noah hantait mes pensées et c’était tellement difficile de désobéir aux ordres de mon patron… J’étais tiraillée entre deux et cette situation était juste horrible.
Une heure plus tard, j’accueillais le client. C’était un quarantenaire, bien habillé et très élégant. Je faisais preuve de beaucoup de professionnalisme et essayais tant bien que mal d’être la plus agréable possible. Mon patron vint saluer le milliardaire et ils commencèrent à parler entre eux. Je laissais traîner mon oreille et j’entendais quelque peu leur conversation…
« - Vous faites venir vos filles d’Europe de l’Est ? Dit le richard.
- Eh bien, oui quelques-unes viennent de Russie, d’autres de Scandinavie… Répondit le patron.
- Parfait, vous savez que j’adore les blondes… »
Je préparais les clés de la prestigieuse suite que notre client attendait jusqu’au moment où il se dirigea vers moi pour que je l’accompagne. Ce que je fis immédiatement. Nous montions les escaliers de marbre jusqu’à arriver à la suite qui était réservée à son nom. Je l’ouvris et laissai l’homme entrer dans la pièce. Mon rôle, désormais, était d’entrer avec lui, lui demander ce dont il avait besoin et le servir du mieux que je pouvais.
J’entrai également dans la pièce, refermant la porte derrière moi, et m’approchant de l’homme qui commença à s’installer dans un des canapés. Je lui proposai un verre de champagne qu’il accepta immédiatement. Je m’exécutai et lui servis une coupe. Je ne le regardais pas du tout mais je pouvais sentir son regard posé sur moi. C’était oppressant, bien plus oppressant que tout ce que je connaissais déjà. Je savais ce dont il avait envie et je n’étais pas prête de lui offrir quoi que ce soit. Néanmoins, mon travail consistait en son accompagnement et à l’assouvissement de ses désirs même les plus inavouables. Je vins m’installer à côté de lui et pris instinctivement une coupe de champagne dans mes mains pour trinquer avec lui. C’était la seule chose dont j’avais le droit, alors j’en profitais au maximum. Nous commencions à parler quelque peu, des banalités sans grand intérêt et je sentis qu’il se rapprochait de moi de plus en plus. Il colla sa main à ma cuisse qu’il montait de plus en plus, mes joues se colorèrent doucement en une teinte rouge rosée. Je le regardai dans les yeux, sentant mon cœur palpiter de plus en plus au fur et à mesure que je sentais sa main glisser sous ma jupe.
Soudain, je me relevai et déposai ma coupe de champagne sur la table basse en verre située devant moi. Joignant mes deux mains l’une dans l’autre, je regardai l’homme et lui dis :
« Il est de coutume que je vous présente les lieux, et il me semble que c’est la première fois que vous venez dans notre hôtel. Laissez-moi vous montrer l’ampleur de la beauté de vote suite, Monsieur. » Je lui souris en lui tendant l’une de mes mains. Même si j’étais affolée, que je ne voulais absolument pas rester avec cet homme et que j’aurais préféré partir en courant, je devais faire le minimum de mon travail tout en évitant l’instant fatidique.
Durant une dizaine de minutes, je présentais à mon interlocuteur tous les coins et recoins de sa suite. Il me regardait avec de plus en plus d’insistance et s’arrêta lorsque nous étions près du lit. Il m’attrapa par les hanches et commença par m’embrasser. Je ne le repoussai pas directement, posant moi-même les mains sur ses épaules. J’avais le cœur qui battait à cent à l’heure, et je n’arrivais pas à me défaire de cette étreinte qu’il resserrait de plus en plus. J’avais gardé les yeux ouverts tandis que lui, les avaient fermés. Je paniquais, je ne savais pas quoi faire et comment me sortir de cette situation.
Quelques minutes plus tard, je me retrouvai sur le lit, sous le milliardaire et j’essayai tant bien que mal de me défaire de son emprise. J’avais les mains posées sur ses épaules et réfléchissais à un moyen de m’éclipser quand soudain on sonna à la porte. « Monsieur, vos bagages sont arrivés. »
Sauvée par le gong, il se redressa et m’ordonna de rester là, le temps qu’il récupère ses valises.
Je me mis assise et me relevai, n’obéissant pas aux ordres de l’homme et me dirigeant vers la porte de la suite. « Excusez-moi, j’ai quelque chose à récupérer, je vous rejoins d’ici quelques minutes, n’hésitez pas à vous mettre à l’aise… » Lui dis-je tout en souriant. J’avais les mains qui tremblaient mais j’essayais de garder mon calme. Après tout, j’étais censée être habituée à ce genre de situation, mais tout me rappelait tellement mon petit-ami et le fait que je ne pouvais pas me permette de lui causer une infidélité que je perdais tous mes moyens.
Je sortis de la suite, et descendis les escaliers deux par deux. J’étais tellement mal à l’aise, je ne pouvais pas rester une minute de plus dans cet établissement. J’avais longtemps réfléchis à ce que je devais faire maintenant que je n’étais plus célibataire, et j’en avais conclus qu’il fallait que je cesse toute cette activité qui de toute manière ne me ressemblait pas du tout. Il était bien tard pour en venir à une conclusion pareille mais l’impossibilité de faire autrement m’avais prise au dépourvu.
Je croisai mon patron qui avait l’air d’être surpris de me voir ici. Il ne tarda pas à me le demander ce à quoi je répondis : « Désolée, je ne me sens pas bien, je dois rentrer. » Je pris mon manteau que j’avais laissé à la réception et le passai directement pour pouvoir m’en aller.
C’était certainement le dernier jour que je mettais les pieds dans cet hôtel. Personne ne m’avait retenue et c’était tant mieux. Je ne voulais en aucun cas retourner dans ce lieu sordide. Je préférais travailler tous les soirs ainsi que tous les weekends pour gagner ma vie que de rester une seconde de plus dans cet établissement.
Je marchais sous la pluie pour rentrer à la Quincy House, j’avais oublié mon parapluie, mes cheveux se trempaient petit à petit, mes vêtements également. J’étais contente de m’être enfin décidée à arrêter toutes ces histoires, elles me compliquaient la vie plus qu’autre chose…
Arrivée là-bas, je me posai sur mon lit et pris mon téléphone pour envoyer un texto à Noah : Coucou, qu’est-ce que tu fais ce soir ?
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