Robin Z. Chemtov ► Hannah Glasby

"Il y a des jours comme ça, où on préférerait ne pas ouvrir les yeux et ne plus jamais se réveiller."

« Où suis-je ? » Voilà la première question que je m'étais posée ce jour-là (en mai dernier) en ouvrant les yeux. Une question simple, une question que l'on pense sans réelle conséquence et pourtant... Pourtant cette simple question a changée ma vie... Car la réponse qui m'est alors venu en retour n'est pas un mot, un lieu ou une simple réponse tout court en réalité... Non, la seule réponse que j'ai eu à cette question n'était autre que les éclats des sanglots de ma mère. Elle pleure... Je ne sais pas réellement pourquoi... Je n'arrive pas à savoir où je suis alors que quelqu'un me saisit la main. Un poigne forte. Est-ce mon père ? Est-ce mon frère ? Il faut que je redresse la tête pour savoir... Savoir qui me tient la main. Je n'y arrive pas. J'ai tellement peu de force... Pourtant, l'homme qui me tient la main fini par se pencher vers moi et laisse entendre un « Grâce à HaShem, tu es vivante ! » C'est alors que j'ai eu la réponse à mes questions... L'homme qui me tient la main n'est autre que mon père. Et pour le lieu... J'étais à l'hôpital... Pour quelle raison ? A ce moment-là, je ne m'en souvenais pas encore, mais la vérité, les souvenirs, n'allaient pas tarder à me revenir en pleine figure.

"Il y a des instants comme ça, où respirer n'est plus un automatisme et où le manque d'air nous rappelle que l'on est toujours, et malheureusement, encore en vie."

C'était un mollard craché contre le vent, quelque chose que l'on ne désir pas, quelque chose que l'on préférerait éviter et pourtant, indéniablement, ça nous arrive en pleine gueule... Et ce fut le cas... Comme ce mollard qui ne résiste pas au vent, la vérité c'est imposée à moi quand le médecin et venu, quand il a tester mes réflexes photo-moteurs avec cette fichue lampe... Mon réflexe alors ne fut pas de suivre la lampe du regard, mais de la fuir, de détourner complètement la tête comme après un éblouissement... Et pour cause... Je venais de revoir ce camion nous foncer à nouveau dessus. Je crois qu'à ce moment-là, une nouvelle fois, un cri avant franchit mes lèvres jusque là restée closes hormis pour poser ma première question. Mais maintenant, je tremblais, non pas de peur, mais pour tenter de contenir mes sanglots, parce que ça ne pouvais pas être possible et d'une voix tremblante j'avais osé formuler ce que je redoutais et ce que je savais déjà à cause de ces souvenirs de l'accidents qui me revenaient, mais aussi à cause des pleurs de ma mère. « Où est Élia ? »

"Il y a des secondes comme ça, où le silence est bien plus équivoque que tout autre réponse formulée avec des mots."

Il est mort... Voilà ce que ce silence avait imposé à mon esprit. Mon frère était mort dans cet accident et moi, je m'en sortais plutôt pas trop mal... Il était mort et moi, je vivais toujours... Alors que c'était ma faute... C'était moi qui l'avait poussé à sortir, moi qui malgré la punition que père lui avait donné, l'avait fait sortir de sa chambre pour aller à ce match de football qu'il voulait voir... Au final, c'était moi qui était responsable de cela, de sa mort... J'avais tué mon propre frère... Les larmes s'étaient alors mises à couler le long de mes joues, incapable de retenir mes pleurs face à cette nouvelle... J'avais toujours été proche de lui et c'était ça au final qui avait causé ça, qui avait causé sa perte... Mais pour mes parents, il y avait pire que le perdre lui.. Ils auraient pu me perdre aussi.. Sauf que moi, j'étais incapable de raisonner de la sorte... J'aurais préféré mourir ce jour-là plutôt que de continuer à vivre avec ça sur la conscience... Et dans un sens, une partie de moi est morte à cet instant.

"Il y a des moments comme ça, où l'on est forcé de constater que l'on ne correspond plus à l'idéal de nos parents et où on cherche à y retourner ou bien au contraire à s'en éloigne le plus possible."

Parce qu'à partir de cet instant-là, j'ai changé. J'ai toujours été la petite fille sage, celle qui obéissait à tout les désirs de son père, celle qui ramenait des bonnes notes à l'école et qui était gentille avec tout le monde, bien qu'un peu hypocrite, parce qu'on ne peut pas aimer tout le monde. J'ai été pendant vingt ans la petite fille chérie de mon père, et mon frère, lui s'était un peu le rebelle, le rêveur, celui qui faisait de grand projet et n'avait pas peur d'aller contre la volonté de notre père... Mais il est mort... Il est mort par ma faute, parce que j'étais trop sérieuse, parce que même si ce soir-là j'ai été contre la volonté de notre père, j'ai voulu respecter les conditions de sorties habituelles de celui-ci... Parce que je ne voulais pas me faire engueulée plus que nécessaire... Alors il est mort... Mort par ma faute et depuis, je tends à changer, à devenir une autre, pour lui ressembler plus, parce que je refuse qu'il soit mort que ses projets soient tombé à l'eau. Alors j'ai changé de cursus pour prendre ceux que mon frère voulait suivre, j'ai quitter les Quincy parce que c'était la volonté de mon père que j'en sois une mais que ça ne me collait plus... Parce que maintenant, je fuis, je fuis mon père et son autorité, je fuis la réalité, grâce à l'alcool et la drogue. J'ai donc fini de jouer à la petite fille parfaite comme le désirait mon père.

"Et au final, peut importe les instants que l'on vit, on fini toujours par prendre notre destin en main, qu'on le veuille ou non, car suivre un chemin tout tracé n'est pas une vie."