(+ scarlett) we are survivors

J'ai l'impression que ça fait une éternité que j'n'ai pas vu Scarlett. En fait, je crois qu'on ne s'est pas vu depuis la rentrée et.. comme avant la rentrée j'étais en Afrique, ça fait.. vraiment un moment en fait. Mais vous savez comme c'est, avec nos meilleurs amis. On peut ne pas se parler pendant des mois, rien ne change à notre relation. Faut dire que je lui dois un peu la vie à la demoiselle puisqu'elle m'a repêché dans une ruelle de New-York y'a quelques années de ça avec un taux beaucoup trop élevé de drogue dans le sang. J'lui dois beaucoup, en fait. On a tous les deux vécus des trucs pas faciles, disons qu'on est.. deux âmes perdues qui se soutiennent. On s'est donné rendez-vous dans le parc d'Harvard et je suis arrivé un peu en avance histoire de pouvoir réviser tranquille et profiter des derniers rayons de soleil avant l'automne et l'hiver rude qu'on risque d'avoir à Cambridge. Assis sur un banc, dans un coin où on se rencontre souvent, j'attends donc Scarlett, un bouquin sur les différentes méthodes d'accouchements selon les pays dans les mains que j'ai presque terminé de lire. Espérons que Scar arrive avant que je ne le finisse.

Ca fait une éternité, quand elle y pense. Mais le temps est passé trop vite, d'une rapidité entre-coupé de moments d'une lenteur qui vous torture l'âme. Ces moments où Scarlett aurait dû s'épancher sur l'épaule masculine. Sauf qu'elle a préféré maudire le monde entier dans sa chambre, ou le clamer dans des élans alcooliques. Le susurrer dans des bras étrangers. Mais au bout de la route, il y a toujours Jude. Dans son champs de vision, cette silhouette studieuse. Qui se rapproche au fur et à mesure de ses pas discrets. Cette silhouette qu'elle entoure de ses bras, arrivant dans son dos et penchée en avant. Le visage porcelaine se coincant contre son cou bien plus chaud que sa peau à elle. « Je t'ai manqué ? » T'as le droit de dire que t'étais trop occupé à sauver des gens, mon ego s'en remettra. Je t'admire, toi et ton évolution. Moi j'suis même pas foutue de me sauver moi-même. « Oh mon dieu c'est quoi ça ! » Qu'elle se met à couiner quand son regard tombe sur les pages ouvertes du bouquin qu'il est entrain de lire. Okay, aucune femme ne devrait avoir à voir ça, sauf quand elle a plus le choix. « Pourquoi on la torture comme ça ? » Grimace, fermant un œil, l'autre attrapé par la curiosité, lisait le descriptif en dessous de l'image.

Puisque ma vie amoureuse est quasiment inexistante, je ne peux que me rabattre sur mes études. Dans un sens, c'est pas une mauvaise chose parce que j'approche de la fin de mon doctorat et si je veux être pris en spé obstétrique, j'ai intérêt à avoir des notes d'enfer. Je n'ai pas besoin de travailler énormément pour avoir de bonnes notes, c'est quelque chose qui a toujours énervé ma mère car j'ai du coup toujours fais le minimum à l'école. Alors que je suis concentré sur mon bouquin, je sens quelqu'un s'approcher et enrouler ses bras autour de moi. Je ris légèrement, reconnaissant tout de suite Scarlett la bisounours. « Je t'ai manqué ? » Je souris en coin et je relève un peu la tête, disant sur le ton de plaisanterie, « Toi, oui. Tes câlins mielleux, non. »  J'y peux rien si elle est méga tactile et si au début ça me gênait un peu maintenant j'ai l'habitude et c'est tout naturel, mais j'aime quand même lui faire la remarque. Elle finit par se reculer et s'exclamer: « Oh mon dieu c'est quoi ça ! » J'arque un sourcil et je la regarde, sourire aux lèvres, « T'es sûre de vouloir savoir ? »  Bien sur, il faut qu'elle tombe sur la page où on parle de l'extraction du bébé avec la ventouse quand le celui-ci peine à sortir. « Pourquoi on la torture comme ça ? » Je lève les yeux au ciel et je ferme le bouquin, secouant la tête, « J'pense pas que ça soit une bonne idée de t'expliquer ça, ô pauvre âme innocente.  » Je range mon bouquin dans ma sacoche et je me tourne vers elle, « Comment ça va ? » Si on oublie le fait que je viens de souiller ton âme avec mon bouquin.

Allez, laissez-la exprimer sa joie éphémère. Profiter de son élan d'énergie positive. Cette énergie qui manque tant à son cœur depuis quelques temps. Le ménage a été fait autour d'elle, et concrètement, il ne reste plus grand monde. Forcément, si t'élimines tous les décevants de ton entourage, tu te rendras vite compte que tes bras ne peuvent plus entourer beaucoup de gens. Y a Jude, toujours. J'dirais pas qu'il pourrait faire toutes les conneries du monde et s'en sortir indemne selon les yeux verts, mais on est pas loin. « Toi, oui. Tes câlins mielleux, non. »  Serre son étreinte d'un coup sec, pour lui couper le souffle. « Mes câlins mielleux t'emmerdent, tu sauras. » J'suis une barbie vulgaire. On oubliera pas qu'Alex est mon grand frère, quand même. « T'es sûre de vouloir savoir ? J'pense pas que ça soit une bonne idée de t'expliquer ça, ô pauvre âme innocente.  » Secoue la tête de gauche à droite rapidement, comme une enfant qui ne veut pas être traumatisée. Même si c'est déjà un peu fait, avec ses images horribles là. Quelle idée de faire médecine aussi. C'est pas pour rien qu'on est recouvert de peau, on est pas censé voir là dessous. S'appuie sur le dossier du banc et monte sur celui-ci, redescendant lourdement de l'autre côté pour s’asseoir à côté du mather. « Comment ça va ? » Gonfle ses joues, puis souffle l'air. Comment dire ? « J'me suis envoyée en l'air avec le premier con qui passait. » Ouais, on peut dire ça. « Et ma meilleure amie est une connasse. » Tourne ses billes vers lui, esquissant un bref et ironique large sourire. « J'aime.ma.vie. » C'est le cas de le dire, ouais. « Et toi ? T'as mieux ? » On a qu'à faire un concours de VDM.