Look at that little girl Հ LYKAS

Look at that little girl.

‘Tu n’as qu’à… l’emmener au parc ou bien au zoo, les enfants, mêmes en bas âge, ils aiment bien ce genre de chose tu sais.’ J’avais éclaté de rire sur le coup. J’étais très loin, oh oui super loin de m’imaginer en père célibataire promenant son bébé au milieu des autres gosses et des nourrices dans un parc, il en était hors de question. Les paroles de Leevy étaient pourtant sages et je savais que je pouvais lui faire confiance, seulement ce nouveau rôle n’était pas encore tout à fait pour moi. Fallait avouer que je n’étais pas prêt à élever un gosse, un bébé ou ne serait-ce qu’un chien, j’étais égoïste, imbu de ma personne et bien trop fêtard pour ça, mais laisser mon gosse à un couple dont j’ignorais tout, hors de question. Mes recherches durant l’été avaient donc été fructueuses et il faut dire qu’à par Leevy et désormais Briony, personne n’était au courant que j’essayais de jouer les papas modèles. Pourquoi ? Ça toucherait le cœur de ma réputation, ça mettrait fin à ma superbe carrière, je n'en sais rien, je n’avais pas envie que ça se sache, c’est tout ! Aujourd’hui il ne faisait pas trop moche, la pluie n’était pas de la partie, le soleil non plus il faut dire. J’avais donc envisagé d’emmener Hailee au zoo. Fixé sur mon porte-bébé parce que, comme un papa newbie, je n’avais pas encore acheté de poussette, je me dirigeais vers le zoo en baissant la tête, réflexe. Une fois arrivé au lieu, entouré d’enfants et d’animaux, je soufflais longuement, à mon avis aucun étudiant n’allait se pointer à cette heure-ci dans un endroit pareil. Je baissais alors le regard sur ma fille qui admirait visiblement un lion. J’avais inconsciemment le sourire aux lèvres même si l’appeler ainsi était comment dire… étrange ?

Voilà quasiment un an que je n’avais pas revu ma fille. En décembre, ça ferait 365 jours que je n’avais pas eu la chance de poser mon regard sur elle, la serrer dans mes bras et me comporter normalement comme une mère. Je l’avais abandonné, et bien sur que j’y pensais à chaque heure, chaque minute et chaque seconde qui s’écoulaient. Je regrettais ce que j’avais fais, mais malheureusement je ne pouvais plus faire marche arrière, et j’étais beaucoup trop indisciplinée pour prendre soin d’un enfant. Je n’arrivais même pas à m’occuper de moi-même, alors d’un petit être vivant ? Comment pourrais-je ? J’avais décidé aujourd’hui de faire une petite balade au zoo, non seulement parce que j’avais besoin d’air, mais également parce que je m’intéressais réellement aux animaux. Arrivant sur les lieux, je laissais mon regard vagabonder autour de moi, mordant ma lèvre inférieure, observant curieusement la populace présente et les animaux qui continuaient de vivre leur vie dans leurs enclos. C’est à ce moment précis que mon cœur ne fit qu’un bond, que mon regard se stoppa net et que ma respiration se faisait de plus en plus difficile. Serrant les lèvres, je m’avançais vers Loukas que j’avais reconnu, et ma fille que j’avais également reconnu. On oublie pas le visage de son enfant. C’est ce que disait ma mère. Restant un moment interdite face à eux, je baissais mon regard vers la petite fille avec une extrême douceur, et redressait mon regard vers Loukas, lui lançant des éclairs. « C’est une blague pas vrai ? Une sacré belle vanne à chier que t’es entrain de me faire, rassure moi. » J’étais furieuse, mais en même temps soulagé. Je détestais ce genre de sensation contradictoire.

Look at that little girl.

On va dire que ma vie venait de changer du tout au tout. Je me revoyais le soir du bal, me décomposant sur la piste alors que je remarquais que quelque chose manquait sur le physique de Lyson. J’avoue que j’avais foiré mes calculs mais en prison j’avais comment dire… perdue légèrement la notion du temps, j’avais autre chose à penser quoi. Qu’est-ce qui m’avait pris de me mettre à la poursuite de ma gamine ? Moi en père, quelle drôle d’idée, et encore drôle ne serait pas vraiment le terme adapté. J’avais mis cette Terre en dessus dessous pour retrouver le couple qui l’avait adopté et à l’aide de mon armée d’avocats, j’avais pu leur arracher la petite, sans réfléchir aux conséquences, il est vrai. C’était mon sang, ma chair et même si je n’étais pas vraiment très famille, c’était ma descendance bordel, mais d’un autre côté, moi avec une gosse . Je ne savais que me gérer, moi et uniquement moi et mes conneries. J’étais en totale contradiction depuis que je l’avais récupéré, voilà certainement pourquoi je n’hésitais pas à demander de l’aide à Leevy ou Briony entre autres. Une petite visite au zoo allait nous détendre. ‘Elle manque d’une présence maternelle.’ Tu parles, quelle connerie. Sursaut, me voilà en face de Lyson que je n’avais pas vue depuis le bal. Automatiquement, une main venait se poser sur la tête de la petite qui bougeait dans son espèce de harnais attaché à ma poitrine. « J’aurais pu te dire la même chose le soir du bal, tu t’en rends compte ? » A vrai dire je lui avais dit… enfin pour tout dire j’étais tellement saoul que je ne m’en souvenais plus. « Qu'est-ce que tu veux ? »

Comment devait réagir une femme, une mère face au père de son enfant ? Nous n’étions pas en bons termes avec Loukas, et j’étais même persuadé que les choses allaient continuer à mal tourner suite à cet événement. Est-ce qu’il avait fait exprès de faire ça ? Quelles raisons avait-il de retrouver notre fille ? J’avais toujours estimé qu’il n’avait pas la fibre paternelle, encore plus lorsqu’il avait disparu dans la nature pendant de longs mois sans que je ne sache où il se trouvait. J’observais en biais ce bébé qui était née en décembre, une magnifique petite chevelure blonde, elle était radieuse. Déglutissant difficilement, je redressais mon regard vers un homme qui n’avait aucun mérite selon moi. « De quel droit tu te rends chez un couple et leur arrache leur bébé ? Tu n’as pas le droit de faire ça. Et ne me sort pas de grands discours sur le fait que c’est toi qui a conçu ce bébé. Ne me fait pas rire, tu n’étais pas là les trois quart de la grossesse et soudainement tu te découvres la fibre paternelle ? C’est tellement pathétique comme agissement Loukas. » Je l’observais dans les yeux, ne cillant pas une seule seconde face à lui.