(MISHANNA) You make it look like it's magic.

« Allez casse-toi et fait pas chier du con, j’vais pas aller foutre la merde t’inquiète, j’ai pas le temps-là, j’ai vraiment envie d’aller heu… Chier, ouais voilà, j’ai envie d’aller chier, alors laisse-moi rentrer merde. » J’vous jure que ce mec-là, c’est de loin le gars le plus souriant au monde, et encore moins celui avec le plus de conversation au monde. C’est Niko, un espèce d’homme de main, garde du corps, mec à tout faire quoi, que mon père m’avait envoyé pour la rentrée, le mec qui va me servir quand j’ai pas envie de me salir les mains, vous voyez un peu le truc ? Depuis la prise d’otage, disons que mon père avait surement réalisé qu’il ne lui restait plus qu’un fils, et que peut-être, le perdre serait pour lui un autre coup dur, et qu’il s’en remettrait surement pas, j’sais pas trop. Du coup, il pense que si Niko est avec moi, il ne peut rien m’arriver, car même une balle de sniper tiré à je ne sais combien de mètre, il paraitrait que Niko est entrainé pour les entendre et placer sa tête de russe bien cabossé devant la mienne pour se la prendre. Mais bon, pour moi, c’est plus un boulet qu’autre chose. C’est limite s’il me laisse aller pisser à Harvard, comme si mon père l’avait payé pour qu’il me torche le cul, on sait jamais, p’tête qu’une bombe a été placé sous la cuvette et qu’en m’asseyant dessus, j’vais la déclenché. Un russe, c’est un peu parano par moment, j’vous assure, ça doit être dans les gênes, les complots et tout ça, c’est quelque chose qui leur ai monté à la tête les pauvres. Du coup, je feinte l’envie d’avoir envie de chier et de rentrer chez moi pour qu’il me laisse tranquille. Et, même si au début c’est dur, il termine par me laisser, me raccompagnant tout de même jusqu’à chez moi, car ouais, monsieur fait aussi office de chauffeur, j’crois que c’est l’un des seuls trucs que j’apprécie, me faire balader, c’est plutôt plaisant vous savez. Bref, une fois chez moi, je lui fais un signe et lui demande de rentrer chez lui, ou à l’hôtel, ou à l’endroit où il dort, j’sais pas trop où il squatte moi, c’est pas mon problème, et, je finis par pouvoir enfin pousser la porte du bâtiment. Enfin libéré. Toute la journée, mon portable avait été éteint. Depuis que mon frère est mort, j’avais pris l’habitude de l’éteindre et de le rallumer que tard le soir, avant de me coucher. Ce n’est pas que je n’aimais pas fêter mon anniversaire, mais, j’étais arrivé à Harvard en septembre, personne ici ne connaissait pas date d’anniversaire, et je ne l’avais jamais dites, pour éviter de devoir remercier les gens, les remercier quand ils me disent que j’ai pris une année de plus, que je continue de vivre. Du moins, c’était la façon de penser que j’avais avant, maintenant, ça avait changé, j’voulais continuer de vivre, pendant des années, de très longues années, j’voulais construire quelque chose, devenir quelqu’un, avoir des enfants, même un clébard ou une merde du genre si ça peut faire plaisir à Oksanna, mais, par habitude, j’avais laissé mon portable éteint. Arrivé devant la porte, j’me rendis compte qu’elle n’était pas fermé à clef, devait surement y avoir Oksanna, j’ui avais passé les clefs en revenant du Summer Camp, pour qu’elle puisse y venir quand elle en avait envie. Alors, j’pousse la porte et là, y’a un truc étrange, j’sens une odeur bizarre… Pas désagréable, loin de là, mais pas une odeur à laquelle je suis habitué. Du coup, j’enlève mes chaussures et je dis rien, j’sens l’embrouille là ou un truc du genre, c’est pas normal tout ça. J’avance, j’avance, et là, j’vois que la lumière est éteinte, mais que des bougies disposés un peu partout dans l’appartement, éclairant les pièces. Merde, il se passe quoi ? Et là, j’vois Oksanna, qui a limite l’air en stress, j’vois aussi des ballons accrochés aux murs, et j’peux pas m’empêcher de lâcher un petit rire. Mais, j’vois qu’Oksanna, elle dans sa belle robe, on dirait une princesse en fait, elle est magnifique. Du coup, j’reste là, complètement choqué par tout ça, debout, sans bouger. « C’est toi qui a fait tout ça ? » Elle a pas oublié mon anniversaire alors, et, même si j’suis un mec qui ne fait pas son anniversaire habituellement, pour le coup, cette petite surprise me fait plaisir, vraiment. « Fait un tour sur toi-même s’teuplait, j’veux voir un truc… » J’voulais voir sa robe, j’voulais savoir ce qui lui avait pris de faire tout ça, parceque putain, pour le coup, j’étais choqué. J’étais vraiment pas prêt à ça. •

• J'ai pas beaucoup de chose à dire vous savez si je devais parler de moi, j'ai pas la vie la plus passionnante comme celle que l’on voit dans tous ces grands films qui nous font rêver depuis notre plus jeune âge, j'ai plutôt même la vie la plus merdique qu'il puisse exister je pense. A certains moments de ma vie, j'me suis demandé pourquoi je n'étais pas mort ce jour-là, pourquoi ma vie ne c'était pas arrêté, tout aurait été beaucoup plus simple pour moi vous savez, tout aurait été plus beau, pas de cauchemars qui me réveil en pleine nuit, pas de problème de souffle à certains moments, j'serais... Au Paradis. Sauf que ces pensées partent assez rapidement, j'me dis que j'ai de la chance, trois fois j'suis passé à côté de la mort, et, à chaque fois j'ai failli y rester, j'vais pas faire l'égoïste, j'ai la chance de continuer de vivre grâce à mon frère, alors putain, c’est pas aujourd’hui que j’vais crever, c’est pas aujourd’hui que j’vais me retrouver sur une table d’opération. Parceque bordel, j’ai enfin trouvé un but, depuis quelques temps, je suis une nouvelle personne, je vais de l’avant, je ne vis plus que pour la haine et l’espoir de casser des gueules à chaque fois que l’aiguille de l’horloge de l’église tombe sur le douze. J’voulais avancer, et enfin vivre une vrai vie, une vie ou j’étais amoureux, une vie où je voulais rendre heureuse celle qui me rendait heureux. Je sais, c’est vachement bizarre que ça soit moi qui réagisse comme ça, mais, putain, c’est le cas, alors le premier qui vient me casser les couilles où qui essaie d’empêcher ce bonheur de continuer d’exister, c’est moi, qui l’empêchera d’exister… J’pense que toutes ces merdes auxquels j’ai dû faire face étaient des sortes d’épreuves, pour voir si j’étais réellement capable d’être quelqu’un, de devenir quelqu’un, pour voir si je n’étais pas une de ces petites merdes à abandonner au premier coup dur. Sauf que ce n’était pas moi, je n’avais plus envie d’abandonner, j’avais envie de me battre, de montrer au monde entier que j’étais prêt à répondre à toutes les questions, toutes les épreuves qu’on m’enverrait. Mais surtout, j’étais amoureux, et j’pense que c’était la plus belle chose qui pouvait m’arriver, surtout quand la personne c’est Oksanna. Jamais je ne m’étais dit qu’un jour, on se retrouverait, et qu’un jour, on vivrait la vie qu’ont avaient envie de vivre, la vie ou je n’étais pas le mec de trop, et elle la fille qui fait tout pour me rendre jaloux. Mais ont avaient bien changé, désormais ont ne passaient plus par je ne sais quel chemin pour essayer de se faire comprendre les choses. J’étais pas quelqu’un qui aimait fêter son anniversaire, mais là, je ne pouvais pas refuser, je ne pouvais pas partir, claquer la porte et revenir le lendemain, j’en avais pas envie, même si j’aimais pas, j’voulais faire un effort, parcequ’elle avait organisé un truc de fou pour moi, et que je n’avais aucune envie de gâcher ça, que j’voulais profiter de cette soirée qu’Oksanna m’avait prévu. J’lâche un petit rire quand elle cri un « surprise » et j’hoche la tête de haut en bas quand elle me dit qu’elle a tout fait toute seule. Eh bien, j’suis plutôt surpris, car au final, je ne m’y attendais pas du tout. Mais, le truc qui attire le plus mon regard, c’est sa robe, elle est magnifique dedans, on dirait une princesse, et, j’ai envie de la voir faire un tour. Elle s’exécute et c’est limite si ma mâchoire ne se décroche pas. « T’es magnifique… On dirait… J’sais pas, mais j’ai jamais vu quelqu’un d’aussi bien habillé et d’aussi belle que toi… » Et le chanceux qui l’avait, c’était moi. Elle finit par venir vers moi et là, j’la pris dans mes bras, appréciant le contact de ces lèvres contre ma joue. « Merci… J’m’y attendais vraiment pas en plus. » Avais-je répondu avant de venir saisir son visage entre mes mains et de lui voler plusieurs baisés. J’suis surpris, j’suis content, j’ai l’impression d’être dans un rêve, parceque même si je n’aime pas fêter mon anniversaire, cette fois ci, j’en ai envie, d’un coup d’éponge, elle a effacé toutes ces peurs de vieillir et ces anniversaires gâchés que j’avais pu connaitre. Elle est forte, Oksanna. •

• « Bim » Un bruit de fracas se fait entendre dans toute la maison. Je ne comprends pas vraiment ce que ça peut-être sur le coup. Alors j’enfile un jean et je descends voir. J’pige pas, y’a de la fumée partout, comme si une guerre avait éclaté chez moi, j’entends des cris, j’entends des insultes, des « à terre ». J’ose pas descendre, j’suis pas fait pour comprendre quelque chose que je ne vois pas, j’suis pas assez fort pour ça, et, quand la fumée se dissipe, je vois une dizaine de flics autour de mon père, il lâche son arme, il ne se défend plus. Plaqué au sol violement, il est relevé pour être emmené par ces individus. Je ne sais pas ce qu’ils veulent, ils ne se préoccupent pas de moi, ils ne sont pas là pour moi, ils s’en branlent de ma gueule, ils voulaient mon père, c’est tout. Sur le coup, je ne comprenais rien, qu’est-ce qu’un gosse de même pas cinq ans peut comprendre à ça ? J’avais peur, car j’avais l’impression que mon monde s’écroulait sous mes pieds, mon frère était je ne sais où, et ma mère gueulait dans toute la maison. J’ai plus tard appris que mon père avait été accusé à tort, de quoi ? J’ai jamais vraiment cherché à comprendre, j’ai entendu tellement d’histoires au cours de ma jeunesse que je n’ai jamais su démêler le vrai du faux. Tout ce que je sais, c’est que mon père bosse dans la politique en Russie, et, j’pense que mon dernier mot veut tout dire… Russie… C’est pas le pays le plus clean en matière de politicien. Après, j’me dis que mon père aurait vraiment merdé, jamais il n’en serait là où il est aujourd’hui, jamais il aurait pu continuer d’exercer. Mais, si j’vous raconte, ça, c’est que ce jour-là, ma famille avait décidé de faire quelque chose d’autres que de laisser les flics débarquer chez moi, et puis, de toute façon, qui peut prévoir ça ? Ce jour-là, toute ma famille devait se réunir dans les heures qui ont précédé l’arrestation assez musclé de mon père. Ce jour, c’était pas un jour ordinaire, c’était loin d’être un jour comme les autres à mes yeux, car, ce putain de jour, c’était mon anniversaire. J’devais pas avoir à faire face à ça, même si j’ai rien compris, que j’étais un putain de spectateur ne comprenant rien à cette pièce qui se déroulait devant ces yeux, et surtout, même si le lendemain, une fois mon père rentré, on a refait mon anniversaire. Mais, vous voyez, j’ai jamais vraiment aimé les anniversaires, bien sûr, j’dis pas que tous mes anniversaires sont parti en couille, mais, plus j’ai grandi, et plus j’ai préféré ne pas les souhaiter. A quoi ça sert de fêter une année de plus ? Pourquoi fêter le fait de vieillir, de se rapprocher de la mort ? Vu comme ça, c’est vachement flippant comme fête, tu te réjouis d’avoir pris un an et d’avoir une année de moins à vivre. L’être humain m’étonnera toujours. Et, Oksanna fait partie de ces personnes qui réussissent à m’étonner et à me faire aimer quelque chose que je n’apprécie pas forcément. « Abuse pas… On dirait vraiment une princesse en fait ! » J’en revenais pas, j’arrivais pas à me dire qu’elle avait fait tout ça pour moi, qu’elle avait organisé et préparer tout ce que je voyais ici, pour moi. J’avais envie de rire, vous savez, quand vous rigolez tout seul juste parceque vous êtes heureux ? Bah, c’était un peu ça moi. Elle finit par me demander de la suivre, et, j’peux pas m’empêcher de regarder partout. Elle a vraiment mis des bougies et tout ça, j’vous jure, c’est pas mon appartement. Le pire dans tout ça, c’est que ça sent bon, alors que j’suis pas un fan des bougies, j’ai toujours eu peur d’en faire tomber une et de finir cramer. « Attends… T’as mis combien de temps pour préparer tout ça ? Genre t’as vraiment tout fait ? » Oksanna qui cuisine, j’étais loin d’être habitué à ça, j’étais loin d’être habitué à ce que l’on organise des trucs comme ça juste pour moi. Et, assis sur cette chaise comme elle m’avait demandé de le faire, j’plongea mon regard dans le sien. Putain, elle m’avait vraiment refait toute ma soirée, ça ne pouvait qu’être parfait, surtout quand on connait son côté perfectionniste. •