La vérité est difficile à décrire + Lazaridis

Grande nouvelle ☼ Les soeurs
Bizut des Winthrop, comment vous dire que j’ai le droit à de sacrés défis pour passer le bizutage avec brio. Ces gars là, n’ont aucun respect ni once de bonté pour vous. Vous voulez intégrer la confrérie ? Vous devez le montrer ! Pas le choix ! Et quoi de mieux que de m’obliger à faire mon coming out … Oui oui vous avez bien compris. Et en plus, pas aux amis, mais à la famille. Bordel. Comment je vais faire moi ? Je stress étrangement. Faisant les cent pas dans le salon de la villa, pour la grande nouvelle j’ai invité mes sœurs à venir chez moi … De quoi alimenter le suspens et me laisser l’occasion de préparer un peu mon discours. Pour le coup, Matthew, je te déteste, tu sais. Les deux Lazaridis arrivent en même temps et le jumeau peu après, je les installe tous les trois sur le canapé du salon, leur sert un grand verre d’eau chacun … Ils risquent d’en avoir besoin. « Merci d’être venus. »  L’ambiance tendue se fait ressentir, mon stress surtout me prend au trippes et je peaufine encore les derniers détails au dernier moment avant de me lancer dans la révélation. Je frappe dans mes moments et me pose comme un pic devant mes trois interlocuteurs qui ont l’air impatients de savoir ce que je dois leur annoncé. « Vous connaissez  tous Elton John hein ? » Non, c’est nul, alors je continue. « Et Neil Patrick Harris ? Vous savez le mec de la série How I met your mother ? » Non, toujours pas. Comment faire le lien entre les deux. Ah mais oui, je me suis renseigné pour connaitre les références qu’il faut. « Vous savez quoi ? Laissez tomber, je vais vous montrer ! » Ouais, pour le coup, j’ai fais fort, je l’avoue. Je vais dans la cuisine et demande au mec de substitution de venir. On répète une nouvelle le déroulement de ce qui doit arriver avant de retourner dans le salon côte à côté. Je me dégoûte déjà sans n’avoir encore rien fait. Je regarde mon frère et mes sœurs la boule au ventre. Je n’en reviens pas de ce que je vais faire. Mon acolyte me regarde, amusé. Ah ben oui, toi ça te plais, pas moi ! Et du coup sans prévenir les invités, il pose sans main sur ma joue et m’embrasse sans me laisser le temps de réagir. C’est le plan. Je dois le laisser faire. J’ai envie de vomir … J’ai envie de boire de la javel pour me désinfecter la bouche. Mais je ne fais rien et tente de rester le plus sérieux possible quand il se défait de moi et que je me tourne vers mes interlocuteurs, bouche bée. « Je vous présente Paul, mon petit ami. » Et bim. « Je sais, ça fait un choc. » J’en reviens que je suis réellement en train de faire ça.

C'est un peu flippant. Hadès nous a tous convoqués en mode réunion de famille attention grosse info qui va tomber. Ce qui m'inquiète, c'est que pour une fois, mon frère a l'air mortellement sérieux, et c'est vraiment pas son genre. Mais si quelqu'un est mort, on le saurait déjà, nan ? Puis c'est pas à mon irresponsable de frère qu'on aurait confié le message. Eros ou Megara, oui, mais certainement pas lui ! Alors mes deux parents sont certainement encore vivants. Mais quoi alors ?!

On est réunis dans le salon et il nous sert des verres d'eau. Bon sang, des verres d'eau, come on, frérot, l'accueil alors ? Et puis vue la tête qu'il tire, j'suis pas sûre que de l'eau me suffise, à moi. Je regrette soudain de ne pas avoir fumé le gros joint bien à l'abri dans mon paquet de clopes avant ce petit meeting. Ça m'aurait sans doute relaxée un peu, parce que là, le problème, c'est pas que j'imagine quinze mille scénarios, c'est justement que je vois rien qui pourrait pousser mon frère chéri à tirer une tête pareille. C'est encore pire que d'imaginer des morts !

En plus, il s'embrouille et finit carrément par se casser de la pièce. Je fronce les sourcils, j'comprends rien à son cinéma. Sérieusement, il nous fait quoi là ? Et puis il revient avec un autre mec. What the fuck ? Merde, là, on avait dit réunion de famille, c'est qui son pote qui se tape l'incruste ? Genre il attendait dans la cuisine, ça pue là, c'était prévu son truc, depuis quand Hadès a besoin du soutien de ses petits copains pour annoncer un truc à la famille ? Bon en même temps, y a pas vraiment d'antécédent. Hadès, il a jamais fait d'annonce en grande pompe comme ça, c'est pas son genre. Alors c'est d'autant plus flippant.

Au moment où je m'apprête à lui crier dessus, l'autre mec se met à lui rouler une pelle. Moi je m'étais déjà levée du canapé pour l'enguirlander et je reste debout, figée, à cligner des yeux comme une débile. Mon frère, le mec le plus macho et viril du monde, pour ne pas dire sexiste par certains côtés, est en train d'embrasser un autre mec. Putain, il est malade, il a chopé une saloperie, je le savais, voilà, on va tous mourir. Quand mon frère reprend la parole, je réalise que je suis bouche ouverte comme une truite sur l'étal du poissonnier.

Et là c'est plus fort que moi, j'explose de rire.

Mais genre, longtemps. Je suis pliée en deux, les mains sur mes côtes, je ris si fort que je sens les larmes couler sur mes joues. J'ai mal aux zygomatiques et après une longue minute à rire sans discontinuer, je parviens à reprendre mon souffle. À moitié. J'suis encore incapable de parler, alors je lui signe plutôt :

- C'est une blague ?

La réplique de l'année  !