Cléa Emy Lancaster - Alexandra Daddario

Le vingt janvier mille neuf cent quatre-vingt-treize. C'était un jour particulièrement ensoleillé pour un mois de janvier à Cambridge, dans le Massachussetts. J'avais décidé de pointer le bout de mon nez. Moi, Cléa Emy, venais de naitre et découvrais enfin le monde réel. Cependant, je ne fus pas la seule à faire mon entrée dans le monde des grands. Le même jour, à quelques minutes d'intervalle, ma sœur, ma jumelle, mon double, Adaline, fit son apparition aussi. Nos premières années sur Terre furent bercées par des nounous et des tonnes de cadeaux qu'offraient nos parents, dans le but de compenser les absences et nos longues journées sans eux.

L'année de mes trois ans, je fis un bond en avant dans l'univers, et découvrais enfin l'école. L'endroit que de nombreux enfants détestent, mais que finalement, j'aimais bien. J'avais des copains avec qui m'amuser en plus de ma sœur et ça me permettait d'apprendre des nouvelles choses.

Plus je grandissais, plus j'aimais apprendre. Je touchais un peu à tout, essayant différents sports, différents instruments de musique. Mais mes parents n'étaient toujours pas là. Je grandissais, continuant toujours mon petit bout de chemin avec ma sœur, mes amis, mes parents qui essayaient d'être là au maximum, mais qui au final se contentaient de nous offrir tout ce que nous désirions. Je m'impliquais dans des associations, sportives ou caritatives, j'aimais ça. J'essayais d'attirer l'attention de mes parents, mais rien n'y faisait.

Seize ans. L'âge con, celui où l'on essaye plein de choses, premières sorties, premiers copains, premières bêtises. Je me détachais du monde, j'essayais un peu tout, me faisais des copains un peu moins fréquentables, mais dans l'instant, ils étaient cools. Ils me faisaient oublier mes parents, leurs absences à répétition, le manque et le mal dans mon cœur que c'était. J'étais devenue une loque. Fumant un peu tout, sortant tous les soirs. Mais personne ne réagissait. J'étais entourée et pourtant tellement seule.
Puis il y eu le jour. Quelques semaines avant mon dix-huitième anniversaire. Celui du black-out. Le jour de trop. La sortie de trop. Le rail de trop. C'est dans l'hôpital où je suis née que j'ai finalement ré-ouvert les yeux prenant conscience que j'avais été trop loin, trop longtemps, trop fort. De l'élève modèle j'étais devenue une élève moyenne, pas mauvaise, mais pouvant faire beaucoup mieux. Il était encore temps de changer. De revenir en arrière.
Quand ils me laissèrent sortir après un sermon sur les drogues et les dangers, je pris la décision qu'il était temps d'arrêter mes bêtises, que je devais me ressaisir et que mes parents ne réagiraient pas plus si je me comportais bêtement. Je devais me rapprocher d'eux.

Alors j'ai repris ma vie en main, me suis plongée dans les études, visant le métier de journaliste, et mettant tout en place pour y arriver. Je suis redevenue une fille normale, une étudiante studieuse, qui profite pleinement de la vie et assume ses erreurs du passé.

Cela faisait des mois que ma vie avait reprit un cours normal, ma sœur m'annonça qu'elle était enceinte. J'allais devenir tata, et marraine par la même occasion. C'était l'un des plus beaux jours de ma vie. Adaline semblait toute aussi heureuse que moi, même si son copain avait décidé de fuir ses responsabilités devant l'annonce et l'avant abandonné. J'étais présente pour elle, l'accompagnant dans chacune des étapes de sa grossesse, veillant sur elle est sur ma future petite nièce. Après neuf longs mois d'attente, un certain douze décembre deux mille quatorze, la petite Emmy montra enfin son joli visage. Ma sœur était radieuse, j'étais heureuse pour elle. Tout semblait parfait.

« Mademoiselle Lancaster ? » Cette voix inconnue au bout du fil semblait triste et pourtant tellement nette. Les phrases qui suivirent ne furent pas très claires dans mes oreilles. J'étais juste capable d'en retenir Adaline... accident... petite... grave... Elle n'avait que six mois et pourtant, la vie avait décidé qu'elle avait déjà assez vécu. N'ayant pas réfléchis plus de trois secondes, j'accourais vers l'hôpital que m'avais indiqué l'homme au téléphone. Je découvris alors ma sœur, allongé, dans cette pièce blanche, reliée à des machines. Ce fut la pire image de ma vie.

Après des mois de convalescence, à aider et veiller sur Adaline, elle réintégra finalement l'université tentant tant bien que mal d'oublier cet accident. De mon côté, je continuais à la soutenir et à être le plus présente possible.