JARED M. WENTWORTH ► Harry Lloyd

Des landes rocailleuses et habitées d’émeraude, il ne garde que peu de souvenirs. L’enfance, les rires spontanés, les excursions improvisées à la recherche de trésors oubliés, des promesses secrètement livrées et des serments de bois et d’acier. La liberté toujours, précieuse vertu qu’il défend toujours de ses mains effrontées. Jared a nourri l’illusion tenace que ce temps ne cesserait jamais et pourtant il lui semble désormais appartenir à une autre histoire. La simplicité des lieux n’entachait en rien la splendeur de l’endroit, le confort du quotidien. Son père, un riche entrepreneur d’écosse les avait mis depuis bien longtemps à l’abri du besoin. Mère s’occupait d’eux tout simplement, envoyant au loin les clichés des familles riches mais peu sentimentales. Il n’a manqué de rien. Jusqu’à ses huit ans. Deux années après sa naissance ont vu arriver sa petite sœur, celle qui chérit encore aujourd’hui bien que la vie a mis la distance entre eux deux. Tout semblait bien parti, une jeunesse dorée sous un écrin abrupte de nature. Mais c’était sans compter sur le Destin qui lui arracha ses parents. La version officielle défend un accident d’avion alors que Père et Mère se rendaient sur le continent Américain, laissant au bon soin de la Nourrice les enfants innocents. Le Désormais Solitaire apprendra néanmoins en grandissant que son Père ne menait pas toujours commerce honnête et que cet affront lui aura sans doute valu le prix de son souffle.
La colère résonne, gronde mais demeure sourde à ses lèvres. C’est dans le silence que l’Orphelin s’enferme désormais. De cette absence de timbre, seule sa jeune sœur arrive à la délivrer par moments. Mais cela ne durera pas longtemps parce qu’ils se verront bientôt séparés. Les deux Chérubins sont confiés à l’Oncle maternel, résidant sur le sol américain. Celui-là même qui a coûté la vie de son Sang. Jared y trouve le confort nécessaire mais y perd l’affection. Après tout, ils ne se connaissent que peu. Ses cousins et sa sœur lui permettent toutefois de retrouver un semblant de spontanéité. Mais les grandes familles sont vouées à de grandes choses et après ses dix ans, le Garçon rejoindra le rang de prestigieux pensionnats.
Le Solitaire lie peu mais sûrement, tout juste assez pour ne pas être en marge. Sa force d’adaptation est redoutable et il a tôt fait de dissimuler l’accent qui le rattache à ses terres pour appliquer celui de l’Adoptant. Rien ne témoigne de ses origines désormais et peu savent sa véritable histoire. Il ne trouve d’ailleurs pas d’intérêt à la livrer, d’avouer ses failles. De ses secrets, il garde avec obstination parfois la clé. Cela ne l’empêche pas d’être un élève appliqué, rigoureux et parfois presque obsessionnel. Sans qu’il ne sache vraiment pourquoi, il a tôt fait de nourrir une véritable passion à l’égard des sciences et notamment de la biologie humaine. Plus précisément le cerveau par lequel il reste fasciné. Cet organe Maître qui contrôle chaque corps que vous pouvez croiser. Toujours major de sa classe, il décide de se dédier à la Médecine et plus précisément à la Neurologie. Les Evénements l’ont éloigné de sa jeune sœur mais il garde toujours avec elle une certaine forme de contact, que ce soit par lettre ou bien par téléphone. Bien entendu, les vacances lui permettent de retrouver un semblant de cocon familial.
Les années ont savamment élaboré cette carapace d’acier autour de son être, laissant la majeure partie cette organe noble commander, le cerveau. Mais si l’Obstiné se défend si savamment de son intellect c’est pour mieux préserver la nature tendre et délicate qui l’habite véritablement. Celle de cet enfant écorché, arraché aux siens et à la terre qui l’a porté. C’est naturellement que le désormais jeune diplômé postule pour les grandes universités. Et celle qui l’a accepté est logiquement celle qu’il convoitait le plus. Harvard. Il y réside depuis désormais trois années et entre bientôt en quatrième. Depuis quelques années, sa jeune sœur y réside également pour son plus grand plaisir ainsi que ses cousins. Peut-être que le temps permettra à un certain nombre de l’apprivoiser, mais il ne s’appliquera quasiment jamais à effectuer le premier pas. Ses secrets ne sont livrés qu’aux plus téméraires et constants, le jeune homme s’appliquant autrement à la rigueur de ses études et à une sociabilité communément acceptable.