(+Bleeker) OH FUCK.

OH. FUCK.
Ils venaient d’arriver en Arizona. Le Summer Camp avait enfin commencé, et Norah n’avait plus à errer dans les rue de Cambridge sans rien faire, en attendant impatiemment le soir pour avoir enfin quelque chose à faire. Son travail au Lord Hobo était loin d’être passionnant, mais c’était une parfaite distraction pour elle. A courir d’un client à l’autre, elle n’avait plus le temps de penser à ces neuf derniers mois qu’elle avait passé en France, à cette tombe qu’elle visitait régulièrement, malgré elle. Elle n’avait pas réussi à s’en empêcher, c’était plus fort qu’elle. A chaque fois, elle s’était dit que c’était la dernière, qu’elle ne reviendrait plus. Elle tenait deux ou trois jours, et puis elle craquait. Ses pieds l’y conduisaient sans qu’elle ne puisse dire quoique ce soit. Et depuis qu’elle avait quitté sa terre natale, elle avait essayé de ne plus y penser, mais c’était plus dur que ce qu’elle n’avait imaginé. Enfin, maintenant, cela devrait mieux se passer. Elle était au Summer Camp, elle allait pouvoir sortir, voir des nouvelles têtes, repartir à zéro. Recommencer à neuf. Elle arriva sur le terrain de camping, posa ses affaires, et commença à monter sa tente. Cela faisait une éternité qu’elle n’avait pas été camper. Son père ne l’avait plus emmenée depuis qu’ils avaient quitté la France. Mais monter une tente, c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas. En deux temps trois mouvements, la tente était montée. Elle allait mettre son sac à l’intérieur quand une tête sortie de la tente voisine. La jeune française réprima un cri de surprise mais ne put empêcher un sursaut. En voulant reculer, elle se prit les pieds dans les fils de la tente et se retrouva par terre. Elle était blanche comme un linge, comme si elle venait de voir un fantôme. Et pour cause, celui qu’elle avait réussi à éviter pendant un mois complet sur le campus, le sosie de l’homme qui dormait maintenant sous une pierre tombale, Bleeker, n’était autre que son voisin de tente. Elle lâcha un rire nerveux, passant une main sur son visage. « C’est une blague… » se dit-elle plus à elle-même qu’à la tête sortant de la tente. Cela promettait pour la suite des vacances…
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coucou c'est moi

Je sais pas si vous vous êtes un jour retrouvés en colocation en trois mecs, mais franchement, c’était coooooooool. Il y avait une bonne ambiance et malgré ce qu’on pourrait imaginer, la tente ne se transformait en garçonnière. C’était propre, une petite odeur de lavande parfumait continuellement la pièce commune et Bleeker se sentait bien. Peut-être que le fait que tous ses colocs soient gay/bi (ou ayant une orientation sexuelle pas très définie pour ce qui est de Graham) jouait sur la tenue de la tente ... Noooon, ça faisait trop clichéééé. C’est surtout que Devyn était légèrement névrosé et Nemo était le prince de Monaco ou un truc du style, Cody ne savait pas très bien et se voyait mal lui demander un acte de naissance avec filiation complète pour s’assurer qu’Albert est son frère et Gad Elmaleh son beau-frère. Oui je raconte des conneries, moi et les familles royales font 1 + 1 + 9 + 10 000 000 000 000 000 000 c’est-à-dire un nombre très grand.
Cody se leva dans l’après-midi, quand le soleil était au zénith et transformait le sac de couchage du Lowell en seconde peau tant il transpirait là-dedans. Quoooi, c’est vrai, le tente n’était pas le meilleur logement pour passer des vacances en plein milieu du Grand Canyon. Il ne comprenait pas pourquoi son coloc héritier d’on-ne-sait-plus-où avait choisi ça plutôt qu’un chalet avec une clim. Il faut être taré. Bon, après un petit déjeuner à base de bière et de crackers de la veille, Cody jeta sa serviette sur l’épaule, prêt à faire un petit brin de toilettes aux douches communes. En plus, iI entendait des bruits de sardines métalliques qu’on posait les unes contre les autres et Cody s’impatientait de découvrir s’il avait enfin une voisine sexyyyy, devant laquelle il se pavanerait tous les matins torse nu pour se la péter avec ses muscles invisibles. Oui ouiii, Cody le célibataire était un chaud lapin. Alors, il sortit sa tête de sa tente et ne vit que Norah. Attendez … NORAH ? ça faisait un baaaaaiiiil. Et voilà qu’elle se rétama par terre, rappelant au brunet l’épisode de leur rencontre ; « Ahhhh, tu n’as pas changé ! » lâcha-t-il avec un grand sourire. Ben oui, le passé c’est le passé et il était content que Norah soit là. Il mit un pied dehors, puis l’autre, puis marcha vers la Française, lui tendant une main chaleureuse ; « Un peu d’aide peut-être ? » La pauvre, ses pieds s’étaient transformés en rôti de porc.

Norah la cata

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OH. FUCK.
Fidèle à lui même, il l’accueilli avec un grand sourire, que la jeune femme n’arrivait pas à interpréter. Était-il sincèrement contant de la revoir, ou était-il juste ironique ? Tous les évènements de l’année précédente lui revenaient en mémoire. Leur première rencontre, où elle avait complètement disjonctée sans raison apparente, se ridiculisant au passage. Puis lorsqu’elle l’avait pris pour Siméon alors qu’elle était ivre, et qu’il lui avait fait croire qu’il était mourant. Une balade à dos d’éléphant perdus dans la jungle indienne, où la vérité lui avait sautée aux yeux, son ridicule la frappant de plein fouet une nouvelle fois. Enfin, cette soirée sur la plage, au dernier Summer Camp, où elle avait craqué et s’était jetée sur lui comme une furie. En repensant à tout ça, décidément, elle ne voyait aucune raison valable pour qu’il soit aussi chaleureux et content de la voir. Et pourtant il était là, souriant d’une oreille à l’autre, lui tendant sa main pour l’aider. Elle hésita un instant, les yeux fixés sur cette main tendue, avant de la prendre. Peut-être était-ce une occasion de recommencer à zéro, de tout effacer. Un an s’était écoulé, l’eau avait coulé sous les ponts comme on dit, pourquoi garder les vieilles rancoeurs ? « Merci… » dit-elle d’une voix légèrement incertaine. Elle essaya de cacher son malaise tant bien que mal, mais si sa voix tremblante ne la trahissait pas, ses yeux fuyants n’étaient pas très convaincant. Elle le regarda dans les yeux l’espace de deux secondes, avant de détourner le regard. Il lui ressemblait beaucoup trop pour qu’elle puisse s’attarder plus longtemps sur son visage. Mais elle pouvait toujours tenter de paraître sympathique, tout n’était pas encore perdu… « Tu… dors vraiment dans la tente d’à côté ou… c’était juste pour la nuit ? » Ou presque. Norah et le tact, épisode 14709, et toujours aucune amélioration en vue. Elle se mordit la lèvre inférieure quand elle se rendit compte de sa stupidité, mais bon, quand c’est fait, c’est fait !
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coucou c'est moi

La dernière fois qu’ils s’étaient rencontrés, et bien, c’était au Summer Camp. Sur la plage d’une des mille îles qu’ils avaient visité, en fin d’après-midi / début de soirée. C’était vraiment la seule chose dont Cody se souvenait. Pourtant, il ne s’était pas fait assommé par un bigfoot des montagnes entre temps, ni lobotomiser le cerveau par Nabinabilla, mais c’était sa nature de faire table rase du passé, en particulier avec les personnes contre qui il n’avait aucune raison d’entretenir une rancœur. Leur ’amitié’ (si on peut appeler ça comme ça) affectait davantage Norah que Cody en réalité. Lui, il se contentait de prendre Norah pour une psychopathe sortie de l’asile, à qui on venait juste de retirer la camisole et qu’on aurait perdu dans la campagne pendant un moment d’inattention. Et qui, par un miracle quelconque, aurait réussi à passer les SATs et intégrer Harvard. Juste ça. Cody usa donc de se bienveillance pour aider la Française, elle qui semblait emmêler dans un vrai sac de nœud. Elle le remercia. Trop ému par ces retrouvailles, Cody ne faisait pas gaffe au regard fuyant de la jeune femme à son égard, pas du genre à être perturbé pour trois fois rien. Parce que oui, leurs disputes passées ne comptaient pas pour lui. Alors, elle lui demanda s’il avait réellement cette tente ou s’il ne squattait que pour la nuit. Il tourna machinalement la tête vers son couchage et haussa les épaules ; « Si cette tente est la tienne, alors oui je pense que ça veut dire qu’on est voisin de tente. C’est coooool non ? Comme au bon vieux temps ! » Wesh quand ils vivaient chacun à un bout du couloir à la LH ! Et donc, pris par un engouement certain, il frotta énergiquement ses mains contre les épaules de Norah avec un grand sourire tout heureux.

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OH. FUCK.
Donc, ils étaient bien voisins, elle allait devoir le croiser tous les jours et faire avec. Elle essaya de chasser tous ces évènements passés qui la perturbait et la mettait mal à l’aise. Quitte à le voir tous les jours, autant essayer de tout faire pour que tout se passe bien. Non pas qu’elle voulait devenir son meilleur ami, il ne fallait pas pousser non plus ! Mais s’ils pouvaient au moins s’entendre un minimum, ce serait déjà pas mal. Avec Norah, il fallait y aller pas après pas, doucement, pour ne pas brusquer la bête, à moins d’avoir des envies suicidaires. Ce que Cody semblait avoir à une certaine époque… Mais bon, s’il était près à faire table rase, la française pouvait au moins faire quelques efforts en ce sens. Quoique de là à se faire des câlins, il y avait encore quelques limites qu’elle n’était pas prête à passer ! Son corps entier se crispa lorsqu’il la secoua des épaules, mais dans cette optique de repartir à zéro, elle respira un bon coup et se retint de justesse de le repousser ou même de faire le moindre mouvement. Les contacts physiques, ça n’était vraiment pas sa tasse de thé comme on dit. Elle passa une main dans ses cheveux pour évacuer ses tentions avant d’essayer de trouver une réponse appropriée face à son enthousiasme d’être son voisin de tente, enthousiasme qu’elle ne partageait pas forcément mais qu’elle se garderait bien d’avouer. « C’est… Super ! » articula-t-elle avec un sourire plus que forcé. Avec un peu de chance, il le remarquerait autant que ses regards fuyants. Tout d’un coup, elle eut une idée pour changé de sujet et trouver quelque chose à dire qui ne la concernait ni elle ni lui directement. « Tient, au fait, t’as des nouvelles de Jackie ? Depuis que j’ai fait mon année en France j’ai un peu perdu le contact et… je me demandais comment elle allait, après… tu sais… » Bon, niveau zéro malaise, peut mieux faire, mais c’est tout ce qu’elle avait trouvé qu’ils avaient en commun sans parler de tous les moments douteux qu’ils avaient partagé…
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coucou c'est moi

Cody remarquait que Norah n’était pas non plus au top de la forme, genre ça n’avait pas l’air de l’enthousiasmer beaucoup qu’il soit là mais osef. Le Canadien était assez heureux pour deux, donc ça suffisait, n’est-ce pas ? Donc maintenant, il voulait savoir comment elle allait, ce qu’elle avait de cette absence, si elle revenait à la Lowell House, si elle comptait re travailler au Lord Hobo, si – ivre – elle comptait refaire des déclarations enflammées à Cody … Enfin les questions classiques quoi. Mais au lieu de ça, elle enchaîna sur Jackie. Mmffff. Jackie la lâche, celle qui avait abandonné Cody pour vivre son rêve à Walt Disney. Cody n’aimait pas les gens avec de grands rêves. C’était les premiers à s’en aller pour ne jamais revenir. « Pas vraiment. Je sais qu’elle est allée à Orlando le mois dernier pour visiter le parc Disney. Et depuis elle sort avec Mickey. Enfin le gars dans le personnage de Mickey quoi. Elle a toujours eu des goûts étranges en matière d’hommes. » Il déglutit. La preuve, elle était en kiff sur Cody à un moment, y a pas pire goût. Honnêtement, il trouvait un peu étrange que Norah lui parle de Jackie là, d’un coup, ça lui prenait comme une envie de pisser en fait. « Si tu veux, je lui passe ton numéro de téléphone, vous pourrez reprendre contact. C’est quoi ton numéro ? Ce serait cool que je l’ai, on pourra s’organiser des sorties plus facilement. Quoique maintenant on est voisin de tente. Tu sauras chez qui te glisser la nuit si tu fais des cauchemars. » Et il pouffa de rire, fier de sa connerie.

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OH. FUCK.
Apparemment, le sujet Jackie était un peu sensible pour lui… Mais c’était le moins gênant pour la jeune femme, et mine de rien, elle s’était vite attacher à la brunette un peu folle. Norah était malheureusement partie alors que Jackie traversait une période difficile, et cela l’avait un peu inquiétée, mais elle avait pensé la laisser entre de bonnes mains avec son meilleur ami canadien. Elle s’était donc trompée. Elle réprima un sourire lorsqu’il mentionna qu’elle filait le parfait amour avec Mickey. C’était bien son genre, il fallait toujours qu’elle se mette en couple avec des mecs improbables. Après, tant qu’elle était heureuse, c’était le principal, non ? Cody demanda son numéro à Norah, ce qui la sortie tout de suite de sa rêverie. Elle hésita un moment, se demandant s’il était sérieux ou si c’était encore une de ces conneries, mais il semblait tout ce qu’il y a de plus candide. Enfin, jusqu’à ce qu’il glisse une de ses vieilles blagues scabreuses. Un rire nerveux et désespéré lui échappa. Au fond, c’était toujours le même. Elle passa une main sur son visage plus pour chasser sa gêne qu’autre chose, avant de tendre l’autre vers lui afin qu’il lui passe son téléphone. Elle s’était bien qu’il fallait faire table rase du passé, non ? Alors pourquoi pas. Qui sait, si ça se trouve, ils allaient devenir les meilleurs amis du monde ! Ou pas, mais bref, le principe était là. « Je vois que ton sens de l’humour est toujours aussi douteux ! Mais en effet, je veux bien que tu lui passes mon numéro, j’aimerais bien savoir comment elle va. » Elle entra son numéro dans le portable du canadien, et lui rendit. « Mais ne compte pas trop sur les visites nocturnes, c’est pas vraiment mon genre. Par contre, une bonne soirée feu de camp, pourquoi pas. » Ça lui ferait sûrement du bien de voir du monde et de se sociabiliser un peu, depuis le temps qu’elle se la jouait louve solitaire…
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Son sens de l’humour, douteux ? Aziiii, on parlait de Cody Bleeker quand même lààààà, il n’y avait plus besoin de présenter ses qualités d’humoriste, n’est-ce pas ? Norah rentra toutefois son téléphone dans le portable de Cody qui se chargerait de l’envoyer à Jackie. Ou pas. En fait, ça dépendrait de s’il l’oubliait ou non, parce que tout ce qui rentrait dans l’oreille du président Lowell sortait par l’autre. C’est comme ça. C’est une fatalité. A part les moustiques. En général, s’ils entrent dans une oreille, y a plus qu’à prier tous les saints pour qu’ils s’en sortent vivants, mais la population moustiquaire dans la tête à Cody était un autre sujet de débat qui n’intéressait ni Norah, ni toi, ni moi. « Merci beaucoup. Je lui dirais de te contacter. » C’était sympa que Norah ne l’oublie, malgré le temps qui s’était écoulé et le fait qu’elles ne se connaissaient pas depuis très longtemps finalement. Par contre, elle le recala au sujet des visites nocturnes, ce qui ne surprit pas le brunet qui se contenta de rire bêtement en l’écoutant. « Oh, on en fait souvent des feux de camp dans le camping. Je pense que c’est l’avantage de vivre dans des tentes plutôt qu’en chalet ou en caravane ; on partage un peu tout. D’ailleurs, c’est aussi un problème. Non parce que l’autre nuit, y a un gars dans une tente voisine qui a mal digéré son Chili Con Carne. Et ben j’ai cru que les Américains avaient recommencé leurs essais nucléaires dans le désert. » Mmmh, le charme à la Bleeker perdurait, comme Norah avait la joie et le bonheur de le constater.

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