June Elvy ► Gina Rodriguez

Le six mars était une date magique, car c'était ce jour-là que June, qui avait aujourd'hui vingt-deux ans, était née. Magique, elle l'était, du moins, c'était ce qu'elle pensait. Parce qu'en vérité, elle était loin d'être parfaite. Elle était méchante, orgueilleuse, profiteuse et égoïste. Mais elle était belle, à ça oui, elle était magnifique. Avec ses longs cheveux à la couleur d'un champ de blé en plein été, ces yeux bleus turquoise dans lesquels ont avait envie de plonger et sa bouche fine couleur vermeille, elle ne pouvait que faire penser à un ange. Un ange...
Elle était née un jour de grand soleil, sa mère lui avait tout raconté, en exagérant à peine. " C'était un mardi, le ciel était illuminé pour fêter ton arrivée. Le plus beau jour de toute mon existence. Quand tu es née, tu n'as presque pas pleuré, tu étais déjà un adorable petit ange. Quand ton père a posé le regard sur toi, il était tellement ému, il a même pleuré... Pourtant, ce n'est pas un émotif ton père, tu le sais ! On savait déjà que tu étais la plus belle chose qui nous était arrivée." Si sa mère s'appelait Pinocchio, son nez aurait atteint les sommets de l'Himalaya. Elle se souciait à peine de sa fille, elle cédait à tous ces caprices pour pouvoir éviter de potentielles crises, elle la complimentait tout le temps sans penser un mot de ce qu'elle disait, des choses qui, vous le pensez bien, ne pouvait que faire gonfler d'orgueil sa fille. Quant à son père, il restait toute la journée dans son bureau à passer des coups de fils "importants". Plus importants que sa propre fille. S'ils lui avaient porté un tant soit peu d'attention, peut-être ne serait-elle pas devenue ainsi, mais avec des si, on referait le monde. Plus la petite grandissait, plus elle devenait méchante. À l'école, tout le monde la redoutait, mais grâce à son physique, elle était populaire. Les garçons faisaient tout pour sortir avec elle, et ce n'était pas pour lui déplaire. Elle aimait avoir le monde à ses pieds, elle aimait qu'on la regarde les yeux pleins d'envie, elle aimait attirer l'attention. Elle avait toujours LE vêtement mieux que les autres, la coiffure originale, mais pas trop, le dernier portable hors de prix qui était sorti... Elle avait tout. Tout, sauf de l'amour. Elle s'en rendait bien compte que ses parents s'en fichaient d'elle, alors elle devenait encore plus méchante pour, qui sait, peut-être pouvoir attirer leur attention. Mais en vain. Elle était alors bien malheureuse la petite fille qu'on avait tant gâté. Mais elle ne le montrait, les sentiments, elle ne les montrait jamais, tout garder pour moi, tout garder pour moi, pas un seul faux pas ou tu es foutue, les gens ne te prendront plus jamais au sérieux. Et chaque jour, elle se répétait cette phrase, et chaque jour, elle se sentait un peu plus seule. Elle était toujours restée la même, toujours la petite peste de service, mais à l'intérieur, elle était détruite.

Parfois, elle rêvait en secret de redevenir toute petite minuscule, remplie d'innocence, ignorant tout de la vie, ignorant à quel point la vie était moche. Elle l'avait comprit à l'âge de douze ans, quand elle avait trouvé sa mère avec un autre homme... Elle était entrain de la chercher pour lui dire à quel point elle avait besoin de la paire de chaussures Clarks qu'elle avait vu dans la vitrine en rentrant de l'école, elle hurlait son nom dans toute la maison. Elle était alors entrée sans frapper dans la chambre de ces parents, et c'est là que tout l'espoir d'avoir un jour une famille aimante c'était envolé. Disparu à jamais.