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Let's sing together ♥ [Apple]

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Message envoyé à 15h30. A Apple: « Apple, il faut que je chante. »

Nous étions en plein week-end. Il pleuvait des cordes et des cordes dehors. Le matin même, je me rappelle qu'en me levant, je n'avais eu qu'une seule pensée: danser. Il fallait absolument que j'aille danser. Il fallait absolument que j'aille me défouler. Rester une journée entière dans cette maison si vaste, si grande, si calme, avec la pluie qui battait contre tous les carreaux de toutes les fenêtres, mon père qui dormirait encore jusqu'au milieu de l'après-midi, et moi, seule, devant mes cours universitaires... c'était tout bonnement impossible. Je ne pourrais tout simplement pas tenir comme ça. Enfilant un jogging noir ample, un top blanc et un gros gilet gris à capuche par-dessus, je me préparais à aller dans la petite salle que je louais chaque semaine, située non loin de chez moi. J'attachais mes cheveux en une queue-de-cheval floue et sautais dans la première paire de baskets que j'attrapais. Avant de franchir la porte d'entrée, un sac de sport sur l'épaule, je piochais un des post-it dans la boite et y écrivis deux-trois phrases rapidement pour prévenir mon père si jamais il sortait de son lit avant mon retour, avant midi. Ce qui était fort peu probable, en fait.
Arrivée dans la petite salle, je branchais la chaine stéréo et laissait défiler les musiques une à une, après avoir ôté mon gilet et enfilait un short et un top noir très court, avec lesquels j'étais plus à l'aise pour danser. Il était déjà 10h30. Si je m'échauffais trop longtemps, je ne pourrais pas beaucoup danser. Il fallait que je sois chez moi pour préparer à manger à midi, si je voulais que mon père ne meure pas de faim. Alors tant pis, pas d'échauffement cette fois-ci. Ce n'était pas si grave après tout. Ainsi, je m'élançais au rythme des notes saccadées des mélodies, plus rapide ou plus lente selon la chanson. Je passais de quelques pas de danses latines à quelques figures de street dance avant d'entamer quelques écarts de classiques. Voilà comment j'arrivais à oublier durant un instant que le monde tournait toujours, que les secondes continuaient de s'écouler, qu'il y avait toujours d'autres personnes sur Terre. J'adore danser, tout simplement. Ça remplace le manque qu'a créée la disparition de la scène et de la chanson dans ma vie, en fait. Et ça le remplace bien plus qu'il ne le faut, même s'il m'arrive d'avoir des moments de nostalgie en y repensant.
Soudain, je tombais sur le sol. Quelle est cette expression déjà? Toutes les bonnes choses ont une fin? Tout ce qui est bon finit par s'arrêter un moment ou un autre? Eh bien, c'est exactement ce qui m'arriva à cet instant précis. Je ne pourrais pas le décrire, je ne pourrais pas l'expliquer. Comment, en un quart de seconde, on peut avoir l'impression de voler tellement haut avant de retomber si bas qu'il serait impossible de le décrire? Je me souviens décrypter chacun de mes mouvements dans le miroir qui tapissait le mur, en face de moi. Je me souviens exactement ce que je faisais avant ma chute. Mais comment je tombais, ça, il m'est impossible de le comprendre. Je me retrouvais au sol comme ça, sans aucune raison, sans aucune explication. Instinctivement, je regardais autour de moi afin de vérifier que j'étais seule. Sans m'inquiéter davantage de ma chute, j'entrepris de me relever. Malheureusement, je restais clouée au sol, une douleur me lacérant la jambe gauche, de l'orteil à la hanche. Avant que je ne comprenne ce que j'avais, mon poignet gauche me picota lui aussi. Inquiète, presque paniquée, j'essayais tant bien que mal d'analyser la situation. Je ne pouvais pas me lever. Je n'avais aucun appui à gauche et la chaise dont j'aurais pu me servir pour me redresser était bien trop loin. Il aurait fallu que je me traîne jusque là, et je ne savais pas encore si j'en étais capable. Mon portable, lui, était resté dans la poche de mon jogging, posé sur cette même chaise. Comment se fait-il que durant les cours de secourisme, personne ne nous apprenait comment nous sauver nous-mêmes, en plus de sauver les autres?! Je penserais à suggérer tout ça dès que j'aurais trouvé une solution... Au final, je n'eus pas d'autres moyens que de me glisser, telle une limace en mauvais état, jusqu'à ma cible. Je sortais mon téléphone portable de mon jogging et composais le numéro des urgences, étant soudain bien plus effrayée par la couleur bleue-violacée de ma cheville, de mon genou et de mon poignet, ainsi que d'autres petites parcelles de ma jambe immobile. En attendant les secours, je jetais un oeil vers les cinq fenêtres encastrées dans le mur, à ma gauche. La pluie continuait de frapper les carreaux, le bitume, les voitures, les parapluies, les maisons... Elle ne s'arrêterait surement pas de si tôt.

Couchée dans l'un des lits en fer blanc de l'hôpital, j'écoutais le médecin d'une oreille discrète. Je devais tirer une sacré tête, étant donné le regard emplit de pitié qu'il posait sur moi à chaque fois qu'il levait les yeux de son petit dossier. Fracture du poignet. Jambe cassée. Voilà ce que j'avais retenu de son petit exposé qu'il récitait depuis presque un quart d'heure maintenant, ponctué de « vous verrez, ça ira, ne vous inquiétez pas », « tout se passera bien », « vous vous y habituerez », « ce n'est pas si grave finalement », « ça aurait pu être pire »... Tout ce que je savais, moi, c'était que je ne pourrais plus danser pendant un bon moment. Et c'était bien la seule et unique chose qui me fâchait et m'attristait dans cette histoire.
J'avais appelé mon père dès que mon plâtre avait été fixé. Il n'avait pas besoin de venir. Qu'il reste dans son lit. Et qu'il ne s'inquiète pas pour moi. Après tout, j'étais responsable. Quand j'eus apprivoisé les béquilles, je me préparais à sortir. J'avais eu droit à un sandwich tout droit sortis d'une machine postée à l'entrée de l'hôpital. Maintenant, il fallait que je trouve quelque chose pour me remonter le moral. Quelque chose, mais surtout quelqu'un.


Message envoyé à 15h30. A Apple: « Apple, il faut que je chante. »
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< excuse-moi, j'suis pas calée pour les RPs long comme toi ;_; j'espère que ça te plait quand même... >

Si j’étais fidèle à moi-même, j’aurais postée un article à tous les jours sur mon blog. Ça fait un moment aussi, que je n’avais rien postée sur YouTube. Les abonnés se posent des questions mais je n’ai rien à ne leur dire… rien à leur chanter. C’est la période d’examen pour tout le monde à Harvard et pour moi, c’était l’occasion de me surpasser dans tous les domaines. Enceinte, il me faut les meilleures notes tout de suite si je veux les convaincre de me garder à la rentrée… Dieu seul sait comment je veux revenir l’an prochain ! J’espère ne pas trouver ça trop difficile de me supporter.

Aujourd’hui, nous étions jeudi. Un jeudi simple, un jeudi où je n’avais rien prévu si ce n’était que de rien prévoir. Voilà en quoi se résume ma vie ces derniers temps. On dit que les femmes enceintes sont toujours occupés entre les échographies, les préparatifs pour bien accueillir l’enfant et puis tout ce qui reste qu’une femme fait normalement. Moi ? Calme plat. J’ai révisé toute la soirée d’hier et ça me semblait être une éternité ! Je n’ai jamais vraiment eu besoin d’étudier, pour avoir de bonnes notes… mais là, il ne m’en fallait pas que des bonnes ; mais d’excellentes.

Quinze heure trente. Avant de recevoir son SMS, je ne faisais rien de plus ordinaire qu’être allongée sur mon lit, à écouter mon ipod sur shuffle. Je n’étais même pas habillée, même pas coiffée, encore moins maquillée… Juste, allongée là. J’étais loin de m’imaginer que j’aurais à sortir aujourd’hui mais pourtant c’était le cas. Apple, il faut que je chante. Il faut qu’elle chante. Rejoins-moi à ma chambre , lui ai-je répondu via message texte. Je me redressais d’un bond et enfilais le premier bout de tissu de la pile de vêtements propre qui trainait encore sur mon bureau, puisque j’étais trop lâche pour remplir mon tiroir ; il s’avérait être une simple petite robe courte, fleurit vintage, que j’agençais de chaussures à talon haut rouge. Je me coiffais d’un chignon négligé et pour le maquillage, j’ai toujours été rapide dans ce domaine.

Elle n’était pas encore arrivée. Super. Ça me laissait le temps d’échauffer ma voix et de ne pas avoir l’air d’une casserole tout à l’heure. Clélia était callée en chant et il m’arrivait parfois de l’envier… sur sa voix, sur son ex-carrière, bref, l’envier quoi. Pourtant, mon père est celui qui l’a aidée à percer dans le domaine de la musique. Rien ne m’empêche de lui demander de m’aider ! Je n’ai juste jamais été comme ça. Jamais je ne prendrais le métier de mes parents pour acquis… et puis mon but premier, c’est de devenir une grande styliste. Ma mère tout craché comme dirait mes tantes.

La voilà enfin arrivée. Je me dépêchais à la réceptionner, le sourire radieux, comme à mon habitude. Mais je perdais rapidement ce sourire en voyant ses blessures. Mon dieu, tu vas bien ? Qu'est-ce qui t'es arrivé ?
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C'est génial, c'est même mieux que le mien :O ♥

Je ne me suis jamais rien cassé. Ni une jambe, ni un bras, ni la clavicule, ni même un doigt. Je n'ai jamais eu de plâtre, d'atèle ou de bandage. Pour les petits bobos de cours de récrée, c'était pareil: quasiment jamais. Il faut dire que je n'étais pas très casse-cou. Je n'ai jamais trop aimé le danger, les risques, etc. J'ai toujours préféré m'asseoir dans un coin avec un livre, un carnet ou une poupée, regardant les autres jouer à chat. De plus, dès mon plus jeune âge, je faisais extrêmement attention, je prenais tout avec beaucoup de précautions. C'est d'ailleurs pour ça que je ne me suis jamais blessée en sport. C'était dans ma nature, certes, mais il faut dire que mon éducation y a aussi beaucoup fait. Mes parents, quand ils ont su qu'ils auraient une fille, voulaient une vraie fille. Une fille qui porte des robes et qui aime le rose, une fille qui joue à la poupée, qui lit, qui écrit et qui reste calme, une fille qui est polie, serviable et généreuse, qui aide et qui aime les autres, une fille qui parle bien, qui est coquette et qui fait toujours attention. Ils en voulaient peut-être un peu trop, c'est vrai, mais avec le recul, je vois que ce n'était que du positif, pour moi, mais aussi pour mon entourage.
Tout ça pour dire que j'étais vraiment mal à l'aise avec les béquilles. Je n'avais jamais eu l'occasion de m'entraîner et j'en venais à penser qu'un peu plus de risque lorsque j'étais petite ne m'aurait pas fait beaucoup de mal. Le temps d'attraper un taxi et de me rendre à la chambre d'Apple, j'avais eu de nombreuses occasions de me ridiculiser. C'est dans ce genre de situation que l'on peut bénir celui qui inventa l'ascenseur.
Apple était l'une de mes plus chères amies. En même temps, nous nous connaissions depuis pas mal de temps maintenant. J'avais 12 ans, la première fois que nous nous sommes vues. Encore plus timide que maintenant, je venais de signer avec le label de son père et n'étais absolument pas sûre de moi. Nous avons donc passé beaucoup de temps ensemble. Elle était là, avec moi, tout au long de ma carrière, dans les pires moments, mais aussi les meilleurs. De plus, elle aussi a une attirance pour la chanson, ce qui nous a donc beaucoup rapprochées dans certains moments.
Lorsque son visage, peint d'un sourire que je connaissais si bien, apparut dans l'encadrement de la porte, j'oubliais un instant ce qu'il venait de m'arriver. J'oubliais que j'avais mal et que je ne pourrais plus danser avant longtemps. Mais cet instant fut de courtes durées, car l'inquiétude s'empara de son regard.

-Mauvaise chute.. C'est pas grand chose, ça va aller. Mais tu comprendras mon besoin de chanter!

Je lui adressais un sourire rassurant, avant de l'embrasser sur les deux joues et d'entrer dans sa chambre, derrière elle. J'avais hâte de chanter de nouveau, de chanter avec elle. Car même si elle me demandait des conseils et ne proclamera jamais son talent tout haut, mon amie avait une voix formidable.

-Avant tout, comment vas-tu? Souriais-je.
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