maman vient de t'avoir. mais maman ne te veut pas. maman tout ce qu'elle veut, c'est se débarrasser de toi. elle a eu du mal à cacher sa grossesse à tout les gens qu'elle connait. mais elle l'a fait, honteuse qu'elle est. honteuse qu'elle est de t'avoir et maintenant, elle va t'abandonner. t'abandonner et en oublier jusqu'à même ton existence. faire comme si rien ne s'était jamais passé. tu n'es jamais arrivé. tu n'as jamais été là. et cette nuit, alors que tu viens de pousser ton premier cri, tu viens aussi de connaître le premier et le pire des abandons. l'abandon de cette mère qui laisse son bébé sur le seuil de la caserne de pompier et qui s'en va, comme si de rien n'était.
mais tu es là,
tu es bel et bien là,
vivante comme jamais,
et tu pleures,
pour le prouver.❈❈❈❈❈
je me regarde dans le miroir et je grimace. je grimace parce que je ne vois pas ce que j'aimerai voir dans le miroir. j'ai beau cherché, j'ai beau me fixé, c'est pas là. et ça ne sera sans doute jamais là. et c'est vrai tout ce que dise les enfants à l'école. je ressemble pas à ma mère, et encore moins à mon père.
hahahaha, bambi elle a été adopté.
bambi elle a pas de vrais parents !j'ai fini par les croire, parce que je voyais pas les traits de ressemblance qui me rattacherai à eux. et ça me tue, je passe des heures devant ce miroir. en vain. tout ce que je veux, c'est qu'on me dise que c'est faux. que j'ai les yeux de ma mère et le nez de mon père. je veux qu'on les contredise tous et qu'on me rassure.
mais ça n'arrivera pas,
ça n'arrivera jamais.j'étais décidée à avoir les réponses à mes questions, à connaître finalement la vérité. je me suis préparée longtemps à ça. j'ai répété des heures entières dans ma chambre, devant ce grand miroir. devant le miroir de la vérité. mais quand j'ai ouvert la bouche et que j'ai vu le regard que mes parents m'ont jetés, j'ai compris.
j'ai compris qu'ils avaient tous raison,
j'ai compris que jamais,
je ne leur ressemblerai,
j'ai compris
et je suis partie,
je suis partie,
loin, loin,
peut être trop loin,
pour une enfant de onze ans.❈❈❈❈❈
ça fait des semaines,
que j'suis là,
ou des mois,
je sais plus,
j'ai perdu le compte,
j'ai oublié.par contre, j'ai jamais oublié les premiers mots qu'il a prononcé, quand j'ai ouvert les yeux. quand on a toutes ouvert les yeux. celui qu'il appelle les survivantes, les élues de dieu. "bienvenue dans le nouveau monde, mes chères survivantes. nous avons été appelés par dieu le père, nous avons été choisis pour être ceux qui survivent à l'apocalypse qui se prépare d'or et déjà. dieu m'a souvent parlé dans mes rêves, lors de mes prière et le moment est venu de se préparer au nouveau monde. bientôt le monde que vous connaissez ne sera plus et nous serons les seuls à survivre. nous sommes les élus de dieu. nous avons été choisis. maintenant mes enfants, prions."
des conneries,
que des conneries,
j'le sais,
et j'ai l'impression,
que j'suis la seule,
à le savoir.❈❈❈❈❈
moi aussi,
j'ai fini par prier,
mais pas pour la même chose,
moi quand je priais,
je priais pour sortir de là,
je priais pour qu'on nous aide.si mon compte est bon, ça va faire un peu plus de sept ans, que nous sommes ici. un peu plus de sept ans que j'n'ai pas vu la lumière du jour. et je suis même plus sûre de savoir à quoi ressemble le soleil ou même le ciel. à en croire le fou furieux qui nous a enfermé ici, cela fait maintenant six ans que l'apocalypse e eu lieu. six ans que mes "parents" seraient morts et que tout serait mort sur la terre. sauf nous. sauf nous qui sommes sous la terre. qui sommes là où jamais personne ne pourra nous retrouver.
au début, j'ai essayé de me rebeller. j'ai essayé de faire entendre raison aux autres. j'ai essayé tant bien que mal à ce qu'ils ne croient pas à toute ces conneries. mais j'n'étais pas assez forte, je ne faisais pas le poids. contre lui. et j'ai même essayé de nous faire sortir de là. mais j'ai vite abandonné. c'est impossible de sortir d'ici. la seule porte qui nous mène à l'extérieur, c'est une porte blindé, fermé à clé. on va toutes mourir ici. et on reverra jamais la lumière du jour. plus jamais. et j'ai peur.
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mais mes prières,
elles ont fini par être entendues,
quelqu'un est finalement venu,
on est finalement venu nous sauver,
on est venu nous libérer.c'était le vingt février deux mille quatorze. et ça faisait bien plus de sept ans que nous avions enlevés et descendues dans ce bunker. ça faisait sept ans que nous avions été coupés de la société, mise à l'écart. obligées à écouter à longueur de journées toute ces conneries à propos de l'apocalypse et des élus de dieu. obligées de vivre recluses, de porter ces robes venus d'un autre siècles, obligées de se soigner nous même quand nous étions malades. privées de nourriture à la moindre erreur, obligées à prier je ne sais combien de fois par jour.
j'avais onze ans la dernière fois que j'ai vu la lumière du jour. et dix huit quand je suis sortie de sous la terre.
je suis libre.❈❈❈❈❈