i had a nightmare, woke to the sound of your voice
but you don't sleep here, i lay awake in the dark,
i've been screaming but you don't hear me at all.
la tête immergée, tu laisses ton corps suivre l'ondulation de l'eau, lentement, avant de remonter à la surface. tu décides de faire un dernier aller-retour avant de sortir du grand bassin. cette précieuse heure où tu viens chaque jour nager t'aide à te ressourcer, à vider ton esprit de ses mauvaises pensées, le temps d'une heure. tu penses trop, ava. à hier, à demain. à aujourd'hui, très peu. mais quand vient le moment d'agir, tu oublies tout, un vide se fait en toi avant de te diriger vers là où tes émotions te guident. sans regret. sans retour. jamais on aura vu ava reis s'excuser, demander pardon. pas même à ta mère, la dévouée. mais est-ce que tu peux continuer ainsi, à semer les gens derrière toi, sans te retourner, sans te demander ce qu'il advient d'eux, de ce que vous avez vécu, du passé qui reste inscrit quelque part, de celui qui persiste et signe ? tu frémis une fois dans les vestiaires. ta serviette tombe à tes pieds et tu te glisses sous la douche. lave-toi de ces pensées, ava. elles peinent aujourd'hui à te lâcher, terrible ava. le bruit des gens qui chahutent dans les douches fait écho au son de ton esprit encombré. tu te sèches, enfiles un short et un pull et quittes l'endroit. tes cheveux mouillés humidifient tes habits, tu ne prends jamais le temps de les arranger, la piscine est ta seconde maison, tout le monde a l'habitude de te voir comme ça ici. pas comme les filles de la cabot, qui paradent ici une fois par mois pour poster leurs exploits sur instagram avant de quitter les lieux pomponnées. tu passes te prendre un café à la machine pourrie où personne ne va. évidemment, quand il y a le starbucks. tu détestes le starbucks. tu te baisses pour récupérer ta monnaie, contrairement à ceux de la eliot, qui n'ont pas assez d'énergie pour récupérer quelques deniers délaissés. la plupart du temps, tu te sens en décalage avec les autres étudiants de harvard. toi, tu n'es pas ici grâce à papa. papa n'est plus là, t'oublies pas. tu te redresses et heurtes l'épaule de quelqu'un qui fait la queue en te retournant. « y'aurait moyen de laisser les gens respirer dans cette école ? » tu t'énerves. mauvaise foi. cette foutue école. t'as horreur qu'on franchisse ton espace personnel. et t'es encore plus horrifée de l'intérieur quand tu vois la tignasse platine de l'insolent qui t'es rentrée dedans. une demi-seconde d'arrêt et tu repars. combien de temps que vous ne vous êtes pas adressé la parole ? t'hésites et puis tu t'en fous. tu sors de la cafette et te cale sur un banc aux abords du parc, assise en tailleur. tu allumes une cigarette, tu sais jamais si c'est trop permis dans cette fac modèle mais est-ce que tu l'es, toi, modèle ? les rayons du soleil chauffent tes épaules et sèchent rapidement tes cheveux. la moitié de ton café est tombée par terre. t'as la haine. tu te retournes et tu le vois, un peu plus loin là-bas, qui se casse vers un autre bâtiment. tu ne t'en fous finalement plus. tu décides de le rattraper et le force à se retourner en l'attrapant par l'épaule. brutale. « attends t'as fait exprès de me rentrer dedans tout à l'heure ? » à force tu sais pas si tu délires ou pas, ava, tu sais plus.