EZEKIEL HILLS ► Jacob Young

« Lore, fait taire le gosse putain. Il chiale encore là! », Le gosse, Zeke, c’est toi, et cette voix, c’est ton père. C’était pas la joie, dans le foyer familial. Papa épouse maman. Papa part à la guerre. Papa revient blessé. Papa bat maman. Maman tombe en cloque. Uriah nait. Papa le déteste, lui et maman. Papa viole maman. Maman tombe en cloque. Tu nais. Papa te déteste encore plus. Qu’est ce qu’on va faire de toi, Ezekiel Hills, qu’est-ce qu’on va faire?

T’es né en 1994, deux ans après ton frère. C’était pas si triste, vous passiez même de bons moments quand ton père était pas là. Le reste du temps, t’attendais que ça passe. Il avait beau te détester, il était indifférent à toi. Il n’a jamais levé la main sur toi. Il a juste prétendu que t’existais pas. C’est quoi le pire selon toi Zeke? La douleur physique ou morale? Tu grandis en ramenant des bonnes notes, en cours, comme en sport, pour qu’il soit fier, mais c’est à peine si il te regarde. Est-ce que c’est parce que ton père n’aimait personne que tu as commencé à aimer tout le monde? Zeke, il y a tant de questions qui restent sans réponses… Tellement de choses que tu ne veut pas dire. Que tu ne peut pas dire, et que tu ne diras pas. C’est surement à cause de ton père que t’es devenue aussi violent. Tu n’as jamais voulu être un monstre comme lui, juste t’exprimer, et il ne t’entendais qu’à travers les coups. Quand Il frappait ta mère, et qu’Uriah restait dans son coin, qui restait-il pour empêcher le pire? Un jour, l’année de tes quinze ans, tu l’as frappé, comme t’avais jamais frappé personne. Le visage, le torse, les bras… Tout y est passé. Les coups pleuvaient. Il était trop bourré, heureusement, sinon, t’aurais pas survécu face à un marine comme lui. Quand t’en as eut les jointures des poings en sang, t’as arrêt, et t’as réalisé l’horreur de ton geste. C’était horrible, mais tellement agréable, ce sentiment, le coeur qui bat à toute vitesse, la montée d’adrénaline… Y’avait quelque chose de magique. Tu t’es tellement dégouté, et t’avais tellement honte d’être comme lui, devant ta m§re que t’as fui, lâchement, le plus loin possible. T’as vomis au bout d’un moment, et t’as continué a courir. Uriah t’a retrouvé, le lendemain, dans un parc, endormi contre un arbre. « Maman a appelé les flics. Elle a tout expliqué. On risque plus rien mais t’auras quand même une déposition à faire Zeke. T’as frappé un homme. » Déposition, Interdiction de vous approcher, procédure de divorce, rencontre entre maman et bill, mariage, happy ending. Deux ans passent. Diplôme en poche et prêt fait, t’entres à la prestigieuse université d’Harvard. T’es bon, mais pa assez pour la bourse, malheureusement.

Tu coures sur le terrain comme un fou. Toute la haine, toute la rage, que t’as en toi depuis si longtemps, elle sort que comme ça. Un petit bout de femme, à peine un mètre soixante, te double. Elle court à rythme régulier mais rapide, et le mouvement de ses hanches, et de ses fesses suivant les foulées t’émoustilles légèrement. C’est le genre de fille gentille, et mignonne, qui te fait craquer, mais t’as trop d’copines pour être son copain. T’es obnubilé par cette chevelure brune, cette fille si petite et tenue que tu perds le fil et t’éclates comme une merde au sol. Ton "entraineur" éclate de rire. C’est juste un de tes potes, qui a souvent l’habitude de te chronométrer. « Putain mec, si t’es pas capable de le faire sérieusement, sans rire, casse toi bordel. » T’es tellement imbuvable comme type, Zeke! Quand il est question de sport, t’es insupportable. Tout doit être parfait, tu veut être un champion. Assis, au sol, tu regarde le sable en buvant. Une ombre vient te cacher le soleil. « Pas mal la chute, speedy gonzales! » Tu te tournes vers la fille, celle de tout à l’heure, l’oeil à demi fermé à cause de la lumière éclatante du soleil. « Meenah, Enchantée! » « Zeke, épuisé. » Un joli rire, fluet et sincère s’échappa de ses lèvres. Est-ce que c’est à ce moment que tu as craqué sur elle, Zeke? Tu n’aurais pas du pourtant, elle est pas comme toi elle. Elle est pure, sincère, c’est pas une fille d’un soir, elle se respecte elle, pas comme toi. On dit souvent qu’une amitié commence jamais sur des mots comme "tu veux être mon ami?", mais ici ça a commencé avec le plus beau rire du monde. C’est à ce moment là que tu as chaviré je pense. Noies toi dans les sentiments que tu ne sauras pas gérer.