ma vie ☾ joamy

T'avais encore l'esprit ailleurs, bien trop occupée à penser à tout ce qui avait pu se passer durant le Spring Break. Entre les nouvelles rencontres, l'alcool, la drogue, des retrouvailles, des bêtises, des surprises, les choses avaient été très émouvantes comme éprouvantes. Mais tu souriais, toujours, Amy elle était heureuse. Heureuse de cette pause mais également de retourner à Harvard, pour étudier, apprendre, encore, toujours. T'avais enregistré ton bagage, tu étais en avance. Et Joanna te rejoignait sous peu. Ta jumelle, ta soeur. Il fallait bien avouer que durant ce Spring Break, tu ne l'avais pas vu souvent. Heureusement que vous avez partagées la même chambre, sinon, tu ne l'aurais pas vu des vacances. Mais elle était là, ses cheveux rosés entourant son visage apaisé mais également anxieux. Tu fronçais les sourcils, tu ne la connaissais que trop bien. T'attendais qu'elle vienne à toi, tu lui touchais le bras, caressant du bout des doigts sa peau bronzée. Elle était belle. "Tu vas bien Joan ?" Puis tu lui embrassais la joue, réconfortante.

Joanna n’avait pas fermé l’œil de toute la nuit. Elle n’avait pensé qu’à une chose, la promesse qu’elle s’était faite au début du SpringBreak. Elle n’avait pas voulu gâcher les vacances d’Amy et l’avait donc laissé se mettre la tête à l’envers en toute insouciance. Mais, elle ne pouvait plus le cacher à sa sœur plus longtemps. La jeune femme méritait de le savoir, quand même bien il coûtait à Joanna de lui avouer son secret. Alors, la mine anxieuse, elle traversa la salle d’attente de l’aéroport pour rejoindre son double. Amy n’eut besoin que de la voir quelques secondes pour comprendre que quelque chose n’allait pas. Joanna ne pouvait plus faire demi-tour, elle était coincée. Ô pourtant, elle aurait aimé abandonner cette idée stupide d’aveux et simplement mentir en disant qu’elle était fatiguée. Ce qui ne serait qu’un semi-mensonge finalement. Jojo était réellement fatiguée. La semaine avait été longue et éprouvante pour son corps déjà affaiblit par la maladie. Mais à chaque fois qu’elle avait croisé sa sœur, Joanna avait fait bonne figure. Elle inspira profondément et attrapa la main de sa sœur. Elle l’invita à s’assoir d’un signe de la tête. « Willow… » Commença-t-elle doucement. Elle n’arrivait pas à croire que c’était en train d’arriver. Elle avaient passé une si bonne semaine, et Willow – que sa sœur n’avait pas renoncé à appeler par son prénom de naissance – semblait plus qu’heureuse. Elles avaient passé une bonne semaine et à présent elles rentraient, ensemble, à Harvard pour faire la seconde chose qu’elles aimaient le plus au monde : apprendre, encore et toujours. « Willow, chérie… » Depuis le décès de leur mère, Joanna avait eu tendance à materner quelque peu sa sœur. Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui, elle devait la traiter comme une adulte et lui parler franchement, comme à une adulte. Cela ne l’empêchait pas d’avoir la gorge sèche et l’estomac nouait. Elle attrapa ses petites mains douces entres ses paumes, replaça une mèche de cheveux rose derrière l’oreille de sa sœur et après un soupir, elle avoua enfin son immonde petit secret à Amy : « J’ai un cancer du sein. » Après avoir passé tant d’année à la protéger, c’était elle qui finalement, détruisait son monde.

Tu sentais que quelque chose n'allait pas, tu devais t'asseoir, elle avait un air grave. Tu avais du mal à respirer, t'entendais les surnoms douceur, t'avais envie de partir, de fondre, de disparaître. Tu voulais être une vulgaire immonde poussière, et partir, parce que Joanna avait toujours été ta grande-soeur dans le fond, elle était plus qu'une égale, elle avait toujours été plus depuis le décès de votre mère. La voir manquer autant d'assurance, puis finalement, sentir le monde se dérober. Sentir les fleurs faner, l'air s'agiter, frapper un visage douceur, un visage naïf. Tu refusais de croire à ses dernières paroles, un cancer, n'importe quoi. Ta main venait doucement s'accrocher à tes lèvres, comme barrière de protection. Tu sentais les larmes monter, et pourtant, tu refusais de croire à son air grave et à ses paroles mensonges. Tu ne pouvais pas y croire, pas une seconde fois, pas encore l'intrusion de cette maladie dans ta vie. Tu voulais hurler, tu voulais frapper, crier, t'écrouler, mourir, mais rien ne se passait. T'étais molle, désemparée, exténuée. Cette nouvelle, cette horreur venait de te glacer sur place, de te vider de tous les sentiments du monde, de toute l'émotivité que tu ressentais pourtant tous les jours. Tu ne savais pas quoi faire, quoi dire. La gorge sèche, le regard peureux, tu savais plus. T'avais perdu la motricité humaine, le monde venait de s'arrêter. C'était les derniers instants de ta vie. Et cette larme, acide, qui venait tracer l'horreur et la tristesse sur ton visage enfantin. Cette unique larme, qui, finalement, traduisait ta compréhension bien que tu refusais. Après quelques secondes, quelques minutes, peut-être même plusieurs heures, tu laissais tomber ta main. Ta main fatiguée, comme ton corps. Tu te laissais tomber sur le siège, oubliant durant cet instant de croiser les yeux de ta soeur. "Non". Comme une enfant, tu refusais cette vérité massacrante.

La détresse d'Amy était son point faible, depuis toujours. La moindre signe qu'elle avait envie de pleurer lui aurait fait abandonner tout ce qu'elle était en train de faire pour la serrer dans ses bras. Seulement là, elle n'osait pas. Elle voyait le visage de sa soeur se déformer sous la tristesse et sous la peur, et pour la première fois de sa vie, Joanna se sentait totalement impuissante face à la détresse de sa soeur. D'habitude elle aurait trouvé les mots pour lui faire comprendre que tout allait bien se passer, que ce n'était pas si grave et qu'elles étaient assez fortes pour combattre cela ensemble. Mais pas aujourd'hui. Joanna était trop impliqué, trop concerné par la chose. Et bon sang ce qu'elle était fatigué. Faire bonne figure pendant une semaine avait été compliqué, mais maintenant, elle se sentait faible, sa peau était diaphagne et ses veines saillaient sous cette peau laiteuse, affichant de mince trait vert et violet. « J'aurais dû te le dire plus tôt, je suis désolée. » bafouilla-t-elle, l'assurance l'ayant quitté depuis le début de cette conversation. Elle se sentait affreuse d'avoir mit sa soeur à l'écart aussi longtemps. Elle caressa tendrement la joue de Willow, séchant la perle salé roulant sur sa joue. Elle n'était plus assez forte pour elles deux à présent. Elle n'était même pas assez forte pour elle seule. « Willow, je te jure que ça va aller, y'a plein de solution maintenant. » tenta-t-elle. Mais elles savaient toutes les deux que même en se soignant, elle n'était pas forcément sortie d'affaire. Le gêne était en elle. Et, elle pouvait en mourir à tout moment.