BARTHÉLEMY Y. BONAPARTE ► shawn ashmore

Ils avaient essayé. Ils ne savaient pas d'où cela venait, mais ils avaient essayé. Personne encore dans la famille n'avait subi ça, ou alors cela à sauter bien des générations. Tout leurs efforts ont été vain et ils ne pu malheureusement rien faire pour le soigner. Je ne m'en suis jamais plaint, ou du moins, j'essaye. Je ne veux pas être pris en pitié, que ce soit mon seul adjectif, qu'on me définisse que par rapport à cela. Bien malheureusement, cela impacta toute ma vie et je ne puis jamais m'en défaire. Déjà, loin avant, quand on apprenait les couleurs, j'étais le seul de la classe à toujours avoir faux. Je devais répondre au hasard et prier pour avoir la bonne réponse, mais je ne comprenais même pas à quoi cela correspondait. Apprendre des choses que l'on ne comprend pas, c'est on ne peut plus futile. Pourtant, je me débrouillais très bien avec ce qu'on me demandait à côté. Après que l'on me l'ait relu. Au bout d'un moment, peut-être vers mes quatre ou cinq ans après quelques années de scolarisation en milieu déjà chic qu'ils ont commencé à s'en inquiéter. Ce problème qu'on aurait cru passager ne l'était pas tant que cela et ce n'était pas non plus quelques caprices ou on ne sais encore. Quelle couleur je voyais ? Gris. Gris, gris et encore désespérément gris. Quelle lettre je voyais ? Je n'en savais trop rien. Je devais me rapprocher d'un nombre affolant de pas avant de pouvoir les distinguer. Je ne comprenais vraiment pas l'intérêt de tout ça. Je me sentais mal. Mal de ne pouvoir répondre à rien. Je me sentais faible face à ça. Impuissant, même. Qu'est-ce que je pouvais bien y faire, après tout ? Pas grand-chose. Puis, le verdict arriva. Encore un mot que je ne comprenais pas, que je connaissais pas. Peut-être en attendais-je trop de moi, du haut de mes cinq ans, j'en attendais vraisemblablement trop. J'étais achromate.

Et ça, tout l'argent du monde ne pouvait me le guérir. J'ai même préféré demander à mes parents d'arrêter de se leurrer avec ça. J'ai cru leur fendre le coeur de mes propres mains en leur disant ça, mais je ne voulais pas qu'il souffre plus. J'avais presque sept ans à ce moment et même l'ombre d'une enfance joyeuse et innocente était maintenant totalement brisée. Je ne pouvais pas traverser la rue sans risquer de me faire écraser par une voiture que je n'avais pas vu. Je ne pouvais pas complimenter ma mère pour la robe qu'elle venait de s'acheter et dont la couleur semblait pourtant si bien lui aller. Je ne pouvais pas sortir les jours d'été sent me sentir harassé par la lumière du soleil qui me tuait un peu plus chaque secondes. Je n'étais pas cloué à un lit d'hôpital, atteint d'un cancer ou d'une tumeur et j'aurai même du relativiser en pensant à ces personnes là, mais cela me semblait invivable. Je me demandais même si la cécité n'était plus plaisante, tellement c'était frustrant de pouvoir voir, mais si mal. Ce châtiment inscrit au fer rouge sur moi dès ma naissance était terriblement injuste et je m'inquiétais presque plus de mes parents qui attendaient un héritier capable de suivre notre noble dynastie plutôt que quelqu'un comme moi. Fort heureusement, avec une certaine ironie, la nature m'a doté d'une certaine intelligence, certainement afin de palier à ce déficit. Je ne voulais pas me décourager, je voulais continuer, les rendre fiers, leur montrer que leurs efforts n'étaient pas vin, malgré cet handicap. Je ne voulais pas que je sois défini par ça, que ce soit le seul moyen de m'identifier. Cela me fait presque plaisir quand on me traire de gosse de riche plutôt que d'aveugle. Quand les gens ne s'en rendre pas compte et qu'ils en font abstraction. C'est tout ce que je veux. C'est mon combat, on peut dire ça comme ça.

Mais alors, comment ai-je pu atterrir à Harvard comme cela, me dites-vous ? Et bien, comme dit plus tôt, grâce au fait que je ne me débrouille pas trop mal tant que je déchiffre les écrits dès qu'il y en a, mes résultats sont pour le moins très satisfaisant. Je déteste me flatter, mais il faut bien que je me trouve au moins une qualité. De plus, l'argent adoucie toujours les mœurs, comme on dit. Même si je n'en vois pas l'intérêt, je dois admettre qu'il m'a bien aidé et sans cette chance, je n'aurais certainement pas pu atteindre un si haut objectif et je ne veux en aucun cas que cela gâche ma vie. Je veux réussir, pour tous, mais aussi pour moi.