LY S. RUEL ► terra jo wallace

Certaines personnes croient que si on nait dans la richesse notre vie est prédestinée à être merveilleuse et facile. Ce qu’ils ignorent, c’est que les bâtons qu’on leur met dans les roues depuis qu’ils sont tous petits les ont aidés à grandir et à surmonter les obstacles. Ainsi, quand vient le temps d’apprendre à vivre seul, ils sont beaucoup moins démunis que quelqu’un qui a toujours obtenu tout ce qu’il désirait. Les obstacles semblent alors encore plus éprouvants et insurmontables. La vérité, je crois, c’est que peu importe d’où tu viens des difficultés tu en rencontre à tous les jours. Dans mon cas, j’ai grandis entouré de femmes de chambre, de cuisiniers, de garçons d’étage et de toute une panoplie d’employé d’hôtel. En réalité, je connaissais plus les employés de mes parents que ceux-ci jusqu’à ce que j’atteigne l’adolescence. J’ai vécu mes premières années de vie en me reposant plus sur mon frère, que sur mon père ou ma mère. N’allez pas croire que c’est parce qu’ils ne nous aimaient pas, c’est juste que faire tourner un hôtel, ça prend plus de temps qu’ils le désireraient. J’ai tout de même de beaux souvenirs de mon enfance. Les vacances en famille où mes parents laissaient tout moyen de communication à distance pour être certains de ne pas être déranger. Les spectacles de danse auxquels je participais et que même si mes parents ne venaient pas à chaque fois, ils soulignaient leur fierté d’une manière ou d’une autre. Les journées passées à la plage au lieu d’aller à l’école parce que notre nounou avait envie de nous gâter. La meilleure partie était quand à la fin de la journée papa ou maman venait nous rejoindre pour une heure ou deux. Même si nous n’avions pas l’attention totale de nos parents. Nous ne manquions pas de socialisation, ni d’amour.

Quand l’adolescence commença, ça devint beaucoup plus difficile. Les autres jeunes commençaient à comprendre que leurs problèmes étaient en grande partie causés par mes parents. Plusieurs personnes nous ont pris comme bouc émissaire du congédiement de leurs parents. J’ai donc appris à me défendre et à me tenir debout. En fait, j’étais une privilégiée parmi un tas de personnes de classe moyenne, voir pauvre. Maintenant, je comprends leur haine, mais d’un autre côté s’en prendre à nous n’allait pas leur redonner leur emploie. Longtemps, je me suis demandée pourquoi nos parents avaient décidés de nous envoyer à l’école publique. Aujourd’hui, je comprends que c’est ce qui a forgé notre caractère : d’apprendre à traiter avec des gens de toutes les classes sans y voir une hiérarchie préconçue. Ça m’a aidé également à comprendre comment les gens fonctionnent et comment je voudrais qu’ils fonctionnent. Grandir parmi ses gens libres, en quelques sorte, ça m’a également appris à faire ce que je désirais dans la vie, d’écouter les récits des voyageurs, m’a appris à être un esprit libre qui trace son chemin sans se conformer. À un point tel, qu’il est pour moi impossible de suivre une voie déjà tracé. J’aime emprunter des chemins de traverse, avoir des expériences nouvelles, c’est ce qui vient enrichir la création. Mes amies avaient toutes des rêves de grandes aventures et de liberté, qui m’ont été transmises à travers elles. Bon, ce n’était pas ce que mes parents voulaient, mais est-ce que ça compte? C’est une partie de mon individualité, je crois.

Mes parents ont toujours dit que j’étais la plus grande contradiction qu’ils aient connus. Autant je peux me montrer autoritaire, directrice et contrôlante dans l’atelier et pendant les pratiques de danse, autant je peux être totalement à l’Ouest, dans la création et l’imagination où ils n’ont jamais été. En gros, que mon côté artistique est parfois tellement intense qu’ils en restent surpris. C’est pourquoi dès que je leur ai expliqué ce que je voulais faire plus tard, ils ont trouvé des gens qui pourraient m’aider. Ils m’ont aidé à dégotter plusieurs stages en design, dès un très jeune âge. Ils m’ont seulement fait promettre que même si ça fonctionnait bien pour moi, j’allais aller à l’université et que j’allais obtenir un diplôme. À quelque part, ça n’a pas été difficile de remplir cette promesse parce que si je suis pour monter ma boite un jour, je veux être la meilleure. Je ne veux pas qu’un jeune fraichement sortie de l’université puisse m’en boucher un coin. Je suis donc à l’université depuis quatre années et c’est la première année que je me dis que je devrais peut-être m’impliquer plus. Je pense même intégrer une maison, mais j’ignore laquelle serait faite pour moi.