ASTORIA NIGHTINGAL ► brynja jonbarjarnardottir

« Astoria, viens par là » ordonna d'une voix froide Mr.Nightingal à sa fille, assise sur son grand lit dans sa chambre rose. Avec sa robe banche à volants et ses cheveux blonds qui tombaient sur ses frêles épaules, elle avait un air angélique. D'ailleurs, c'était ce à quoi on la comparait souvent : un ange. « Non. » répondit la petite fille, croisant les bras sur sa poitrine, le regard sur la photo encadrée sur sa table de nuit. Dessus, on pouvait voir un bébé qui riait et deux parents qui souriaient. La jeune femme était grande et avait des cheveux bouclés couleur paille. Ses yeux bleus pétillaient de bonheur, et son sourire était aussi large que celui qui semblait être son mari, à ses côtés. « Tellement têtue. Comme ta mère. » L'homme qui était resté dans l'encadrement de la porte pénétra pleinement dans la pièce et pris dans ses bras sa fille. « Astoria, regarde moi. » Cette dernière détourna les yeux d'un air effronté. Déjà si jeune mais déjà assez désobéissante pour tenir tête à son père, celui que personne n'osait contredire. « Je ne veux pas y assister. Je ne veux pas la voir. », déclara la gamine d'une voix fluette, mais déterminée. Le diplomate poussa un soupir et assit la petite blonde sur son fauteuil pour enfant, avant de s'agenouiller devant elle. « Maman n'est plus là. Maman est partie Astoria. Elle ne veux plus nous voir, tu comprends ? » « C'est de ma faute ? » La question puérile de l'enfant sortit de sa bouche avant même qu'elle n'ait put l'arrêter. « Non. Ni de la mienne. » finit par dire Mr.Nightingal après une pause. Il en refit une, puis se leva. « Allez, il est temps d'y aller. Hemma t'aime beaucoup, et tu le sais. Montre toi gentille avec elle. » Puis, il sortit dans le couloir.

« Comment t'as fait ? C'est un truc de dingue ! » demanda l'adolescente à Astoria, aussi brune que son amie était blonde. Ses lunettes sur le nez, les yeux rivés sur son écran et ses doigts posés sur le clavier, la miss Nightingal sourit. « De l'entraînement, c'est tout. » Pia éclata de rire en posant une main sur l'épaule d'Astoria. « C'est fou, tu viens de hacker à distance l'ordi de mon frère. T'es géniale. » La blonde de douze ans à peine jeta un regard à sa camarade, un sourire aux lèvres. « J'aimerais tellement faire ça plus tard tu sais. » La brune haussa les sourcils. « C'est à dire ? » « Ben... depuis que j'habite plus en Hongrie et que j'ai déménagé avec mon père et sa femme, j'ai peut-être une chance. » répondit Astoria, les yeux dans le vide. « Une chance de quoi ? » interrogea Pia, curieuse. « D'intégrer une grande université et d'étudier l'informatique » dit soudain la jeune fille aux yeux bleus. « Aux Etats-Unis, tout est possible. » « Nous avons à peine douze ans 'Oria. Nous avons encore le temps » s’esclaffa la brune. Elle se leva ensuite pour sortir de la pièce et se diriger dans la cuisine, laissant Astoria devant son écran, seule avec ses pensées.


Astoria est là, au milieu de tous ces gens. Les lumières de toutes les couleurs éblouissent la pièce obscure, le martèlement des sauts fait trembler le plancher, la musique fait vibrer les murs, l'alcool coule par terre mais aussi dans les veines des adolescents, on forme les rails et on tire sur les joints. C'est sa première soirée, et pour la première fois également, Astoria se sent vivante. On la voit rire, déjà soûle, transpirante, increvable, qui danse, danse, danse. Elle crie, elle boit, elle fume. L'adrénaline lui parcoure tout le corps, et elle comprend que c'est de cette façon. De cette façon qu'elle veut continuer à vivre : en faisant la fête, et rester jeune pour toujours.


« Cette gamine a toujours eu un problème avec l'autorité ! » hurla Hemma dans la cuisine. La femme était grande et rousse. Son tailleur vert mettait en valeur sa taille mince et ses talons la rendaient plus grande qu'elle ne l'était déjà. Mr.Nightingal était assit à la grande table au centre de la pièce, la main posée sur la tempe. Il ne disait rien. « C'est ta fille Bradley, fais quelque chose ! Quand est-ce que cette enfant t'a obéi pour la dernière fois ? » L'homme poussa un soupir. « Ce n'est pas une enfant Hemma. Elle a dix-sept ans. » Sa femme poussa un grognement d'exaspération. « Oui, et c'est donc une bonne raison pour la laisser se droguer, bien sûr. » « Nous ne sommes même pas sur qu'elle se drogue Hemma, calme toi. » répondit Bradley, l'air non convaincu. « Mais oui, la poudre que j'ai trouvé dans sa chambre c'était peut-être de la farine ? » cracha Hemma, les poings posés sur la table. Devant le manque de réaction de son mari, elle continua : « Regarde là. La façon dont elle s'habille, et comment elle ME parle ! Elle fait le mur tous les soirs et sort avec tous les garçons qui passent. » Bradley ferma les yeux, l'air fatigué. Il n'avait jamais été proche de sa fille, et cette dernière année, la situation lui avait échappé. Elle filait du mauvais coton, comme on dit. Ses résultats scolaires étaient très satisfaisants, mais son comportement n'allait plus. On se demandait comment elle faisait pour tenir des notes aussi bonnes à l'école. Sa belle-mère était à bout, elle aussi. Même si entre elles deux, les relations n'avait jamais été très bonnes, dorénavant, le respect n'avait même plus lieu d'être. Hemma se redressa de toute sa hauteur et regarda son mari avec calme. « Je vais l'envoyer ailleurs Bradley. C'est ainsi. »



« Vous avez du talent. » déclara son professeur d'informatique et faisant défiler le programme sur lequel Astoria avait travaillé plusieurs mois. Cette dernière regarda son reflet dans l'écran et murmura : « Je le sais. »