we're trapped | Esmeralda

Ashton avait tergiversé toute la journée. Il avait fait les quatre cent pas. Il avait hésité à retourner sur les lieux depuis cette fameuse nuit. Pourquoi ne s’était-il pas arrêté ? Il était bourré. Et Esmée aussi. En fin de compte, les deux jeunes avaient pris la fuite parce qu’ils avaient flippé. Ils avaient renversé un piéton et s’étaient barrés comme deux lâches. Ils avaient craint les représailles, mais pour l’instant, personne ne les avait retrouvés. Mieux encore, personne n’avait retrouvé le corps du piéton qu’ils avaient renversé sur une petite route de campagne et c’était ce qui chagrinait Ashton. Parce que plus ils attendaient, plus il culpabilisait. D’ailleurs depuis cette fameuse soirée, il n’avait pas daigné reprendre contact avec Esmeralda qu’il appréciait pourtant beaucoup, parce qu’il craignait qu’on les retrouve, il avait peur pour sa carrière NBA et en fermant les yeux, il se disait que la culpabilité s’estomperait avec le temps. Mais non. Ca ne fonctionnait pas ainsi. Tous les soirs, il s’imaginait la tête que pouvait avoir ce piéton sacrifié. Etait-ce un homme, une femme, un enfant ? Avait-il la vie devant lui, avait-elle des enfants ? Avait-il une famille ? Tout ceci le contrariait grandement, et il était arrivé à un point de non-retour. Il fallait que ça s’arrête. Qu’il arrive à en parler, qu’il trouve Esmée, et peut-être qu’ils finissent par assumer et se rendre aux autorités. Adieu son rêve de NBA, il était foutu. C’était ce qu’il disait quand il quitta la chambre qu’il possédait chez les Mathers. Soupirant, il se rendit rapidement au salon commun de la Mather House et quand il aperçut le minois d’Esmeralda, il continua d’avancer jusqu’à elle les mains dans les poches, baissant la tête jusqu’à la relever une fois vers elle et il s’adressa doucement à la demoiselle. « Esmée, faut vraiment qu’on parle. » Mais pas ici. Pas devant tout le monde, alors il lui saisit le bras pour l’emmener plus loin, pour parler à l’abri des regards, il ne fallait pas que ça se sache. Il était inquiet, ça se voyait. Il parlait doucement, s’exprimait avec parcimonie, comme si il avait peur qu’un flic soit caché derrière une porte. « Je sais plus quoi faire de ma voiture… Je vais la vendre je pense… Je veux pas qu’on me retrouve… » Il flippait tellement qu’il ne se rendait même pas compte de l’aberration de ses propos. Il implorait du regard Esmeralda afin qu’elle trouve une solution, mais elle était probablement aussi effrayée que lui. Il marmonnait de plus en plus, craignant que quelqu’un les surprenne : « Je sais même pas s’ils ont retrouvé le corps encore… » Fallait-il retourner là-bas et voir si le corps y était toujours ? Mais il n’était même pas sûr de retrouver l’endroit où ils l’avaient percuté. C’était tard, ils étaient bourrés, et il ne souhaitait pas prendre le risque d’y retourner car si on les trouvait là-bas, il serait difficile de les innocenter. Ils étaient piégés, ils allaient se figurer tous les scénarios possibles jusqu’à ce qu’on les trouve et qu’on les mette en prison. Ils étaient fichus. Il n’aurait jamais dû prendre le volant en étant bourré. Si seulement il savait qu’il avait percuté un rondin, il se moquerait de lui-même en plus d’être soulagé, mais ça bien sûr, il était loin de le savoir. Soupirant, il finit par questionner la demoiselle, ne lui laissant pas en placer une : « Bon alors, qu’est-ce qu’on fait Esmée ? On se rend ? » Ca semblait loin d’être évident. Si elle pouvait porter le chapeau pour lui, ça l’arrangerait.