Et après la tempête, le calme plat ? (Finn)

J'avais... plus ou moins à régler tous mes problèmes de ces dernières semaines qui venaient de passer, je m'étais expliquée avec Willow, avec Koray et même avec Finn, lui annonçant par la même occasion que finalement je n'étais pas enceinte. J'étais à la fois rassurée et triste, parce que quoi qu'on en dise je m'étais faite à l'idée d'héberger un petit être dans mon ventre, de le sentir grandir... Mais finalement non, ça avait été une fausse alerte et avec ça, le stress était parti, enfin plus ou moins, parce que maintenant je devais savoir ce qu'il allait advenir de Finn et moi ? Avait-il fini par se décider à tourner la page, de m'oublier après le mal que je lui avais fait ? Je n'en savais rien, nous n'avions échangé que quelques sms depuis...

Moi, je lui avais fait comprendre que si j'en avais encore la possibilité, j'aimerais recommencer de zéro avec lui, repartir sur de bonnes bases également et voir si on avait le droit à une deuxième chance... Ce soir j'étais au Lord Hobo, pour fêter ma non grossesse, donc il était hors de question que je me retienne sur l'alcool. Puis j'avais besoin de décompresser, ne sachant pas si c'était vraiment une bonne idée finalement, et j'avais envoyé un sms à Finn lui proposant de me rejoindre s'il avait toujours envie de me revoir...

May n'était pas enceinte. Au delà du soulagement, Finn ressentit une colère insondable bientôt recouverte d'un dépit désabusé. Tout ce foin à l'hôpital pour finalement annoncer l'erreur d'une prise de sang normalement fiable à 90 %. A croire que tomber sur les 10 % restants n'arrivait pas qu'aux autres. Finn aurait du se sentir mieux : il fuyait depuis toujours la responsabilité de devenir père. Il ne voulait pas se poser. Malgré tout l'arrivée d'un enfant l'aurait obligé à se rapprocher de May et à prendre enfin ses couilles à deux mains. Maintenant que cet argument avait été balayé d'un sms tout naturel, qu'allait-il advenir d'eux ?

Le regard du professeur oscilla entre l'écran de son portable et la réalité qui se tenait devant ses yeux. Lord Hobo, c'était bien ça. May lui avait proposé plus ou moins de venir l'y retrouver, pour fêter ça « dignement ». Comment fêter le fait de ne pas être enceinte ? Comment avait-elle pu y aller sans lui ? L'estomac serré, Finn referma le clapet de son portable en songeant que s'ils finissaient un jour ensemble, il y aurait décidément encore beaucoup de chemin à faire.

Finn traversa la route avant de se faire assaillir par une vague de chaleur humaine tandis qu'il pénétrait dans le bar bondé. La carte lui appris par ses prix ridiculement bas la raison de son succès. Finn se faufila entre les corps, à la fois étudiants et adultes, qui se collaient les uns aux autres à cause du manque de place.
Impossible de rater la magnifique silhouette de la jeune femme accoudée au bar. Finn se glissa jusqu'à elle et se manifesta d'un coup d'épaule avant de commander une boisson random.

« Salut. Alors, je te manquais ? »

Je savais que Finn m'en voudrait pour être allée toute seule pour faire ma deuxième prise de sang, mais l'hosto était définitivement un endroit que je voulais éviter pour un bon bout de temps, trop de mauvaises ondes, enfin ce truc de genre. J'avais l'air d'être une idiote, d'être venue toute seule un samedi soir au Lord Hobo, donc j'espérais que Finn accepte de venir me rejoindre, qu'on ait l'occasion de discuter tranquillement... Et surtout... que l'on mette nos sentiments au clair, que l'on sache si l'on se donnait une deuxième chance ou non. Rien que d'y penser, mon coeur se serrait et je me commandais une vodka redbull pour démarrer tranquillement la soirée, jusqu'à ce qu'un coup d'épaules me fasse sortir de mes pensées.

C'était lui, il était venu et je ne pouvais m'empêcher d'être heureuse, parce que je n'y croyais plus de venir le voir ici ce soir. Sa question, il connaissait la réponse, mais je lui souriais, le laissant s'installer "Salut, oui... tu me manquais, mais surtout j'suis contente que tu sois venu ce soir... sinon j'aurais quitté le bar toute seule et probablement bourrée."

Il y avait tout de même encore un malaise entre nous, mais je ne voulais pas qu'il soit là éternellement entre nous deux, c'était juste pas possible.

"Tu vas bien ? Je voulais que tu saches que j'suis désolée d'être allée à l'hôpital toute seule, c'est pas franchement un bon endroit pour y parler... donc voilà, je me suis dit qu'ici ce serait plus simple."

May lui annonça ouvertement qu'il lui avait manqué, signe qu'elle décidait enfin de retirer le balai qu'elle avait dans le cul. Finn ne put retenir un sourire de soulagement. Peut-être allaient-ils enfin pouvoir discuter sincèrement et mettre les choses à plat sans les gonfler d'euphémismes et autres métaphores toutes plus chiantes les unes que les autres. Finn détestait tourner autour du pot, ce qui se manifestait par une grande maladresse oratoire et presque vulgaire. Mais au moins, il allait droit au but et ne supportait pas quand ça traînait.
Mais en même temps, avec May, mieux valait que ça traîne, parce qu'il sentait clairement qu'il n'était pas au bout de ses surprises avec elle.

« Oh, suffit le drama. La vie est belle et tu as deux gros soucis en moins désormais. Réjouis-toi. »

Pas d'enfant à concevoir donc pas d'avortement à organiser, et des relations apparemment nettement plus claires côté cœur. En plus de cela, May ne semblait pas manquer d'argent et étudiait dans l'une des plus prestigieuses universités du monde ; de quoi pouvait-on se plaindre ?

« Il n'y a pas de souci, je suis passé à autre chose, même si j'avoue que ça m'a déçu. Je suis soulagé d'avoir cette responsabilité de moins. Personne n'avait besoin de ça dans notre entourage. Tu vas pouvoir te concentrer pleinement sur tes études et c'est ce qui est le plus important. »

Manquerait plus qu'elle foire son année à cause de stupides relations de cœur.

« Tu vas à la sortie ski cet hiver ? » demanda-t-il par curiosité. « Je ferai partie du voyage. Ca permettra à mes élèves de s'aérer la tête de douze bonne heures de cours et moi ça me permettra de souffler. Beaucoup trop de choses se sont produites ces temps-ci ; j'ai la tête qui va exploser. »

Pour être honnête, ça me faisait du bien de le revoir, de lui dire c'que j'avais sur le coeur, et d'me rendre compte que finalement il occupait une place importante, plus que ce je pensais... Mais lorsqu'il me dit être passé à autre chose, je pensais qu'il parlait de nous, du coup mon coeur se serrait, tentant de ne pas y faire attention non plus. Mais mes mains tremblaient, j'essayais de me concentrer sur mon verre et en bus même une longue gorgée.

"Quand... tu dis être passé à autre chose, ça veut dire que tu as décidé de tourner la page avec moi et de trouver une autre femme à aimer ? Enfin, peu importe ta réponse, je comprendrais de toute façon, surtout après tout ce qui s'est passé." Je faisais celle qui n'était pas atteinte, qui n'allait pas se faire du mouron pour la réponse qu'il me donnerait, je ferais celle qui comprendrais et j'assumerais son choix.

"Sinon pour le ski oui, j'y serais, on aura peut-être l'occasion de skier ensemble, si jamais tu es tenté bien sur, et puis oui je pense que ça nous fera du bien à tous. " Je riais maladroitement et terminais déjà mon premier verre, m'en commandant un deuxième, demandant la même chose que tout à l'heure.
"Tu veux que je t'offre un verre ? " demandais-je le plus naturellement possible.

Finn fronça les sourcils avant de réellement percuter ce qu'elle sous-entendait.

« Non, voyons, ne vas pas si loin. Je voulais juste dire que je ne t'en voudrai pas toute ma vie d'avoir été faire une prise de sang sans moi. »

Il lui adressa un clin d’œil. Un whisky-coca glissa sur le zinc et il l'attrapa.

« Je suis étonné que tu te soucies soudain autant de nous deux. »

Saisissant la petite touillette en plastique, il la fit soudain tournoyer dans le verre par réflexe, pour se donner contenance, comme tout le monde. Lorsqu'on attendait désespérément la décision de quelqu'un qui prenait tout son temps pour la donner, plongé dans l'incertitude la plus totale, on en arrivait à éprouver l'impression désagréable que l'autre se fichait éperdument de nous. Qu'il faisait sa vie tranquillement pendant que vous ne fermiez pas l'oeil de la nuit.
Et que vous en soyiez réduit à coucher avec quelqu'un d'autre par désespoir.

May le sortit de ses pensées en lui proposant de lui offrir son verre alors qu'il s'apprêtait à glisser la monnaie sur le comptoir.

« Volontiers. » accepta-t-il.

Il lui envoya un sourire chaleureux lorsqu'il appris qu'elle venait elle aussi à la sortie ski organisée par l'université. Cela leur ferait du temps en plus ensemble, loin, très loin des obligations de l'école. May commanda déjà un second verre. Finn la regarda faire avec suspicion. Elle buvait trop vite et il se voyait déjà la ramener complètement jetée jusqu'à chez elle. Mais il ne dit rien. Il n'était pas son père.

J'étais rassurée par sa réponse, après tout on avait tout de même partagés ensemble une nuit de folie lui et moi, et même si j'avais apprécié, j'avais eu surtout peur... peur de m'attacher à lui pour finalement le voir partir comme l'avait fait Owen... C'était peut-être pour ça que je ne savais pas ce que je voulais à ce moment-là et pour ça que j'avais peur de me relancer dans une relation sérieuse... Mais jamais je n'aurais pensé lui faire autant de mal... je regrettais encore, et j'aurais voulu que rien de tout ça n'arrive...

"Je m'étonne moi-même tu sais, de me poser des questions pour nous deux... Si... j'ai eu ce dérapage avec Willow... c'est parce que j'ai eu peur de ce que je pouvais ressentir pour toi, peur de m'attacher et de finalement te perdre... peur de recommencer une nouvelle histoire d'amour, mais j'me suis rendue compte que c'était vraiment stupide de ma part... Parce que ce soir-là je me suis sentie de nouveau aimée et ça m'a fait quelque chose... alors oui, je me soucie pour nous deux, parce que je donnerais ma vie pour avoir une deuxième chance avec toi..." Voilà, ce que j'avais sur le coeur venait de sortir... et je ne touchais pas encore à mon deuxième verre, j'voulais être un minimum sobre pour lui avouer tout ça .

Heureusement, May n'en était qu'à son second verre, sinon, Finn n'aurait pas cru ses paroles. Elle qui avait toujours tourné autour du pot se révélait soudainement d'une sincérité désarmante. Finn comprit tout d'un coup que la roue tournait, mettant May en position...de celle qui lui courait presque après ? L'impression demeurait très étrange. Finn avait poursuivi May dans ses fantasmes jusque dans la réalité et désormais, cette dernière s'attachait à l'espoir d'une seconde chance. Finn ne se demanda pas si elle le méritait ; il la voulait, point barre.

« Est-ce que ça signifie que tu veux sortir avec moi ? »

Cela signifiait la même chose qu'au collège ; quand on rencontrait son premier amour, on le défendait jalousement, croyant qu'on passerait sa vie avec. Au lycée, sortir avec quelqu'un se transformait rapidement en amourette aussi rapide qu'un changement d'humeur, avant de devenir peu à peu un coup d'un soir. Finn ne voulait pas de May comme un coup d'un soir. Il la voulait pour toujours et surtout, il ne tenait pas à la partager.

« Tu les as aimés ? Tu étais amoureuse de Willow et de Koray ? »

Selon toute logique, pour le scientifique qu'était Finn, il demeurait impossible de s'amouracher de plus d'une personne. C'était confondre ses sentiments et irréfutablement, se prendre la tête. Mais May avait l'air d'aimer ça alors...on pouvait s'attendre à tout avec elle. Surtout à l'impression désagréable qu'elle s'était testée en testant les autres ces dernières semaines, comme on le fait à douze ans pour se découvrir. L'expérience Willow lui avait laissé un goût amer, même s'il l'avait certainement baisée plus de fois qu'elle.

Heureusement que j'étais encore sobre lorsque je venais de lui dire tout ce que j'avais sur le coeur, c'était mieux, et comme ça l'abcès était crevé, du moins de mon côté... Mais lorsque Finn me demandait si ça signifiait que je voulais sortir avec lui, je trouvais la question plutôt drôle, ça me donnait l'impression d'être une jeune ado à qui on posait ce genre de question... Puis il me demandait si j'étais amoureuse de Willow et Koray... là c'était tout de suite moins drôle, presque gênant, le souvenir d'apprendre que Finn avait couché avec Willow revenait à son tour...

"J'ai toujours aimé Willow comme ma meilleure amie, comme la sœur que je n'ai jamais eu, mais ça n'a jamais été de l'amour comme elle l'aurait voulu que ce soit... Quant à Koray, il ne s'est jamais rien passé entre nous, il ne se passera jamais rien puisque je le considère comme un grand frère, c'est juste impossible pour moi d'être amoureuse de lui..." J'avais envie de lui demander si lui avait pu aimer Willow lorsqu'il avait couché avec elle, mais c'était aller en terrain dangereux, du coup j'évitais de lui poser cette question...

"Et sortir avec toi... je crois que c'est quelque chose dont j'ai envie, mais qui me faisait peur, c'est tout... J'ai eu peur de m'attacher pour souffrir une nouvelle fois, comme j'ai souffert lorsqu'Owen m'a abandonnée... Mais ce soir je n'ai plus peur, parce que je me dis qu'avec toi ça sera différent, qu'on a une chance malgré tout ce qu'il s'est passé..."

Je lui souriais timidement et buvais une petite gorgée de ma boisson, pour continuer à avoir les idées claires, mais après tout ça, j'aurais besoin de me détendre et même m'amuser, avec Finn s'il le désirait.

Même si c'était Finn qui l'avait demandé, May semblait elle aussi éprouver le besoin de clarifier à voix haute la relation qu'elle avait pu – et qu'elle pouvait – entretenir avec Koray et Willow. Finn poussa un soupir de soulagement mais ne put se retenir de lever les yeux au ciel. Tout ça pour ça ! Deux personnes qui s'étaient permis de le juger en se basant sur les dires de May et qui pourtant étaient si proches d'elle ? Sa future copine s'entourait décidément de gens bien étranges. Plus il la connaissait, plus il prenait du recul quant à sa passion autrefois dévorante pour la jeune femme. Sans s'éloigner d'elle, il constata, au regard des récents événements, que c'était mieux ainsi.

« On a toujours une seconde chance, il suffit que les deux soient prêts à faire des efforts. »

Il soupira intérieurement alors que les paroles sortaient presque mécaniquement de sa bouche. Elles étaient sincères, mais il s'en voulait quelque part de penser ainsi, parce que ça le ramenait plus de dix ans en arrière, lors de ses amourettes de lycée. Lors de sa rencontre avec Lydia. Elle et lui s'étaient donnés de multiples secondes chances car leur couple n'avait pas toujours été rose. Mais un beau jour, ils avaient cessé d'un commun accord de faire des efforts.

« Qu'est-ce qui t'a soudainement décidé à ouvrir les yeux ? »