(Kollow) Duty.

Aujourd'hui est un jour parfait pour se mettre sur la gueule.
Le cours de boxe s'achève, j'ai l'impression d'être au bout de ma vie. Ma tête ne ressemble plus à rien, avec ma queue de cheval ébouriffée et la transpiration qui me tombe jusqu'au bas du dos. Mes mains sont encore emprisonnées dans ces gants bien trop chauds, et malgré la légèreté de ma tenue de sport, j'ai l'impression d'étouffer. Les gens commencent à s'en aller, et je repère Koray, avec qui je n'ai pas eu la chance d'échanger beaucoup pendant la dernière heure. Faut dire qu'on est loin d'être dans la même catégorie. Le bonhomme doit faire trois fois mon poids, et je me doute bien qu'une mandale de sa part suffirait à me casser la nuque. Mais je m'approche de lui, toute souriante.

"Korayyyy !" J'aimerais lui sauter au cou pour lui faire un câlin, mais je m'abstient. Je crois qu'il n'est pas hyper tactile. Depuis que May m'a tourné le dos, ce doit être l'un des seuls amis que nous avions en commun et que je continue de voir. Mais je préfère ne pas penser à cette fille, la laisser de côté pour l'instant.

"On se fait un dernier match avant de rentrer ?" que je lui demande, le sourire aux lèvres, sachant très bien que je finissais toujours balancée sur le tas de tapis à l'autre bout du gymnase, mais ça me faisait rire à chaque fois. Et putain, j'avais vraiment besoin de me marrer un coup.

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Ça fait un moment que j'étais pas venu me défouler ici, au club. Je retrouve pas mal de nouvelles têtes, c'est pas plus mal, mais mes partenaires réguliers me manquent. Et ça se voit; après quelques matchs amicaux, j'suis déjà en sueur et le chignon simple que j'avais essayé de faire en arrivant n'a pas tenu.
Tout le monde finit par enfin se barrer, et j'enlève mes gants en retirant les velcros avec les dents, et me détache les cheveux en me posant dans un coin, crevé.
Avec la fatigue je commençe à penser à May, comme toujours. Je devrais pourtant laisser tomber mais je n'arrive pas à me la sortir de la tête. Je souris seul en me disant que j'agissais comme après le départ de Zoé.
Quel con je fais sérieux. J'entends mon nom crié par une voix familière et relève la tête, surpris. Et je reconnais Willow.
« Willooow comment tu vas? J'savais pas que tu venais encore ici, ça me fait plaisir de te voir! Qu'est-ce que tu deviens?»

Je dois avoir une putain de sale tête, mais je suis content de la voir. May a beau être notre seule amie en commun, j'apprécie Willow parce qu'elle me faisait rire, qu'elle avait une énergie communicative et parce qu'elle boxait bien. Ou en tout cas elle essayait.
Je me lève l'air motivé et remets mes gants. Flemme de me rattacher les cheveux.
« Alors, je compte sur toi pour ne pas finir en "Il faut sauver Willow" cette fois, donne-moi tout ce que t'as!!»

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"Et bien tu vois, je suis là, j'ai pas lâché l'affaire." Je lui souris, l'air déterminé, en cognant mes gants l'un contre l'autre. Bon, d'accord, je ne suis pas très douée, mais je n'ai commencé la boxe que ce semestre-ci, j'ai encore bien du chemin à faire. Et je compte sur Koray pour m'aider un peu dans ce domaine là. Et quand il me fait une blague sur mes échecs successifs face à lui, je fronce les sourcils, l'air revanchard, mais les joues roses, parce qu'il a malheureusement raison. "Si ça veut dire que je finis comme une baleine échouée à chaque fois, je vais me vexer. Tu vas voir que j'ai progressé !" lui fais-je d'un petit air de défi, essayant de garder les épaules hautes.

On avance de quelques pas pour s'éloigner du bord de la salle, je dresse mes petits poings devant mon visage, le regard ancré dans le sien. J'ai du mal à ne pas penser à May en le voyant, et ça me perturbe un peu. Peut-être parce que je ne le vois quasiment qu'avec elle. Je me demande d'ailleurs s'il a de ses nouvelles... Et si elle avait osé lui raconter les derniers événements. J'avance vers lui, en conservant ma garde, marchant un peu de côté. Et d'un geste vif, j'essaie de placer quelques coups, sans oser encore le viser à la tête.

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Son air buté m'avait manqué, et me donne encore plus envie de retourner sur le ring. Je sais qu'elle a pas mal avancé malgré ce qu'elle me répète à chaque match, et j'ai beau me moquer d'elle gentiment, je pense qu'elle pourrait sérieusement me mettre à terre un de ces quatre. Elle a presque l'air vraiment vexé cette fois, et je hausse les sourcils. Elle sait que je la taquine, et mine de rien, je sais que ça la motive.
« Je compte sur toi pour me mettre au tapis alors! Si t'y arrives pas, ton nouveau surnom sera Willy à partir d'aujourd'hui!»

On place tous les deux nos gants à la hauteur de nos yeux, et elle s'élance la première, en me jetant quelques crochets que j'évite ou pare assez rapidement. Je lui montre ses jambes du menton un sourire aux lèvres, histoire de lui rappeler que plus stable, ses crochets seront plus puissants.
« Et pense à un truc qui t'énerve!»

Conseil inutile, elle a comme un éclat de colère dans les yeux, et je me demande si May a quelque chose à voir là-dedans. J'ai pas eu de contact direct avec cette dernière depuis un moment, et je me demande comment elle va.
« Au fait, tu as des nouvelles de May?»

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Me faire appeler par le nom d'une baleine -d'un orque, on s'en fout- pour le reste de mes jours ? Non, merci... Je suis pourtant pas bien grosse. Enfin, je sais qu'il me taquine, cherche sans doute à ce que je veuille lui en mettre une pour de vrai histoire de me motiver davantage. Ca marche un peu, à vrai dire.

Je replace mes jambes comme il me le dit, continue de donner des coups qu'il évite presque trop tranquillement. Un truc qui m'énerve ? Je suis déjà énervée. Si tu savais. Mais je serre les dents, me donne davantage, avance un peu sur lui alors qu'il pare toujours mes tentatives.

Quand il prononce le nom de May, je sens la colère qui monte d'un coup. Mon regard s'assombrit, mon poing percute son nez, sans que je ne sente le coup partir. Je mets une seconde à reconnecter à la réalité, et mon regard surpris s'arrête sur lui. Je reste muette, le souffle coupé, je m'en veux de l'avoir frappé alors que c'était finalement bien le but de tout ce manège.

"Désolée..." En fait, j'ai juste peur qu'il le prenne mal et m'en retourne une. Je le sais patient, mais peut-être pas au point de se prendre des coups sans rien dire.

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J'me prends son crochet de plein fouet et titube une seconde. Puis je me penche en avant et ressens une douleur aiguë dans le nez. Je retire mon gant droit d'un geste rageur et me tâte l'arrête du nez doucement. Il n'est pas cassé, mais je sens qu'il va enfler. Apparemment parler de May a a marché. J'essaie de ne pas me rappeler ce qu'elle m'a raconté sur Willow et elle et Professeur fils de pute mais ça finit tout de même par revenir.
« Je vais bien t'inquiète. »

Je me demande si May lui a parlé de mes sentiments pour elle. Si c'est le cas, elle doit bien se foutre de moi intérieurement, et peut-être même que ce crochet était carrément voulu. Je relève la tête et croise son regard que j'évite immédiatement. Non elle est trop honnête pour ça. Je crois. Et puis c'est moi qui n'arrête pas de lui rabâcher de me frapper, et c'est ce qu'elle a fait au final. J'hésite à aborder le sujet et finit par rire d'un air désabusé. À quoi bon, j'en ai parlé avec May, ça devrait suffire.
« J'ai ravivé de mauvais souvenirs, c'est ça? La dernière fois que je l'ai eu ça a été assez... Triste, on va dire ça comme ça.» Je réponds en remettant mon gant et en relevant les poings.

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J'me sens gênée, vraiment. J'aime bien Koray, j'ai pas envie qu'il devienne mon défouloir. Pas comme ça en tout cas. Rien de ce qu'il a pu se passer avec May n'est de sa faute, même si j'ignore ce qu'il y a vraiment entre ces deux là. A part le fait qu'ils sont amis de longue date, ils pourraient bien avoir couché ensemble que je ne serais pas au courant.

"C'est ça..." Un mauvais souvenir, effectivement. Pas si loin que ça, malheureusement. Et puis je tique, reprenant ma garde à mon tour. Je n'ai aucune idée de ce dont May a bien pu lui parler. Il est peut-être au courant de tout, de mes sentiments pour elle, et de ce qui s'en était suivi. Je me mords la lèvre, hésitant à chercher plus loin. Mais dans un sens, le combat prend tout son sens. J'essaie de placer un nouveau coup, mais il le pare, un peu plus fermement qu'avant.

"Est-ce qu'elle t'a parlé de moi ?" Je sais, ça fait putainement égocentrique, mais j'ai envie de savoir si pour lui aussi, je ne suis plus que la bisexuelle en manque d'amour qui s'est fait jeter comme un pauvre torchon sale. Mon regard se fait un peu plus concerné, inquiet, mais je continue à essayer de le frapper, avec ceci dit un peu moins de conviction.

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Ses coups se font moins confiants et je les esquive facilement. Je me calme petit à petit et me reconcentre sur les coups à envoyer. Ce serait trop facile d'accuser tout le monde. Et puis tant pis. Je m'inquiétais pour May, mais ils sont tous responsables de leurs actes, je n'ai pas à m'en mêler. Je m'apprête à lui répondre quand une alarme stridente nous vrille les oreilles. On s'éloigne l'un de l'autre et on retire nos gants. Ça doit être l'autre con qui fume dans l'escaliers de secours qui a dû la déclencher, encore.
Les Sprinklers se déclenchent et on a vite fait d'être trempés jusqu'aux os. J'adresse un sourire désolé à Willow et on se dépêche d'atteindre les portes de la grande salle. On est apparemment voués à ne pas aborder le sujet May. Peu importe, je suis crevé et revenir sur mes sentiments est la dernière chose que j'ai envie de faire maintenant. Et mon nez commence à gonfler pour de bon, façon clown. J'essaie d'ouvrir la porte, sans succès. Fermée. What? Je veux bien admettre que les rings sont éloignés les uns des autres mais ils ont osé fermer la salle sans remarquer qu'on était encore dedans?
Je regarde Willow, trempée elle aussi et essaie de couvrir le son de l'alarme de ma voix.
« Parfait! Willow la Baleine et Koray le clown, on a l'air fins comme ça.»

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Une alarme stridente vient d'un coup couvrir le son de sa voix, et je sens la frustration monter en flèche. Bordel, j'ai vraiment envie d'entendre ce qu'il a à me dire ! Je sursaute quand je sens des gouttes d'eau commencer à tomber du plafond, finalement en énormes trombes de pluie. Quelqu'un vient de déclencher l'alarme incendie, et je sais déjà que si je le retrouve, je lui arrache la tête.

On arrive devant la porte, mais Koray me fait rapidement comprendre qu'elle ne s'ouvrira pas. Je passe une main sur mon front pour en dégager les cheveux trempés, dans un soupire de désespoir. Je souris tout de même nerveusement à sa remarque, alors qu'il hurle presque pour se faire entendre. C'est vrai que je n'ai pas raté son nez, et je m'en mords la lèvre de culpabilité. On ne devrait plus parler de May et des autres, apparemment ça porte la poisse.

Je repère une fenêtre, un peu trop haute même pour lui, mais me dit qu'on aurait intérêt à tenter notre chance tout de même. J'ai pas envie de moisir ici cette nuit. Je le prends par le bras pour l’entraîner avec moi jusqu'à elle. Ca ne sert à rien de parler : il ne m'entendrait pas. Mais je la lui montre du doigt, et sans vraiment lui demander son avis, commence à lui grimper sur le dos pour tenter de l'atteindre.

(Invité)

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