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J’avais été retrouvée… Enfin ! La fin de ce cauchemar glauque, la fin de cette tragédie, la fin de la torture. Quand j’avais entendu la voix à peine plus stressée que d’habitude de Ghost qui demandais à tout le monde de quitter les lieux car la planque avait été découverte, j’avais eu peur qu’il ne m’emmenât. Or, il se contenta d’effleurer ma joue de ses doigts froids et de me susurrer à l’oreille que je n’étais plus qu’un poids mort. Sur ces mots, j’avais senti la morsure du fer qui me déchirait la peau. J’avais hurlé, mais personne ne m’avait aidé. On m’avait enlevé mon bandeau après m’avoir lancé dans un conteneur plein de déchets. J’avais été consciente de A à Z. Plus par instinct que par réelle réflexion, j’avais exercé une pression sur la blessure de mon ventre qui saignait abondement. Les sirènes ne tardèrent pas à retentir, et je criais pour qu’il me découvrît. Ce fut seulement lorsque l’ambulance m’emmena ailleurs que je perdis plus ou moins connaissance. Il me semblait avoir entendu quelque chose à propos d’un somnifère, mais je doutais que les pompiers puissent en administrer.
Je m’étais réveillée allongée dans un lit, un bras immobilisé par une attelle, une minerve autour du cou, des capteurs branchés tellement de partout qu’on aurait pu dire que j’étais un gruyère et une impossibilité complète de bouger. Quand un médecin vint me voir, il m’expliqua mon état. J’avais trois côtes fêlées, quatre cassées. La colonne n’avait été évitée que par miracle. Ils m’avaient trouvée l’estomac entièrement vide (je le savais déjà, ça…) et je souffrais de sévère déshydratation. Les contusions sur mes poignets et mes chevilles dues aux liens étaient bénignes et s’en iraient rapidement. En revanche, la plaie ouverte de mon abdomen avait nécessité toute leur attention.
-Le bébé… avais-je alors demandé sans aucun espoir.
Le médecin secoua négativement la tête. Je le savais pourtant. Mais le fait que ce soit officiel m’arracha un torrent de larmes. Il aurait dû vivre, il aurait eu un père aimant et une mère toujours là pour lui ! Mais le destin en avait décidé autrement… Que peut-on contre ça ? J’avais alors congédié les médecins, et je murai dans le silence. Je ne dormais plus, car derrière mes paupières closes se cachaient le fantôme du nourrisson mort par ma faute. Je ne mangeais plus, car plus rien n’avait de saveur. Ce n’était pas pour m’affamer d’avantage, mais c’était comme lors des sinusites : notre nez bouché ne permettait plus de connaître le goût des aliments. Le bruit des capteurs me donnait mal au crâne, et j’avais commencé à tout arracher. Maintenant, les sondes étaient placées de telle sorte que je ne pouvais tirer dessus avec mes mains. Je voulais juste sortir, rien de plus… Sentir la pluie d’automne sur mon visage et qu’elle lavât toutes ces misères de ma mémoire.(Invité)