Panne d’ascenseur, on pouvait pas faire plus cliché (ESTEBAN)

Je crois bien que ce jour-là je n'aurais pas dû me lever pour aller en cours, surtout pour me retrouver coincée dans un ascenseur. Mais laissez-moi vous expliquer le début de ma journée, genre tout s'passait bien, pas le moindre soucis... Levée à 8 heures puisque j'avais cours dans deux heures, petit déjeuner habituel, deux tranches de pain avec un peu de confiture, un café histoire d'être bien réveillée puis hop à la douche. Bref j'étais prête à temps et c'est à pieds que j'me suis rendue au campus, habitant à côté. Le début des cours s'est bien déroulé, j'prenais des notes, tout ça tout ça. Jusqu'à la pause de midi. Et qui dit pause de midi, dit, direction la cafétéria du campus, peut-être pour y retrouver des amis, ou bien manger dans mon coin. J'étais au quatrième étage de l'université, et flemme de prendre les escaliers. Du coup j'appelais l'ascenseur, et attendais qu'il arrive. Voilà, tout se passait bien. Pour l'instant.

J'ai beau aimé Harvard, monter les escaliers chaque jour est loin de faire parti de mes petits plaisirs de la journée, alors je n'ai pas vraiment honte de dire que je suis un habitué des ascenseurs. Je n'ai jamais eu de problème avec ça, et je serais près à me casser une jambe si on m'interdisait l'accès. J'ai presque l'impression de faire autant de sport que ceux en club, alors que je suis juste en économie et que les salles d'économies se trouvent -forcément- aux derniers étages. Pas besoin de faire du sport pour entretenir un corps de rêve, il suffit de bien choisir ses études.

- Retiens l’ascenseur !

J'ai accéléré mes pas, juste de quoi arriver au moment où les portes se sont refermées. J'ai mis quelques secondes à émerger, le temps de reprendre mon souffle, de réaliser que je n'étais pas mort écrabouillé et que les cafés que j'avais acheté dans le but de rester éveillé en cours d'éco ne s'était pas renversé.

- Oh salut May.

Je l'aime bien May. Je crois. En tout cas assez pour supporter sa présence dans -mon?- ascenseur avec le sourire. Jusqu'à ce que je réalise que nous aurions déjà dû arrivé à l'étage du dessus et que surtout, nous n'avions absolument pas bougé. Alors forcément, je me suis retourné vers elle.

- .. qu'est-ce que t'as fait ?

J'étais dans l'ascenseur, hop tranquille, j'aurais pas à le partager avec une autre personne, sauf que avant que les portes ne se ferment, une voix me demandais de retenir l'ascenseur. J'avais pas trop le choix, du coup, hop je calais rapidement mon pied pour éviter que les portes ne se referment complètement. Et c'est un Esteban essoufflé qui était à côté de moi dans l'ascenseur.
"Salut." que j'lui sortais, un sourire aux lèvres. J'crois qu'il m'apprécie bien, mais ça s'arrête là, lui et moi on a jamais vraiment discuté en fait. Un nouveau bizut chez les bleus il me semble. Puis l'ascenseur s'arrête, panique pas générale, surtout qu'Esteban pense que j'ai fait quelque chose. Ce n'est pas le cas et je lui lance un regard complètement surprise.

"J'ai rien fait ! Attends c'est quoi cette blague encore ? Il est où le bouton pour demander de l'aide ?" Si je paniquais ? Ouais, j'suis pas fan d'rester enfermée dans ce genre d'endroit.

J'ai lâché un rire, mais un rire nerveux, pas du genre à me rassurer ni à rassurer les gens autour de moi, et certainement pas May. Je ne suis pas un habitué des scénarios catastrophe, mais le fait de piloter des avions m'a appris à garder mon sang froid, ou du moins, à rester assez calme pour ne pas me mettre à hurler, pleurer, sauter dans ascenseur.

- Respire. M'oblige pas à t’assommer.

Et finalement c'est moi qui me retrouve à inspirer/expirer dans le but de me calmer. Je suis pas claustrophobe, mais être enfermé comme ça, c'est pas mon truc.

- Pousse toi, je vais regarder, ça doit être un bouton jaune.

Je lui ai tendu mon sachet de café pour qu'elle le tienne pendant que je vérifiais que le bouton était bien là. Et il était bien là ce bouton, alors j'ai appuyé. Une fois. Deux fois. Assez de fois pour me rendre compte que rien ne se passer.

- Oh c'est pas vrai..

Et en plus il me donnait des ordres, c'était l'hôpital qui se fout de la charité là... Et il m’assommerait si je ne me calmais pas...eh bah... ça promettait tiens... Si j'avais su je n'aurais pas retenu les portes pour lui, ah ça non... Il me demandait de me pousser, carrément pour vérifier si il y avait bien le bouton d'appel pour les urgences, mais au bout de plusieurs tentatives, toujours pas de réponses... Et il ne me rassurait pas quand il me sortit son "c'est pas vrai..."

"Quoi ? Qu'est ce qu'il se passe encore ? T'as pété le bouton avec tes mains d'homme ou quoi ?" que je lui demandais, encore plus inquiète qu'il y a cinq secondes plus tôt...

J'ai retenté d'appuyer sur le bouton encore quelques dizaines de fois histoire d'être certain qu'il n'y ai ni musique ni petite voix nous annonçant que notre appel à l'aide avait été pris en compte et qu'on allait être secouru dans les minutes à suivre.

- Mes mains d'hommes ont pas pour habitude d'appuyer sur des boutons..

J'ai laissé la phrase en suspend, pas certain qu'elle ait vraiment envie de savoir ce que font habituellement mes mains d'hommes. Pas que ça me dérangerait, mais l'ascenseur ne fait pas vraiment parti de trip à moi. Je préfère le classique.

- T'as du réseau ? On va commencer par ça peut-être avant d'hurler à la mort ?

J'ai pas pris mon portable avec moi mais j'ai mon ordinateur. Je me suis assis au sol -pas certain de la propreté cependant mais situation d'urgence oblige-. Mes mains d'homme ont essayé de se connecter aux réseaux de la fac, mais impossible, pas de détection. J'ai laissé échappé un sifflement de désespoir en relevant les yeux vers May.

Je n'aimais pas être enfermée dans un ascenseur, la dernière fois que ça m'était arrivée, je m'étais évanouie à cause d'une crise de panique, et c'était finalement les pompiers qui étaient venus me secourir. Bonjour la honte. Je le regardais pianoter sur son pc portable, mais apparemment vu ses réactions, il n'avait pas de réseau. Moi si j'en avais ? Je cherchais mon portable dans mon sac, et l'allumais... Pas de signal. Je faisais non de la tête.

"Okay, on va mourir ici... J'aurais jamais dû retenir les portes, si t'étais pas entré dans l'ascenseur, j'me serais pas retrouvée coincée ici !" fis-je désespérée alors qu'il n'avait rien fait. Je m'appuyais contre la paroi de l'ascenseur, soupirais, et finalement me laissais glisser le long de la paroi pour me retrouver à la même hauteur qu'Esteban. Puis je calais mon visage entre mes mains. J'pleurais pas. Pas encore. Putain de journée.

Je n'ai jamais été très doué pour rassurer les gens. Garder mon sang-froid, ça va, je gère, obliger les autres à garder le leur, ça, c'est moins évident. J'ai rangé mon pc portable en passant une main dans mes cheveux avant de reporter mon attention sur May.

- On va survivre. J'ai du café. Tu veux du café ?

Je l'ai regardé deux secondes, juste le temps de réalisé que le café, c'est pas le truc qui va l'aider à garder son sang-froid et à ne pas pleurer.

- Nan, tu veux pas de café.

Autant décidé pour elle, c'est moi qui vais la supporter en suite.
Mais y a pas à s’inquiéter. L'ascenseur est grand, on a une assez grosse réserve d'oxygène. En plus, on est pas monté, donc on est au niveau d'une sortie et pas à vingt-mètre dans le vide. Je crois. J'espère. Parce que si on se retrouve comme dans les films catastrophe où les cables lachent.. J'aime bien May, mais c'est pas spécialement pour ça que je souhaite mourir en sa compagnie.

- Y a une banane dans le sac si non ..

Sans rire, j'ai de quoi survivre pour dix jours.

Et l'autre andouille qui m'sortait qu'on allait s'en sortir, alors que moi je n'y croyais déjà plus, mais je savais que si je commençais à paniquer, j'aurais encore le droit à la sortie en civière par les pompiers. Et que j'allais encore me taper la honte. Puis il me demandait si je voulais du café, non j'en voulais pas de son café... "Une banane ? T'es sérieux ? Comment ça va de paire avec ton prénom... Estebanane !" que je sortais sans vraiment m'en rendre compte, c'était sorti tout seul et pour le coup j'me sentais un peu conne. "Euh...désolée, c'est sorti tout seul, tout ça tout ça... C'est à cause du stress...je crois. Mais j'veux bien ta banane." Et merde...groooos lapsus.