Les géants guerriers celtes (ou pas) [Pv Kanvaël]

D'accord, huit heures du soir, c'est pas vraiment un horaire sain pour aller prendre l'air m'enfin. Il se trouve que tout à fait par hasard, j'avais dans l'idée ce soir de me diriger vers un endroit où ce mec se trouvait souvent. Ce mec, c'était un garçon qui m'observait. J'me faisais peut-être des idées mais ça faisait un moment que je le remarquais. On peut pas dire qu'Harvard est tout petit. C'était quand même pas possible que je le croise aussi souvent. J'avais tout à fait par hasard mis une robe courte noire et mes ballerines. Dans la semi-obscurité, on devinait à peine ma silhouette. Il y avait très peu de chance que je réussisse du premier coup ce que j'avais l'intention de faire mais je m'étais préparée à l'avance. Ça faisait une semaine que je passais très précisément par là, très précisément à cette heure là... mais dans l'autre sens. En fait, j'étais pas très sure de moi mais il m'avait sembler voir plus souvent la silhouette de ce garçon depuis l'annonce du bal. Au début, mon esprit tordu et très adepte des théories conspirationnistes avait bien sûr soupçonner ma sœur d'envoyer des espions après moi... Mais après réflexion, des théories plus rationnelles ne pouvaient pas être totalement écartées.
Au détour d'un bâtiment, j'ai eus donc l'extrême joie d'apercevoir sa silhouette. Il semblait être là comme il aurait pu être ailleurs, ne rien attendre ou patienter. Aller savoir. J'arrivais silencieusement dans son dos et arborant mon plus grand sourire, je lui adressai la parole.

« Tu cherches quelqu'un ? »

J’espérais qu'il était pas cardiaque... J'avais essayer de mettre de la douceur dans ma question pour éviter de le voir fuir et pouvoir enfin savoir si je devenais folle ou pas.

Le bal. Le fameux bal de fin d'année où les personnes populaires s'exhibaient, de beaux vêtements, bien coiffés, de beaux pas de danses, et, bien entendu, une belle cavalière, frimant de leur savoir dans le jeu de la séduction, ainsi que de leur reussite dans leur entreprise. Et les autres, seuls, ne souffraient que plus de leur solitudes. Kanvaël lui, faisait bien entendu parti de la seconde catégorie. Il était plutôt bel homme, et la boxe lui avait bâti un corps que beaucoup envieraient, mais, malheureusement pour lui, une timidité maladivement excessive habitait en lui. Si bien que, discuter avec une fille était terriblement compliqué pour lui, bien que paradoxalement, les conversations avec Esfir ne lui posaient absolument aucun problème, pourtant, c'était bel et bien une fille, et plus que jolie en plus de cela.

De fait, les deux premiers bals vécus par l'irlandais s'étaient plutôt mal déroulés, se retrouvant seul, deux années d'affilées, sujet à la moquerie de certains Winthrop. Winthrop qui, précisons-le, ont prit des coups dans le feutré. Personne ne le soupçonna jamais. Certes, le jeune homme était quelqu'un de serviable, de plus que gentil, mais, il ne supportait pas que l'on se moque de qui que se soit, et, sur ce sujet là,le jeune homme était des plus sensible, souffrant grandement de ce manque d'affection. Souffrant de voir d'autres gens en couples, et heureux de l'être. Souffrant de ne pas reussir à en faire autant.

Cependant ... Cette année là, la troisième, le boxeur s'était juré que cela changerait. Il y avait une fille, une certaine Alexie, sublime jeune irlandaise qui attirait depuis maintenant trois ans son regard, sans que celle-ci ne daigne le regarder, mais, son coeur et son cerveau lui criaient d'aller la voir. Dans l'esprit du sportif, personne d'autre ne pouvait être sa cavalière, seule cette jeune femme pourrait le rendre heureux à ses bras.

Cela pourrait sembler effrayant, mais, il avait remarqué les habitudes de cette demoiselle, et, avait remarqué des passages au même endroit, aux mêmes horraires, quasiment tout les jours. Ce fameux bal approchant à grand pas, il s'était juré d'essayer de lui parler, en avoir le coeur net une fois pour toute, savoir si oui ou non il devait s'accrocher à l'espoir que la jeune femme veuille bien de lui.

Dans la pénombre, il attendait son passage quotidien, complètement stressé par ce qu'il avait à faire, quand soudain ... Des bruits de pas se firent entendre dans son dos, et s'arrêtèrent pile dans son dos. Par réflexe, Kanvaël se retourna en armant un crochet, mais, alors qu'il se retournait dans un mouvement fluide, la jolie voix de sa belle se fit entendre, et, son visage s'afficha, resplendissant devant lui. Le poing s'arrêta à quelques millimètres de sa joue, et, le jeune homme resta bouche bée devant la question qui lui était posée. Qui, en fait, lui demandait juste s'il cherchait quelqu'un. Le jeune homme resta bloqué quelques instants à la contempler. Magnifique.

Quelques instants plus tard, il reprit ses esprits, retirant son poing, pour s'excuser.

L'irlandais se placa comme il faut devant elle en se grattant l'oreille d'un air nerveux, idiot même.

Se rendant compte de la débilité profonde de la scène, il se stopa net, inspirant et expirant un grand coup, tentant de se calmer, et reprendre en essayant de pas passer pou un abruti, une fois de plus.

J'avais naturellement craint de lui faire peur, de le faire fuir ou même de lui provoquer une attaque mais certainement pas de me prendre un coup. Pourtant l'inconnu avait l'air singulièrement nerveux. Son poing s'arrêta à quelques centimètres de mon visage impassible ce qui me fit hausser un sourcil. Commença alors le bal des syllabes. En bégayant pitoyablement il tenta de s'excuser puis de se justifier en répondant à ma question. Je devais pas avoir eut tord de beaucoup mais tout de même : qui est si timide qu'il ne puisse pas faire une phrase mais parvient à mettre des droites au gens avant de dire bonjour ? Il parvint au prix d'une énorme bouffée d'air à expliquer maladroitement qu'il essayait de me parler. Ce qui me fit franchement sourire cette fois. D'abord parce que ça voulait dire que j'avais raison et ensuite parce que ça voulait dire que j'avais raison.

« Alexie, enchantée ? Et toi? »

Et sans lui laisser le temps de répondre, je repris mon air enjoué.

« Tu essaie souvent de parler aux gens en les frappant après les avoir suivis longtemps ? Nan parce que je suis pas susceptible mais d'aucuns pourraient prendre ça pour du harcèlement... particulièrement la partie où tu met ton poing dans la tête des gens. Enfin j'ai compris que j'étais pas visée par la dernière partie mais quand même. Tu t'attendais à voir apparaître qui si c'est pas indiscret? »

Comme si j'en étais à ça près au niveau de l'indiscrétion. D'accord il semblait m'observer mais je venais de toute évidence de lui forcer la main. S'il disait vouloir me parler, je ne savais pas trop que croire. C'était peut-être vrai où peut-être que le manège aurait encore durer longtemps.

Tout le monde savait que Kanvaël n'était pas doué avec les filles, mais, n'importe qui l'aurait vu par cette belle soirée, se serait grandement payé sa tronche. Mais, il faut le comprendre le petit, il a vécu dans un petit village où il y avait très peu de filles de son âges, celles-ci, pour couronner le tout était hautaine, stupides, et assez blessantes dans leur agissements, en plus de ne pas être particulièrement agréables à l'oeil, le genre de personne que l'on aime pas particulièrement côtoyer, de fait, l'irlandais ne grandit pas vraiment en apprenant comment faire, et n'eut donc aucune petite-amie jusquà lors. Ce qui explique un peu tout ça.

Mais, pour son plus grand bonheur, la belle qui lui avait tapé dans l'oeil - au sens figuré j'entends- ne se moqua pas de lui, étrangement d'ailleurs, elle ne fit que grandement sourire. La pénombre empêcha au boxeur de distinguer si cela était un sourire enjoué, ou moqueur, mais, l'espoir le faisait pencher pour la première possibilité.

Sa belle se présenta sous le prénom d'Alexie, lui demandant au passage comment il s'appelait, mais, sans lui laisser le temps, elle enchaîna sur une autre question, demandant cette fois, si cela lui prennait souvent de parler aux gens en les frappants après les avoir suivis longtemps. Immaginez la honte qui venait de s'abbatre sur lui, cela faisait trois ans maintenant qu'il l'observait de loin, et, elle l'avait remarqué, le prennait-elle pour un pervers? Un détraqué? Ou pire encore? Le boxeur ne savait pas où se mettre. Alexie rajouta qu'elle n'était pas succeptible, mais certains pourraient prendre cela pour du harcèlement, nottament la partie du poing dans le visage, même si, elle n'était sûrement pas visée. Puis, avec un air enjoué, elle demanda qui il attendant voir débarquer.

C'est ainsi que, la difficulté augmenta d'un cran, à sa timidité, il fallait ajouter la honte.

"Je ... Je suis Kan... Kanvaël, en ... Enchanté. Et ... Je .. Je m'excuse de ... De nouveau. Vous ... Vous m'avez surpris, je ... J'ai l'habitude de m'atirrer des ennuis, d... Donc ..."

Le jeune homme tenta de reprendre sa respiration pour continuer sur sa lancé, ce qu'il allait dire était bien plus difficile.

"Je ... Ne voulais pas ... Pas vous mettre mal à l'aise, dé-désolé ... Je .. Je ... Je vais être f.. Franc, ça fait ... Longtemps que vous m'.... m'a... M'avez tapé dans l'oeil, pas autant que ce que j'aurais pu faire mais bon ..."

Il rigola un instant nerveusement, avant de reprendre un peu plus calme.

Il y était enfin arrivé mais, la rougeur s'était bel et bien installé sur ses joues, et il ne savait pas où se mettre, il pensait qu'après trois longues années d'espoirs, tout cela était brisé, alors que, la belle ne lui avait rien dit. La seule chose que Kanvaël reussissait à faire était de regarder le sol, incapable de la fixer dans les yeux.

J'avais réussi à arracher un prénom, je ne sais trop comment. Il semblait que d'une seule syllabe, il soit passé à deux entre les hésitations... en tout cas juste assez pour arriver à prononcer son prénom : Kanvaël. C'était irlandais et très joli mais je ne pouvais pas savoir s'il avait un accent avec ce bégaiement et je savais d'expérience que beaucoup d'américains portaient encore des noms irlandais "pour ne pas oublier la mère patrie" ou un truc du genre. On trouvait cependant beaucoup de nationalités différentes à Harvard... Aucun moyen donc de déterminer de quel camp il venait.
J'étais toute à mes réflexions toponymiques quand il semble que Kanvaël eut dans l'idée de m'avouer quelque chose. Je me mordis la lèvre pour ne pas rire et le traumatiser à vie. C'était pas tant l'aveu qui me faisait rire que la possibilité qu'il ai pu me mettre mal à l'aise. A la fin de sa déclaration, j'étais juste un peu perplexe et j'avais beau ne pas voir la couleur de ses joues dans le noir, je m'en doutais un peu.

« C'est une invitation ? Non parce que je dirai bien oui mais je suis pas sure d'avoir distingué une question. »

Voilà que je le suggérai de recommencer maintenant ! Nan mais quelle idée ! D'accord personne n'avait encore suggéré de m'accompagner mais j'espérais toujours trouvé une jolie fille pour m'occuper pendant la soirée. Kanvaël avait beau être très mignon, j'avais quelques doutes sur sa conversation. C'était probablement l'éventualité qu'il soit irlandais qui m'empêchait de le planter là. Et puis quoi... j'aurai pu continuer à l'ignorer aussi... ça ne se faisait pas de provoquer les gens pour leur tourner le dos après. Si seulement il pouvait faire une phrase entière... quand me vint l'idée que c'était peut-être pas sa faute...

« Dis moi, tu n'as pas de problème d'élocution grave au moins ? Parce qu'il paraît que chanter c'est très pratique pour compenser ça !  »

Dans le but d'élucider deux mystères à la fois, je me mis donc à chanter... en irlandais...


D'accord une comptine sur un petit bateau, j'aurai pu trouver mieux mais en fait je parlais assez peu l'irlandais et c'était la seule chanson qui me venait à l'esprit. Et puis elle était souvent enseignée à l'école au moins. Il y avait plus de chances que Kanvaël la connaisse.
Mon choix de chanson pouvait peut-être faire débat mais certainement pas ma voie d'or qui chantait assez fort une chanson irlandaise la nuit, entre des bâtiments glorieux qui faisaient résonner ma voix au vent. Peut-être que quand j'aurai eut l'air plus ridicule que lui, il arrêterai de bégayer.

La belle Alexie semblait d'humeur joueuse, semblant vouloir s'amuser de la timidité, amusée par tout cela. Ses intentions étaient-elles bonnes? Ou bien, n'était-elle en fait qu'une de ses femmes qui se plaisent à détruire les hommes? Il était bien trop tôt pour le dire, et, lui, de son côté, optimiste sur bien des choses n'y avait même pas pensé. A vrai dire, lorsqu'elle lui demanda si c'était une proposition, rajoutant qu'elle n'était pas sûre d'avoir distingué si c'était bel et bien une question, un espoir enflamma son coeur, et, un sourire agréable finit par se dessiner sur son visage. Même s'il souriait, cela n'enleva rien à sa nervosité.

Il joignit ses deux mains pour se les frotter l'une contre l'autre nerveusement, prennant son souffle avant de la regarder droit dans les yeux, pensant à une très belle citation "Il suffit de 20 secondes de courage, ou d'audace, pour changer ta vie à jamais." ou du moins, cela y ressemblait grandement. Le jeune homme inspira un grand coup avant d'entamer sa demande.

Il l'avait fait, enfin. Certes, il pensait qu'il allait se prendre un bon gros rateau, mais, cette barrière qu'il voyait depuis si longtemps face à lui venait d'être franchie.

Curieusement, la jeune femme lui demanda s'il n'avait pas de problèmes d'élocutions graves, que si c'était le cas, il fallait chanter, que c'était le meilleur remède à cela. C'est ainsi que, la belle demoiselle se mit à chanter, voulant sans doutes aider son interlocuteur, et, elle ne choisit pas n'importe quelle chanson. C'était une petite contine, chantée en gaëlique irlandais, que l'on apprenait dans les écoles. Ainsi donc, elle aussi était irlandaise. La belle avait une voix divine, si bien qu'il en resta scotché. Sans doutes intentionellement, Alexie arrêta son chant au premier couplet. C'était son tour. Chanter ne lui avait jamais posé problème, il avait toujours aimé ça, même s'il n'était pas des plus doués, sa voix était agréable, sans plus. Comme bien souvent cette soirée-là, Kanvaël inspira longuement, dans l'espoir de se calmer, puis, en posant une main sur son coeur, il s'élança dans la chanson à son tour.

Il s'arrêta à la fin du refrain pour rigoler légèrement, avant de répondre à la jeune femme.

Il finit avec à peine moins de difficulté par me reposer la question fatidique et un instant l'idée de dire non me traversa l'esprit. Mais j'étais d'excellente humeur.

« D'accord... si t'arrêtes de me vouvoyer... »

Oui parce que bon j'étais pas si vieille à la fin. Il était bien cérémonieux pour son âge. Mais peut-être qu'il était bien plus vieux qu'il en avait l'air. Peut-être même qu'il avait 200 ans et avait trouvé une potion de jeunesse éternelles... L'idée qu'un vieux monsieur de 200 ans puisse encore bégayer devant une fille mit fin à ma réflexion délirante.
Il semblait pouvoir chanter sans bégayer en fin de compte puisqu'il reprit la suite de la comptine avec pas mal d'assurance. J'esquissais un sourire. Il chantait bien et s'il avait apparemment une peur maladive d'une fille, se ridiculiser dans le noir lui importait peu. Kanvaël se ré-excusa une énième fois et me demanda si j'étais irlandaise.

« Arrêtes de t'excuser. Oui je suis irlandaise. Toi aussi apparemment. A moins que tu sois un de ces fans obscurs des comptines irlandaises... Mon dieu, nous devrions monter un club !  »

Le but était de le faire sourire mais j'avais conscience d'avoir peu de chance de parvenir à mes fins. Il n'aurait pas eut l'air plus gênée si j'avais été nue devant lui... Ce que je songeais un moment à faire pour lui filer une dernière crise cardiaque mais toute envie de l'achever passée, je décidai d'essayer de le faire parler à un rythme normal. Quelque chose me disait qu'au bout d'un moment, il pourrait bien oublier que j'étais une fille. Ma technique pour ça... inonder quelqu'un de questions sans le laisser en placer une. Avouez que c'est pratique pour faire parler.

« Tu viens de quel coin d'Irlande ? Et tu chantes plutôt bien, tu connais d'autres chansons celtiques ? Au fait, je crois pas me souvenir que tu m'ai dis à qui tu t'attendais pour lui coller un crochet tout à l'heure... Je me demande bien comment tu sais filer des crochets comme ça d'ailleurs... »