The death gonna save us Հ Haytamée

Le silence, rien que le silence, c’est tout ce qui m’unissait à Salomée pour l’instant. Mon regard perdu sur la vue que m’offrait le hublot, je n’avais pas décroché un mot depuis qu’elle m’avait arraché à Harvard. Elle était près de moi, occupée à m’ignorer comme elle savait si bien le faire, et tout ça pour quoi ? Pour aller voir notre père sur son lit de mort. Jamais je n’aurais cru faire quelque chose de semblable en sa compagnie. À ce moment j’étais angoissé, perdu, j’aurais tout fait pour ne pas y aller car je détestais toujours autant mon père. Mon regard se déporta sur ma manche un peu trop remontée à mon goût. Sur mon avant-bras, de fines cicatrices. Je me déconnecte alors complètement de la vue des nuages et tire sur ma manche pour cacher une partie du désastre qu’avait commis mon père durant tant d’années. Je posais ensuite mon regard sur ma sœur, comment pouvait-elle comprendre quoi que ce soit ? Comment pouvait-elle imaginer tout ce que j’avais enduré à cause de cet homme ? Et encore je remerciais mon amnésie de m’avoir enlevé quelques souvenirs de cette torture. Je décidais alors de fermer les yeux pour essayer de passer le temps, avec un peu de chance j’arriverais à dormir et je ne penserais plus à notre futur proche. Voilà qu’une heure après Salomée me réveille, qu’on prend un taxi et qu’on arrive chez elle, dans la demeure où elle a toujours vécu, loin de moi, dans le mensonge. J’observais alors cette demeure sans un mot, essayant simplement de déchiffrer les secrets qu’elle allait pouvoir me dévoiler. J’étais là, ma valise à la main, je sentais les regards des domestiques et de sa famille m’écraser. Qui j’étais pour eux ? Personne, comme pour mon père, comme pour Salomée autrefois.

Le vide. C'est le vide total. Les mains qui s’agrippent autour de son ventre, le coeur cherchant à se stabiliser. Ca bouge trop, ça lui fait quelque chose. Quelque chose d'horrible qui lui donne envie de vomir. Un goût bizarre qui la fait pleurer. Un goût qui lui fait haïr. Un goût bizarre dans tous les cas...et ça envahi son palet. Elle regarde le ciel, si bleu, si pur...et son coeur à elle qui ne demande qu'à sauter. S'élancer pour devenir le coeur de l'océan. La petite vieille qui lance quelque chose dans l'étendue marine qui semblait plein de cauchemar et qui pourtant semble là, à cette dernière scène apporter un grand vent de liberté. Soit. Un voile blanc se lève sur ses yeux, ça lui brouille la vie et surtout la vue. Elle est faible, et ça commence à devenir un flot infernal qui ne s'arrête pas avec des mots incohérents qu'elle tente de retenir de sa bouche. Ele se rapproche de l'hublot. MAIS, c'est derrière son dos que se trouve tout un regret, l'Haytam qui se retrouve face à son démon. Elle, face à son futur. La princesse ne veut pas se retourner, ce n'est qu'une danoise rien de plus. Ou si peut-être parce que cette petite danoise se retrouvera certainement à diriger un petit monde et surtout à affronter son père. Ou plutôt leur père...bien qu'elle tente d'oublier dans quelle impasse, elle a mise son frère. Princesse n'aurait jamais dû lui dire, elle aurait dû ne pas le chercher, elle n'aurait pas dû lui infliger cette requête et pourtant, hypocrite comme elle est...elle l'a fait.

C'est lorsqu'elle ouvre réellement les yeux, c'est à dire, lorsque sa raison agisse sur son intellect, qu'elle réalise qu'elle n'est plus dans un avion, mais bel et bien chez elle...là à se faire enfiler l'une de ses plus belles robes, des domestiques qui courent de gauche à droite. Princesse a bien envie d'envoyer un message, quelque chose à quelqu'un qui la comprendrait...mais, elle ne le fait pas. Elle s'assume. Haytam est perdu lorsqu'elle revient dans sa robe au corsaire éventré et qu'en plus d'être sous l'émotion, ses mots pèsent plus lourd que le chignon exagérément élaboré par l'une de ses dames de compagnie. Elle l'observe de ses grands yeux verts...tu pourras ?...chuchote-t-elle arrivée à sa hauteur...elle le serre ensuite dans ses bras...si tu veux j'irai le voir en premier, tu viendras quand tu te sentiras prêt...

HJ : désolée pour le temps Tu m'as inspiré, t'as de la chance gros

J’ai les mains moites, mes poings se serrent et je ne cesse de faire les quatre cents pas devant ce grand escalier. Je desserre ma cravate d’un geste presque trop violent, je manque de me faire mal, de me griffer, mais peu importe car j’étouffe dans cette tenue. J’ai l’air d’un pingouin, je déteste les costumes et pourtant… C’est ce qu’on m’a obligé à mettre, moi le bâtard de la famille. Pas un mot, pas un regard, les gens d’ici sont tellement insignifiants, non c’est le contraire, c’est moi qui ne leur inspire rien du tout. Après tout je ne fais pas partie de la famille royale, non bien au contraire, je ne suis qu’une erreur de parcours que l’on peut pardonner au jeune et insouciant père de Salomée. J’avale ma salive et enfouis mes mains dans mes poches, le souffle toujours aussi coupé quoique ma cravate soit détachée. C’est dingue, j’ai l’impression d’avoir des pertes de mémoire, qu’est-ce que j’ai pu faire en arrivant ici, avant de me retrouver devant cet escalier ? Je cherche encore et encore, je fouine au fond de ma mémoire tout en ne cessant pas mon parcours, si ça contenue je vais creuser un énorme trou dans le sol à l’aide mes pieds. Je me revois devant l’immense bâtisse à observer la famille bien taillée de Salomée, c’est donc ça que j’ai raté, c’est donc ça la vie que j’aurais pu avoir ? Tout aurait été tellement différent… Je me suis ensuite introduit dans une chambre, ma sœur m’ayant désigné mon dortoir, enfin si on peut appeler comme ça. Je sens encore l’odeur épouvantable de la vielle pierre, c’est encore pire que ma chambre d’étudiant miteuse. J’ai posé les yeux sur le costume qui était sur mon lit, en l’enfilant je me suis aperçu que c’était la bonne taille, étrange mais soit, quoi de plus étrange que cette situation ? Ensuite… et bien ensuite je secoue ma tête car j’entends des talons claquer. J’observe alors ma sœur venir vers moi, la voix et le corps tremblant. « Tu… t’es superbe. » Je ne suis vraiment pas habitué à la voir dans un tel accoutrement, pas plus qu’elle d’ailleurs. « Okay… faisons ça. » Je sors ça machinalement pour éviter qu’elle ne discerne l’angoisse chez moi, même si je doute que ce soit raté. J’observe un médecin qui sort de la chambre de notre père, puis je m’approche de seulement quelques pas, la laissant s’approcher de plus près.


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