We have to be a team || Motya & Amber.

En général, la soirée s’était merveilleusement passée. J’ai dis, en général. Alors que les membres de l’équipe rentraient petit à petit au bateau, rejoindre leur cabine et leurs camarades de chambres, je restai un peu sur la plage pour ranger un peu le foutoir de l’évènement. C’était le rôle de la capitaine et co-capitaine, que voulez vous. Mais ça ne me dérangeait en rien. Au contraire, je profitais du silence pour repenser à ce soir. A Niko, à Motya, à Akira. Je crois que je ne m’étais jamais rendue compte de la colère et de la frustration du mather avant ce soir. Il s’était volontairement moqué d’un des membres de l’équipe, mais n’avait pas eu droit à beaucoup de laxisme. Tout cela avait tourné en bagarre et je n’en revenais toujours pas. N’étions-nous pas censés nous comporter en étudiants responsables ? Je me mordis les lèvres à l’idée de devoir gérer tout ce groupe. La tâche ne s’avérait soudainement bien plus compliquée. Alors que je ramassais les dernières affaires et m’apprêtais à rentrer, je remarquer une silhouette, au loin, assis au bord de l’eau. Motya n’était donc pas rentré. Je l’observai un moment, hésitant à le déranger et faillit mettre cela de côté et rentrer. Mais au dernier moment, je me dis qu’il serait peut-être préférable que je me rapproche de chacun d’entre eux pour pousser mon équipe à s’unir un peu plus durant les deux prochains mois. Je fis signe à Elia de ne pas m’attendre et rejoignis l’étudiant. « Soirée difficile, hein. » Lui dis-je, en m’installant à ses côtés.

Quelle soirée. Si les autres se sont amusés, tant mieux pour eux, mais ce n'était pas mon cas. Tous les jours je suis confronté au monde en étant différent. Mon mode de vie ne plaît pas, même si je me contente juste de vivre ma vie comme je l'entends. J'ai appris à me forger un caractère qui fait face à ce genre de type, à ce genre de con comme Akira. Mais même si je me défends, même si je tiens tête et garde la tête haute, je ne suis pas en pierre, et ses mots m'ont blessé. Je suis quelqu'un de très fermé émotionnellement parlant, et je n'ai pas l'ambition de m'ouvrir aux autres. Après la petite soirée, je décida de rester un moment sur cette plage paradisiaque pour me retrouver seul, comme j'aime le faire. De toute manière, retourner dans ma cabine signifierai retourner voir Akira. Car oui, nous partageons la même cabine, alors autant retarder le moment de nos retrouvailles. Alors dans mes pensées, assis sur le sable fin, j'entends une personne s'approcher vers moi pour finalement lancer la discussion. « Soirée difficile, hein. ». En tournant la tête, je crois reconnaître Amber, ma capitaine d'équipe. Habituellement d'un naturel méfiant envers les nouvelles rencontres, j'avais cette fois-ci décidé de ne pas être trop froid et hautain, je n'avais pas le cœur à ça. Disons que j'ai connu de meilleurs moments. Disais-je avec un léger sourire avant de replonger mes yeux dans l'horizon, pensif.

Je n’avais pas aimé l’ambiance pourrie qu’avait engendrée Akira sur la plage. Il aurait pu faire un effort, c’était notre première soirée tous ensemble après tout.  Lorsque Motya se tourna vers moi, il répliqua doucement une réponse trop vide à mon goût avant de se réintéresser  à la mer face à nous, qui laissait s’écraser ses vagues sur le sable,  en un rythme apaisant. Le jeune homme avait beau l’air d’être robuste, autant à l’extérieur qu’à l’intérieur, il avait beau donner l’impression que rien ne l’atteignait, son mal être émanait de lui, je le sentais d’ici. Et je le comprenais. Il était différent. Autant le dire franchement. Hautement efféminé, il arborait une longue chevelure d’un rose bonbon éclatant, des ongles et un maquillage plus voyants et appliqués que les miens. Et ça ne devait pas être facile à vivre, mais c’était un choix. Purement et simplement et je pensais quant à moi, qu’en choisissant ce mode de vie, il savait à quoi s’attendre et en subissait à présent les conséquences. J’étais assise en tailleur à côté de lui, sans rien dire, j’observai moi aussi l’horizon au crépuscule. C’était tellement… libérateur. Je me mordis les lèvres, pensant soudainement à Andrew et mon envie d’être à ses côtés puis le chassait de mes pensées en fermant les yeux. Motya avait besoin de quelqu’un et moi, de personne pour comprendre que les paroles du mather ne pouvaient que le blesser. « Ecoute Motya… Je suis désolée pour ce qui s’est passé ce soir, ce n’était vraiment pas le meilleur moyen de commencer ses vacances. Et je regrette sincèrement les paroles d’Akira. » Je tournai la tête vers lui, le regard grave. « Mais, essaye de ne pas prendre ça contre toi d’accord, je crois qu’il était particulièrement énervé contre moi et qu’il regrette déjà lui aussi. Je suis sûre qu’il ne pensait pas ce qu’il a dit…»Lui dis-je sans même réussir à me convaincre moi-même.  J’eu un pincement au cœur soudain, en pensant à tout ça. « Ouais, je suis responsable de ce qui est arrivé tout à l’heure, et crois moi, j’en suis vraiment désolée. »

Les yeux rivés sur l'immensité de la mer, je n'arrivais pas à ressentir que ce soit de la colère ou de la tristesse. Je crois que je préfère me ficher de ce genre d'altercation. Le fait d'être ici m'aidait à me remettre les idées en place, et je crois que ça m'apaise par la même occasion. Je sentais qu'Amber, assise près de moi, ne savais pas quoi faire, ou encore quoi dire. Ce que je comprends. Que dire pour positiver quand on voit une personne lancer autant de paroles crues en pleine face d'une autre ? Personnellement je ne sais pas. Finalement, ma capitaine d'équipe rentama la conversation de façon plus dramatique qu'elle ne l'avait fait en premier lieu. Elle s'excusa, mais je ne comprenais pas pourquoi. Je ne veux pas de ses excuses, elle n'est en rien fautive de quoi que ce soit. Si j'ai des excuses à recevoir, elles doivent venir d'Akira, et de personne d'autre. Je ne disais rien, mais elle continua, le regard désormais tourné vers moi. Je la regardais en retour, buvant ses paroles, jusqu'au moment où elle ose me dire qu'il ne pensait pas ce qu'il disait et qu'il regrette. Écoute... J'apprécie que tu essayes d'apaiser la situation, mais tu n'as pas à t'excuser à sa place, c'est à lui de le faire. Et je sais que le moindre mot qu'il ait pu dire était pensé, j'ai vu dans ses yeux cette expression "Je dis tout haut ce que les autres pensent tout bas". Mais je ne m'apitoie pas sur mon sort, ce que je suis je l'ai voulu, et ni lui ni personne ne me fera assez mal pour m'empêcher d'être moi-même et de garder la tête haute. J'ai un moral d'acier, et je n'ai jamais perdu cette fierté qui m'habite, car j'aime la personne que je suis et j'aime vivre ma vie de cette manière, et la seule chose qui m'a fait de la peine ce soir, c'est de savoir qu'Akira est Akira. Pauvre lui.

Motya rejeta mes tentatives pour calmer le jeu et apaiser la situation. Tout ce que je voulais c'était que nos vacances se passent merveilleusement bien, qu'il n'y ait de problème pour personne et que tous les membres de notre équipe arborent des souvenirs mémorables de nos deux mois passés ensemble. Je l'observai en l'écoutant, se disant assez fort pour supporter cela. J'espérai qu'il dise vrai mais savais pertinemment que parfois, les mots trouvaient des fissures où se faufiler pour atteindre le coeur. Je soupirai. On en était là, sur la plage à reparler d'Akira et de son comportement impulsif dont il aurait du nous éviter le show. Je ne pouvais pas lui assurer les excuses du mather, surtout que je savais qu'il n'en ferait rien. En fait, je ne pouvais rien faire de spécial pour lui, mis appart l'écouter, même s'il semblait ne pas avoir besoin de mon aide. "Je sais pas, j'me dis que si je ne l'avais pas autant énervé avec mes conneries, il n'aurait certainement pas réagit comme ça. Mais ça n'excuse rien, je suis d'accord." Sans le rythme des vagues s'écrasant bruyamment sur le sable, Motya et moi aurions été plongés dans un silence de mort. Je me mordais les lèvres, j'avais pas envie de mâcher mes mots. "Tu sais Motya, je veux bien croire que tu sois dur d'esprit, ça se voit rien qu'en te regardant et j'imagine ce à quoi tu dois être tous les jours confronté pour ton choix de style de vie, différent de la majorité des hommes. Mais ne me dis pas que ça ne t'atteint pas. Parce que ça finit toujours par nous rattraper et on a beau le cacher, on en souffre de toute façon." Mes mots me ramenèrent à la période où j'étais pointée du doigt à cause de mes erreurs. Encore à cette époque, je me fichais totalement de ce qu'on pouvait dire sur moi, mais aujourd'hui, j'en payais le prix. Et Akira avait été mon ami, Motya m'avait l'air bien plus sympas que ce premier avait l'air de penser et j'étais leur capitaine. Alors j'allais arranger ça, qu'ils le veuillent ou non. "Est-ce que tu veux changer de cabine, au moins ?"

Je devais l'admettre, notre capitaine était admirable. Peu de personnes prendrait ce rôle à coeur, mais elle comprenait bien qu'il fallait calmer le jeu. D'ailleurs je pense que même si elle n'avait pas été capitaine, elle aurait prit l'initiative de venir me voir malgré tout. Elle essayait tant bien que mal de défendre Akira, bien que j'ai du mal à croire qu'elle arrive à se convaincre elle-même. Tu n'as rien fait de déplacer qui ait pu agacer Akira, il a juste un putain de problème avec lui-même, et avait juste pour ambition de foutre le bordel. Je sentais de la haine dans mes propos. Je me mens à moi-même lorsque j'essaye de me convaincre que ce qui s'est passé est insignifiant et ne m'atteint pas. Mais ce qui me rassurait, c'est que Amber ressentait elle aussi que je me mentais à moi-même, et m'expliqua qu'elle comprenait ce que je pouvais vivre. Peut-être avait-elle vécu des choses similaires à celles que je vis. Je ne veux pas extérioriser. À quoi ça servirait ? Je ne veux pas être une victime sous prétexte que j'ai des cheveux roses et des talons. C'est en montrant que je suis fort d'esprit que je peux avoir la paix. Et j'avais malheureusement raison. Si jamais je suis assez faible pour montrer que les choses m'atteignent, on ne me laissera jamais tranquille. Amber me proposa alors de changer de cabine. C'est un bel exemple qui montrerait que je m’aplatis devant lui. Si quelqu'un doit quitter la cabine, c'est lui. Je ne vais pas me laisser intimider.