Please ensure Javascript is enabled for purposes of website accessibilitySera&Leonor • Les yeux sont la "parole" de l'âme
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Sera&Leonor • Les yeux sont la "parole" de l'âme

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C'est le coeur serré que je contemple la côte d'Haïti qui approche, accoudée au bastingage de bois de notre bateau. Nous allons accoster à Port-de-Paix dans quelques minutes et je me sens mal. Mal de débarquer au milieu du drame qu'à connu ce pays, haute de toute ma richesse, ma chance, mon privilège de participer à cette croisière paradisiaque. Mal de ne pouvoir rien faire pour ces pauvres gens. Car j'ai moi aussi mes propres priorités maintenant, je dois me dévouer à mon fils, mes études, ma famille, et rien d'autre. Alors malgré le malaise latent je ne compte pas me morfondre au fond de ma cabine. Et je sais que les gens d'ici ne se laissent pas abattre facilement, je me suis renseignée avant le voyage et j'ai découvert avec enthousiasme que le pays se redresse lentement de son traumatisme, le tourisme étant l'une des activités prioritaires à développer. Si seulement je pouvais faire preuve d'autant de courage... Je soupire et secoue la tête pour chasser mes idées noires. Le maître mot de cet été est : profite! Même Julian n'arrête pas de me le répéter, alors je vais l'écouter. Je relève la tête pour contempler la ville qui prend peu à peu forme dans le soleil couchant. Ce spectacle est de toute beauté et je sors immédiatement mon appareil photo de ma besace pour immortaliser la magnificence de cet instant. Le bateau se rapproche du port et finalement accoste, mes cooéquipiers euphoriques débarquent et je suis le mouvement sans trop savoir pourquoi. Julian est en sécurité dans la cabine avec sa babysitter alors je ne me fait pas de soucis pour lui. Contrairement aux pirates improvisés qui se précipitent dans les bars en quête, j'imagine, de rhum, je préfère déambuler dans les ruelles dont certaines portent encore les stigmates du séisme. Je finis par déboucher sur une place peu fréquentée où les haïtiens vivent leur quotidien sans se préoccuper de moi et cette ambiance de village en fin de soirée me fait chaud au coeur, j'oublie peu à peu ma mélancolie. J'aperçois soudain une tête brune qui ne m'ait pas inconnue. Leonor, ma camarade Dunster. Une jeune fille très appréciable si vous voulez mon avis, même si j'ai l'impression qu'elle ne me dit pas tout. J'ai cette conviction profonde qu'elle cache quelque chose de très lourd et je comprends ce sentiment. J'ai envie d'en savoir plus, sans toutefois la brusquer. Pour l'heure, elle me remarque alors je lui adresse simplement un sourire timide et un signe amical de la main. Peu de gens sur cette terre peuvent se targuer d'avoir droit à autant de sociabilité de ma part.
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Haiti. Une escale qui me refait penser à mes années de misère dans la rue en plein coeur de Mexico. Des années où j'avais 5 ans et où j'ai du apprendre à vivre ou plutôt survivre dans la rue. Pourquoi et où étaient mes parents me direz vous ? Et bien mes parents se sont faits assassinés sauvagement à la maison et heureusement pour moi, j'ai réussi à me cacher dans un placard et à échapper à une mort certaine. Mais pourquoi repenser à tout cela ? Parce que voir des enfants dans les rues d'Haiti m'y refait penser tout simplement. Je me mets à leur place et me revoit ainsi quelques années auparavant. Alors déambulant dans les ruelles, je repensais à ma vie qui aurait pu être comme ses enfants si une assistante sociale et cet homme ne m'en avait pas sortie pour m'envoyer à Albuquerque chez ma tante.Tout en marchant, je remarque une jeune femme qui semblait nostalgique comme moi mais je voulais continuer de repenser à ce passé qui m'a longtemps tourmenté et qui continue de me poursuivre. Mais elle m'adresse un léger sourire comme si elle avait lu en moi que j'étais nostalgique. Malgré tout, cette jeune femme au loin me fit penser à une camarade Dunster, une certaine Sera que je connais que très peu au final. Alors je lui rendis son sourire et son signe de la main tout en ne quittant pas des yeux les enfants haïtiens.

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