Si j'avais su que tu m'oublierais si vite, je ne t'aurais pas aimé si longtemps. (Caly)

J’en avais assez de ces échanges froids, de ces réflexions sèches, de ces regards glacés que nous passions notre temps à nous envoyer. Caly souligna que c’était notre choix avant de me confier qu’elle aussi regrettait que cela tourne à la guerre ouverte entre nous. Il fallait vraiment que cela cesse, j’étais capable d’encaisser le fait de la perdre pas de la voir devenir cette étrangère hostile… Caly s’assit ensuite sur la chaise après mon aveu, je ne pourrais jamais m’habituer au fait de ne plus l’avoir dans ma vie. Elle ne voulait pas entendre cela, elle me demanda d’arrêter. « Parce que si je te dis que je t’ai oubliée, que j’ai complètement tiré un trait sur toi, cela va rendre les choses plus faciles ? » Parce que jouer le rôle du connard qui était complètement passé à autre chose ce n’était définitivement pas pour moi. Je n'étais pas venu ici pour renfiler ma carapace, mais pour me montrer honnête avec elle, enfin. Nous n’étions peut être pas en bons termes, mais j’avais l’impression qu’après tout ce que nous avions vécu elle et moi, je lui devais bien la vérité. Elle me demanda si ma question sur sa facilité à tourner la page faisait référence au winthrop avec qui elle avait couché durant le spring break. « Par rapport à Charlie, oui. Et puis par rapport à ce gars qui t’as embrassée avant hier soir à la soirée… » Je n’avais rien manqué de ce baiser, bouillonnant en les observant à l’autre bout de la pièce lors de la première soirée de ce séjour. Je n’avais plus mon mot à dire concernant les fréquentations de la jeune femme… Elle me répondit avec franchise que c’était justement sa façon de ne plus penser à notre rupture, un moyen de guérir, d’avancer, d’oublier. Elle ne se rendait probablement pas compte que de la voir dans les bras de ces types c’était à chaque fois un déchirement pour moi. « J’espère que ça marche alors. Comme ça au moins un de nous deux sera heureux de cette situation… » J’avais parlé impulsivement et sur un ton un peu dur, rongé par ma jalousie. Mais la voir sur sa chaise, alors qu'elle essayait de s'ouvrir à moi, de se montrer honnête, avec cet air fragile, cela me fit aussitôt regretter mes mots. Je me repris et essayais de m’adoucir pour pouvoir poursuivre cette discussion. Je n’étais pas venu pour une nouvelle bataille mais bien pour un traité de paix. « Excuse moi Caly… J’ai pas le droit de te juger, tu es suffisamment grande pour gérer notre séparation de la manière qui te convient… Et puis, je suis désolé pour tout, pour la soirée… » Ca, elle n’allait probablement pas l’oublier et le pardonner sur le champ, je l’avais quand même insultée... « …pour avoir mêlé Valentin à nos histoires… » Valou était la personne dont j’étais le plus proche, c’était impossible pour moi de lui mentir. « Mais tu sais que de toute façon il a le pouvoir de lire dans mes pensées, donc il aurait forcément fini par découvrir ce qui avait conduit à notre rupture. » ajoutai-je avec un petit sourire. « Je voudrais vraiment qu’on essaie de trouver un terrain d’entente. Pour nous. Et pour lui aussi. Il a besoin de ses deux meilleurs amis en ce moment.» Je ne savais pas si c’était possible, continuer de se voir, se dire bonjour, se sourire poliment tous les jours en faisant comme si de rien n’était. Cela serait toujours plus agréable que nos échanges agressifs de ces derniers jours. « Même si nous nous sommes beaucoup engueulés ces derniers temps, je te veux et te voudrais toujours dans ma vie Caly. Tu crois qu’on peut essayer d’être amis à nouveau ? »

« Parce que si je te dis que je t'ai oubliée, que j'ai complètement tiré un trait sur toi, cela va rendre les choses plus faciles ? » Je me mordais la lèvre inférieure, comme pour la dévorer tellement cette situation, ses paroles... me rendaient mal à l'aise, que pouvais-je lui répondre ? Je baissais un instant les yeux en direction du sol afin de fuir son regard, son visage. Non ça ne rendrait pas les choses plus faciles, bien au contraire, je ne voulais pas entendre ça... je le voulais, lui. Mais je ne pouvais pas, on ne pouvait pas retourner en arrière en oubliant tous ces événements, je devais avancer seule, c'était la meilleure solution. Tu sais très bien que non lâchai-je en posant à nouveau mon regard sur lui. Les choses seront jamais faciles quand il s'agit de toi... avouai-je dans un demi-soupir avant de remettre mes cheveux en arrière. Ça n'avait jamais été simple entre Priape et moi, depuis notre première rencontre tout était si compliqué... les rares fois où tout se passait bien c'était pour une courte durée puisque quelque chose arrivait pour créer un tsunami. Il me disait enfin qu'il disait ça par rapport à Charlie et Adam également. Je ne disais rien, honteuse de la situation d'hier soir... enfin non je n'avais pas honte mais je préférais ne pas m'étaler sur ce sujet, ça ne servait à rien et ce n'était ni bon pour lui ni pour moi. Et puis ça ne le regardait plus à présent. Voilà que ses sarcasmes continuaient à l'égard de comment j'avais décidé de gérer notre rupture, je soupirais un peu trop fort afin qu'il entende clairement que non je n'allais pas accepter à nouveau des reproches. J'étais plus que prête à lui parler, à m'ouvrir et c'est ce que j'étais en train de faire, seulement si cela finissait de la même manière que la veille, je préférais arrêter cette conversation sur-le-champ. Je me levais, prête à lui dire ce qui me passait par la tête et que je ne voulais pas d'une énième dispute quand il s'excusait. Ce n'étaient pas des petites excuses, il faisait référence à la soirée, à Valentin... Je me sentais presque coupable d'avoir eu l'idée de le mettre à la porte et par culpabilité, ou peut-être parce qu'au fond je voulais qu'il sache malgré mon désir de me taire je me confiais une fois de plus. Hier, c'était rien... j'voulais essayer de t'oublier à nouveau, mais j'ai pas réussi à aller jusqu'au bout. Alors non ça ne marche pas, pas du tout même. Tu crois que si ça marchait j'aurais eu cette réaction rien soir ? Si j'avais tourné la page rien de ce que tu pourrais me dire me toucherait.. et c'est loin d'être le cas. dis-je avant de m'asseoir sur le fauteuil pour la deuxième fois. Moi aussi je suis désolée, j'aurais jamais dû te donner cette gifle... Je croisais mes doigts entre-eux, cette conversation, aussi honnête qu'elle soit, me rendait anxieuse malgré moi. « Mais tu sais que de toute façon il a le pouvoir de lire dans mes pensées, donc il aurait forcément fini par découvrir ce qui avait conduit à notre rupture. » disait-il par rapport à Valentin, je n'étais pas entièrement d'accord quant à sa justification, s'il y avait bien une chose pour laquelle je ne pouvais pas m'excuser c'était ma réaction face à leur intervention. Mêler Valentin était pour moi une très mauvaise idée et je ne voyais toujours pas d'un bon oeil ce qu'avait fait Priape, meilleur ami ou pas. Ouais enfin ça m'semble compliqué de deviner une histoire aussi compliqué que la notre expliquai-je ne pouvant m'empêcher de lui montrer que non, ça, pour l'instant, ça ne passait pas et que c'était encore très compliqué d'avaler la pilule. Néanmoins, il n'était pas là pour ça. Mais bref dis-je avant qu'il me dise qu'il aimerait trouver un "terrain d'entende" pour Valentin, il était bien culotté de me dire ça sachant que c'était lui qui avait tout enclenché par rapport à Valentin, mais il marquait un point : Valentin avait besoin de nous deux, ensemble. Il voulait qu'on devienne des "amis" je rigolais légèrement. Des amis ... ? Je sais pas si je serais capable d'être ton amie Priape. Je peux essayer, mais après tout ça... ça me semble légèrement compliqué. J'étais pas prête à la considérer comme un ami, et je ne savais pas si un jour je le serais. Mais pour Valentin... je ne finissais pas ma phrase, je cherchais quoi répondre. Franchement, jamais je pourrais te voir comme mon ami, c'est improbable, mais on peut toujours tenter l'impossible.

Les choses ne seraient jamais faciles quand il s’agissait de moi, me répétai-je intérieurement après que Caly ait prononcé ces mots. Comment devais-je le prendre ? Je choisis finalement de ne faire aucun commentaire. Je savais que je ne lui rendais pas les choses faciles. J’aurais pu être un ex docile, m’effacer de son chemin et de sa vie, disparaître et l’éviter durant tout le reste de notre scolarité mais j’en étais incapable. Ma vie sans Caly je ne pouvais pas la concevoir. Nous étions dans la même confrérie, nous avions de nombreux amis communs, je ne pourrais pas juste l’effacer de ma mémoire et continuer d’avancer, c’était impossible. « Tu sais que t’as pas à te justifier… J’ai pas besoin de savoir ce qui s’est passé avec ce mec… » Mais un soulagement infini m’avait quand même envahi en entendant Caly m’assurer qu’elle n’avait pas pu conclure avec ce type de la soirée Vésuvius. Je ne pus réprimer un sourire qui trahissait trop bien mon contentement et qui contrastait avec mon sage discours dont je ne pensais finalement pas un mot. Je n’avais plus le droit de ressentir cela, cette révélation aurait normalement du vraiment me laisser indifférent. J’étais encore complètement accro, malgré toutes mes bonnes résolutions, je ne pouvais simplement pas fermer mon cœur sur commande comme on ferme un robinet… Mes sentiments pour Caly étaient toujours là, en moi, bien présents… Elle s’excusa à son tour pour la scène. Je passais instinctivement ma main sur ma joue en repensant à ce fameux moment. « La gifle était méritée… J’ai dépassé les bornes. » avouai-je avec un air coupable. « T’as de la force quand même tu sais ? » lui lançai-je alors avec un petit sourire essayant ainsi détendre un petit peu l’atmosphère de la chambre qui semblait toujours tendue. Cette discussion à cœur ouvert nous mettait mal à l’aise tous les deux mais elle était nécessaire. Et puis elle qualifia notre histoire de compliquée… Oui on devrait peut être simplifier tout cela. Les complications, je commençais à en avoir marre. Que ce soit Caly ou moi, nous en avions eu notre lot dans la vie, peut être qu’un peu de simplicité nous ferait du bien… L’amitié était peut être la solution, en tout cas ce fut celle qui s’imposa à moi et que je lui proposais donc. J’attendais sa réponse avec une pointe d’anxiété au creux de la poitrine. Je relevai la tête et glissai vers elle un regard lourd d’arrières pensées, me repassant quelques images de ces mois passés ensemble en tant que couple dans ma tête ; me rappelant le goût sucré de ses lèvres, la sensation soyeuse de ses cheveux glissant entre mes doigts, de sa peau s’embrasant contre la mienne… Tout ce qu’interdisait une simple amitié, tout ce à quoi je renonçais au final avec ce compromis que je venais de proposer. C’était un contrat que je me sentais néanmoins prêt à remplir, parce que je ne pouvais plus supporter nos confrontations… J’imagine que mon regard n’aidait pas la jeune femme à se positionner. Elle parut hésiter, doutant de sa capacité à être mon amie. Valentin sembla peser dans la balance puisque finalement elle conclut qu’elle était prête à essayer, pas forcément certaine d’y réussir, mais déjà c’était un grand pas pour nous. « Très bien alors essayons… » Un petit sourire mitigé éclaira mon visage. Soulagé d’un côté parce que cette réponse signifiait que Caly aussi souhaitait enterrer la hache de guerre, mais également déçu parce que cette tentative d’amitié impliquait aussi qu’elle était prête à renoncer à notre couple…