Did I know you ? (PV Mélina)

La fin du spring break avait un effet redoutable sur les étudiants : il fallait retrouver son train train, reprendre avec sérieux ses études où on les avais laissées, se remettre à plancher sérieusement sur ses cours, tout ça en essayant de ne pas trop perdre son bronzage… Mais finalement, après la soirée que j’avais passée avec mon meilleur ami la veille, se retrouver sous le ciel gris de Cambrige n’était pas le plus déprimant dans tout ça… Bien sûr, j’avais été ravi de retrouver mon Valou, seulement j’aurais aimé pour lui comme pour moi que nous n’ayons pas ce lot de mauvaises nouvelles à nous annoncer mutuellement… En ce lundi matin, la reprise des cours avait donc un goût amer. Il me fallait de la caféine de toute urgence. Profitant d’une pause entre deux conférences, j’empruntais un couloir pour me diriger vers la machine à café la plus proche. Je sortis ma monnaie, appuyai sur la touche expresso avant de saisir le gobelet rempli de la précieuse boisson chaude. Avec un manque d’attention évident, je fis demi-tour pour retourner sur mes pas mais percutai quelqu’un. Je lâchai mon gobelet dans la manœuvre et le liquide se déversa partout par terre. Brutal reconnexion avec la réalité, encore plus efficace que n’importe quelle dose de caféine. Ma première réaction fut de m’inquiéter pour la jeune femme que je venais de télescoper par inadvertance : « Excuse moi… » fis-je aussitôt, complètement confus. « Ca va ? Je t’ai pas brûlée ? » m’inquiétai-je en observant les bras de la pauvre étudiante qui s’était trouvée sur mon chemin pour m'assurer qu'elle n'avait pas reçu de café brûlant. J’étais trop désolé pour remarquer qu’en vérité, cette inconnue n’en était pas une…

L’abîme de l’éternité nous hante. Ainsi, s’interroge-t-on : nos actes retentiront-ils à travers les siècles ? Des inconnus entendront-ils notre nom bien après notre mort et se demanderont-ils qui l’on était, si l’on bataillait avec bravoure, et si l’on aimait avec fougue ? Priape & Mélina

La première journée de cours, le premier réveil, la première douche, les premières rencontres. Une nouvelle vie. Un recommencement. Depuis la fin du Spring Break, l'endroit où j'ai fait pas mal de rencontres, où j'ai sympathisé avec des gens de ma confrérie, la réalité prenait place. Plus à bloc que jamais, je devais me donner à fond dans mes études, je devais réussir. Ainsi, je pourrais garder ma bourse et finir mon cursus. Seulement, c'était assez difficile pour moi de se lever, j'avais apprécié faire la fête et m'être détendue sans rien devoir à personne. Depuis le décès de ma mère, j'appréciais ces moments. Oui, ces moments de solitude où je pouvais me faire plaisir sans penser aux autres. Sans penser à l'heure qu'il est, sans penser aux obligations qui me retiennent. Je vivais pleinement, sainement et surtout, sans précipitation. Ce matin, avec un peu d'avance, je marchais à travers le campus pour trouver ma salle de cours. Il fallait avouer qu'Harvard était un vrai labyrinthe. Je mettais pris un jus d'orange sur le chemin, puis je le sirotais avec mes écouteurs qui me murmuraient doucement mais sûrement trop fort, une chanson. Cette chanson, celle du changement. Seulement, quelqu'un ne manqua pas de me percuter de plein fouet. « Pórni » (= putain en grec) Un liquide d'une chaleur étonnante venait réchauffer mon avant bras qui était recouvert d'un sweat bien trop grand pour moi. D'un gris chiné, il vira à une couleur bien plus marron. Du café, sans doute. Puis sans vraiment comprendre encore ce qu'il s'était passé, je voyais un bel homme, grand, musclé, qui me parlait. Il avait l'air gêné, il avait l'air confus. Et putain, il ressemblait bien trop à quelqu'un. Après quelques secondes, je me décidais à enlever mes écouteurs. « Je, euh.. Pardon. J'ai pas compris, enfin.. les écouteurs. » Le regard suspect, je plissais les yeux pour le regarder un peu plus. « Mais bordel, mais, j'te connais. »

Le juron grec que la jeune femme avait laissé échapper aurait probablement du me servir d’indice. Mais la population d’étudiants étrangers présents à Harvard était trop large pour que je saute aussitôt à la conclusion que je connaissais la malheureuse blondinette que je venais de bousculer. Et puis j’étais trop confus de ma maladresse pour véritablement l’observer. Une chance, elle ne semblait pas avoir mal… Elle retira ses écouteurs en m’observant d’une façon étrange avant de laisser échapper qu’elle me connaissait. « On se connaît ? » repris-je en la détaillant avec plus d’attention. Un visage aux traits fins, des cheveux d’un or éclatant, des yeux azur pétillants, une silhouette élancée, de jolies formes que l’on devinait malgré le large sweat qu’elle avait revêtu et qui l’avait d’ailleurs probablement sauvée d’une brulure inévitable si par malheur mon café était rentré en contact direct avec sa peau. « Je suis désolé, on a des cours en commun peut être ? » demandai-je avec un air circonspect. Je n’étais pas du tout sûr de ma supposition et surtout je ne pouvais pas m’empêcher de penser qu’une aussi belle blonde aux yeux bleus ne serait probablement pas passée inaperçue si nous avions vraiment des créneaux de cours en commun…