Thibaut « Rien ne dure toute la vie, pas même vos soucis. »

Il était assis là, sur le banc de l'école, rigolant avec ses amis, juste avant de croiser un regard bleu. Son regard bleu. Il sourit un peu plus, le fixant. Cela faisait deux semaines qu'il l'avait remarqué, là, au loin, qui le regardait, le détaillait. Au début, il n'avait pas voulu répondre à ces regards, car, il n'avait pas son âge. Mais, depuis quelques jours, il ne pouvait pas s'en empêcher. C'était un peu bizarre, parce que jamais il n'aurait pensé pouvoir aller vers quelqu'un comme lui mais... En fait, il était attiré d'une façon assez surprenante par ce garçon ! Il sourit encore plus. Après les cours, il irait finalement le voir. Et, c'est ce qu'il fit, les mains dans les poches, une cigarette au coin des lèvres, le regard sûr, la démarche sensuelle, il était sorti du lycée et c'était arrêté, droit comme un I devant lui. Son regard se plongeant dans le sien, le fixant, curieux, sûr de lui. Un sourire s'étirant lentement sur ses lèvres alors qu'une main venait se glisser sur sa cigarette, la tirant pour souffler la fumée. Et maintenant ? Une main un peu calleuse se glissa dans la sienne et, lentement, ils s'éloignèrent. Vers une route que Thibaut n'avait pas prévue de prendre mais, qu'il avait hâte de connaitre.

Et c'est durant cinq ans que cette route s'était dessinée, laissant place à un amour pur et passionnel. Un amour entre un jeune homme de dix-sept ans et un homme de vingt-cinq. Mais ils s'en fichaient. Ils s'aimaient et, ce fut surement la plus belle période de la vie de Thibaut, entre les bras puissants de cet homme. Confiant, heureux. Oui, ce fut les cinq les plus beaux de sa vie mais, un jour, tout s'était arrêté. Il s'en souvenait encore, alors qu'il sortait de l'université, un sourire aux lèvres, car, c'était le jour de la St Valentin, car, il était enfin majeur ! Il s'était dirigé vers le parking où Vincent l'attendait toujours, mais, ce soir-là, il n'avait pas trouvé la moto et, lorsque la tonalité du téléphone avait raisonnée dans ses oreilles, il avait su que quelque chose c'était passé. Et, lorsqu'une voix inconnue avait répondu, il avait été forcé de s'asseoir. Se mordant la lèvre, sortant nerveusement une cigarette pour fumer. Il avait demandé à parler à son amant, il l'avait dit ainsi et, l'homme au bout du fil avait soufflé très fort avant de le lui dire. De faire écrouler son monde. Mort... Il avait eu un accident au travail, charpentier...il était tombé d'un toit. Son corps trembla avant que des larmes s'écoulent doucement sur ses joues. Il ne l'avait pas accepté et, le jeune homme heureux qu'il fût devint violemment un autre homme. S'enfermant dans un monde bien trop noir. Se demandant tous les jours pourquoi ! Pourquoi l'avait-il abandonné ?!

Ce ne fut que le jour où il se réveillant dans des draps blancs que l'électrochoc se fit, six mois après son décès. Il cria et plaqua ses mains aux veines tranchées sur son visage. Il devait tout arrêter ! Stop, stop ! Vincent n'aurait jamais voulu une telle chose. Il devait se reprendre, sourire, vivre. Oui, il devait arrêter de faire le con. La mort allait-elle finalement lui apporter le repos qu'il souhaitait ? Il n'en savait rien ! Il lui fallut tout de même encore quelques mois pour tourner la page mais, enfin le garçon souriant qu'il était refit son apparition, rassurant ses parents, ses proches et ses amis. Il était de retour, à la fois plus fort et plus fragile.

« Dépêche-toi ! On va arriver en retard ! » Un rire glissa entre les lèvres du garçon qui venait de prononcer ces quelques mots alors qu'il jetait négligemment sa cigarette par terre. Il avait cours et, comme il l'avait dit, ils allaient être en retard. Son ami, boitant piteusement derrière lui. Que s'en était drôle ! D'ailleurs, il ne se retenait pas pour se moquer, gentiment bien-sûr. « Oh c'est bon ! T'as qu'à prendre de l'avance ! » Un autre rire et Thibaut se précipita vers son ami, l'attrapant sous les bras pour l'aider à marcher. « Comment pourrais-je laisser ma petite princesse en détresse ! » Une claque tomba sur l'arrière de son crâne et deux sourires s'agrandirent. Ils étaient beaux à faire les idiots tout en essayant de se dépêcher ! Mais, d'un autre côté, ils le devaient vraiment, c'était la rentrée, leur sixième année, pas forcément la plus importante, mais, les professeurs n'allaient pas manquer de les saquer avec des devoirs très durs, les préparant pour les examens. Alors, valait mieux arriver à l'heure au premier cours de l'année...