(flashback) I will never be the same ► Casey & Camille

Au volant de sa voiture, Camille n'arrivait toujours pas à le croire. Non, c'était impossible, Demyan n'avait pas pu partir comme ça, aussi vite, sans lui dire réellement au revoir... Elle étouffait. La maison familiale lui avait donné un goût amer, une ambiance irrespirable. La tête désolée de sa mère, cet air de con sur le visage de son beau-père. Non non non. Elle ne pouvait pas le supporter. Elle avait pris sa voiture sans vraiment savoir où elle irait, ni pourquoi elle partait. Elle roulait, voilà tout, et alors que dans sa tête la réalité du départ de Demyan commençait en prendre place, des larmes commencèrent à dégouliner le son de ses joues roses. C'était dur, trop dur. Arrêtant brutalement la voiture, elle claqua la portière derrière elle en se dirigeant vers le parc où ils allaient toujours tous les deux, à l'époque. Là, sur ce banc où ils avaient appris à se connaître, elle éclata en sanglots incontrôlables. Les larmes coulaient, coulaient, alors qu'elle se sentait plus abandonnée que jamais. N'arrivant plus à s'arrêter de pleurer, elle enfouit son visage dans ses genoux serrés contre elle, luttant, hoquetant, contre son chagrin qui semblait prêt à l'engloutir toute entière. Demyan l'avait abandonnée, il était parti.

Un besoin d’air incontrôlable. Ça fait plus d’une semaine que je suis enfermée dans ma chambre d’étudiant à bosser pour un devoir qui ne me servira jamais à rien. Plus d’une semaine que j’écoute les mêmes chansons en boucle et que Gabriel me raconte les mêmes histoires qui parlent toujours des filles qu’il se tape ou des histoires des autres. Une semaine que je n’ai pas pris l’air, juste pour respirer. Je suis tenté d’appeler Dayana-Lou pour me changer les idées, mais j’ai besoin d’autres choses. Je sors alors d’Harvard les mains dans les poches, et me balade dans les ruelles lumineuses de Cambridge. Passant devant l’hôpital, je fais un détour par pur dégoût et m’aventure dans le parc. Je marche lentement le long de l’allée principale. Le parc vide me rappel de nombreux souvenir, dont ma première « sortie » avec Lavender. Fixant quelques mètres plus loin l’arbre qui nous avait abrités de la pluie, je souris. Baissant les yeux, une silhouette blonde recroquevillée sur elle-même me fait face ; elle est là, visiblement en larme, hoquetant entre deux respirations. En m’approchant un peu, je distingue un visage que j’ai déjà croisé : Camille, en cours de langues avec moi. Curieux et inquiet de son état, je m’assois à ses côtés et lui demande d’une voix calme : « hé… Camille, qu’est ce qui se passe ? » Pas besoin de lui demander si ça va ou non pour savoir qu’il s’est passé quelque chose. D'ailleurs j’ai toujours été contre le « ca va ?», surtout quand on compte le nombre de fois où on me l’a demandé juste pour la formalité. C’est bête de demander à une personne qui pleure comment elle va, comme si elle allait répondre : oui, nickel, je sue juste un peu des yeux là, mais ça va passer, t’en fait pas !

Camille n'arrivait plus à s'arrêter de pleurer, quand elle sentit quelqu'un s'asseoir près d'elle. Relevant son visage, elle reconnut Casey, un mec qui suivait les mêmes cours qu'elle. Hé… Camille, qu’est ce qui se passe ? lui demanda-t-il alors qu'elle s'essuyait vainement les yeux. Elle n'y pouvait rien, elle ne parvenait pas à reprendre contenance. La blessure était trop grande et en cet instant, elle avait l'impression de se trouver en milles morceaux. Pourquoi se souciait-il d'elle ? Ils se connaissaient à peine tous les deux, il n'avait aucune raison de gâcher sa soirée à s'occuper d'une pauvre fille en train de chialer. Ex...cuse moi dit-elle entre deux sanglots incontrôlables. S'obligeant à se calmer, elle se força a prendre de grandes bouffées d'air en agitant ses mains près de son visage. Bon dieu, elle n'avait pas du pleurer comme ça depuis des années. On aurait dit une gamine. Je suis désolée que... que tu me voie comme ça... Ca va pas fort dit-elle avec un petit sourire qui se transforma en grimace lorsqu'elle fondit à nouveau en larmes.

Ex...cuse moi. Je passe alors un bras se voulant protecteur autour de ses épaules. Mais t'excuse pas, c'est bon. La voyant tenter de se calmer avec de grandes respirations, j'ajoute : C'est ça, respire. Retrouvant un peu ses esprits, elle articule alors : je suis désolée que... que tu me voies comme ça... Ça va pas fort. Sur ces mots elle fond en larmes. Souriant je lui dis : je m'en serais douté tu sais quoi ! Si tu veux parler Bah... Bah chuis là, hein. En effet, je ne pouvais pas être plus là qu'en ce moment. Tu sais, je sais ce que c'est de ne pas être bien, alors peut-être pas pour les mêmes raisons que toi, mais au moins je sais que dans ce genre de moment faut pas rester comme ça à pleurer, faut en parler pour aller de l'avant après.

Casey passa un bras autour de ses épaules, comme pour la protéger ou la réconforter, et Camille fut vraiment touchée par son geste. Elle ne connaissait pas vraiment Casey, elle l'avait simplement aperçu quelques fois à son cours mais elle avait l'impression qu'il était plutôt discret comme mec, pas du genre à à se mettre en avant. Et c'est certainement pour ça qu'elle n'était jamais vraiment allée lui parler. Mais bizarrement, ces quelques mots qu'il prononça lui donnèrent l'impression de le connaître depuis toujours. Comme un ami à qui on pouvait tout dire, tout confier sans avoir peur d'être jugée. Camille continuait d'essayer de se calmer, passant ses mains sur ses joues rouges et sous ses yeux, où son maquillage avait certainement dû couler. Mon demi-frère, Demyan, est parti faire un voyage humanitaire comme ça, sans prévenir personne. Il m'a laissée en plan ici et... et je l'aime dit-elle d'une voix aiguë, pleine de chagrin. Tournant son visage vers Casey, elle chercha une trace de dégoût sur son visage. Voilà, jdois te paraître méprisante maintenant.