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Trevor & Anaya
( Début du sujet ici )
Les dés étaient lancés. Trevor avait posé la question qu'elle redoutait mais qu'elle attendait. Posait-il la question par simple curiosité ou parce qu'il désirait être avec elle, lui aussi ? Anaya sentit son coeur s'affoler. Ses mains s'étaient mises à trembler discrètement et elle se contenta de les caler entre ses jambes. C'était le moment ou jamais d'entretenir une conversation sérieuse, celle qui changerait probablement tout et pour toujours. Et lorsqu'il tendit la main vers la jeune tatouée, elle la saisit immédiatement, ne refusant jamais le contact avec son bien aimé. Leurs doigts étaient entrelacés et pour rien au monde elle n'aurait laissé qui que ce soit, ou quoi que ce soit les délier.
Elle était prête, non pas sans peur, à lui révéler ce qu'elle attendait. Ce qu'elle ressentait pour lui depuis un certain temps. Mais cet endroit était-il le plus approprié pour une déclaration comme celle qu'elle s'apprêtait à lui faire ? Une cafétéria bondée et bruyante, un peu froide également ? Certes, le monde autour d'eux avait disparu depuis le moment où il avait passé la porte du sas pour la rejoindre, tout propre et parfumé. Mais elle aurait préféré une ambiance plus intimiste, surtout si ça tournait mal.
- J'aime bien la première proposition, à moins que tu préfères qu'on aille chez moi, se poser l'un contre l'autre...
Elle vida son verre de cocktail en deux temps, trois mouvements avant de replonger son regard dans le sien. Le suspens était déjà insoutenable mais il faudrait patienter encore un moment.
- Je vais répondre à ta question, le plus sincèrement du monde. Mais j'aimerais qu'on s'en aille. C'est pas un endroit approprié pour ce que j'ai à te dire...
En lui souriant à nouveau, elle entreprit de lâcher sa main, toujours à contreoeur afin d'enfiler son manteau. La nuit tombait et l'air devait être frais dehors, à cette époque de l'année. Son appartement ne se trouvait qu'à deux rues du complexe sportif, c'était également la raison pour laquelle elle se permettait d'aller le voir jouer tard le soir. Ils seraient vite au chaud et pourraient parler aisément.
Anaya déposa l'équivalent de la note et un pourboire avant de se diriger lentement vers la sortie. Lorsque Trevor fut à sa hauteur, elle saisit sa main à nouveau. C'était la première fois qu'elle osait un geste aussi complice en dehors de chez eux. A vrai dire, Anaya n'était pas le genre de fille qui se collait à son petit ami en rue, à tenir la main ou passer un bras dans le dos. Elle avait toujours trouvé les couples de cet acabit un peu culcul. Mais là, tout de suite, elle avait juste besoin de le sentir avec elle, près d'elle. Peut-être que c'était la dernière fois, peut-être que dans les vingt prochaines minutes, elle devrait vivre sans lui et trouver la force d'aimer à nouveau, de s'adapter à quelqu'un d'autre et de tâcher d'être heureuse pour lui.
Le vent soufflait dehors, comme elle l'avait prévu et seules les lampadaires éclairaient leur route. Elle pressa le pas en direction de sa rue. Pour une fois, elle ne dit pas un mot. Pourtant, elle était habituée à papoter longuement de tout et de rien avec Trevor. Il était beaucoup de personnes en une. Un peu son meilleur ami, un peu son amant, un peu son amour... Mais le stress la paralysait presque, et de toute façon, elle n'avait qu'un mot à la bouche : Je t'aime.
Une fois à bon port, elle ouvrit la porte, non pas sans mal, dans l'agitation. Elle savait que dans quelques minutes, elle se mettrait à nu. Pas elle. Ses sentiments. Tout ce qu'il y avait de plus profond en elle serait dévoilé et il avait l'honneur d'être le premier homme de sa vie à en faire les frais, après son feu père. Un court instant, en montant les escaliers, elle eut une pensée pour son cher père décédé depuis maintenant 17 ans, environ. Elle avait toujours cru en lui et était persuadée que depuis le drame, il était son ange gardien. La guidant sur la meilleure route qui soit, lui donnant la force nécessaire pour surmonter certains obstacles. Certes, il y avait eu des ratés et elle ne comptait plus le nombre de fois où elle l'avait imploré de l'aider à vaincre ses addictions. Elle se dit que peut-être, c'était lui qui avait mis Trevor sur sa route. Que si tout ça arrivait maintenant et jamais auparavant, ce n'était pas pour rien. Il lui envoyait un signal, celui que Trevor était fait pour elle. Qu'elle devait se laisser transporter par cette magie ambiante et que tout se passerait bien si elle décidait de croire en eux, en ce qu'ils pouvaient former ensemble.
Elle jeta son manteau sur l'un des sièges du salon et alluma les lumières. Spoutnik le chat vint lui flatter les jambes en miaulant, jetant un regard dédaigneux au jeune homme, comme il le faisait à chaque fois. Spoutnik était un chat jaloux mais il finissait toujours par se poser sur les genoux du boxeur, devant la télé. Anaya se rappela la fois où son matou avait décidé de les interrompre durant un coït plus qu'agité et ce souvenir lui arracha un sourire. Néanmoins, elle se ressaisit rapidement, la nervosité lui faisait vraiment perdre les pédales, comme si c'était le moment de penser aux frasques de ce tordu de chat !
Elle s'installa dans le canapé, faisant signe à son élu de la rejoindre. Une fois installés, la jeune femme inspira longuement. Par quoi allait-elle commencer ? Il y avait tant à dire... Commencer par leur rencontre ? Par ces dernières semaines ? Par ce qu'elle ressentait, ce qu'elle espérait ? C'était si compliqué ! Elle se lança.
- Donc... heum. Il y a à peine quelques minutes, tu m'as demandé si je souhaitais que l'on soit réellement ensemble. Genre comme un couple quoi. Alors tu vois, ce serait mentir si je te disais que je n'y avais jamais pensé depuis que l'on se fréquente. Je vais te répondre sincèrement, ça risque de prendre un peu de temps, mais je pense qu'il est nécessaire aujourd'hui qu'on ait cette discussion, sinon, nous ne l'aurons jamais. Je suis consciente que ce que je vais te dire risque de tout changer entre nous. Je prends le risque de te perdre, de devoir vivre sans toi et de feinter d'être heureuse pour ce qui t'arrivera dans le futur.
Elle se tut un instant. Pour l'instant, tout portait à croire qu'elle allait lui dire « merci garçon, mais tu m'intéresses pas, je veux juste ta bite ». Elle avait un côté pessimiste qui la poussait à s'exprimer ainsi.
- Mon discours risque d'être un peu désordonné mais l'essentiel sera dit. Et nous aurons tout le temps d'éclaircir ça après... Le jour où je t'ai rencontré, ça a été un choc pour moi. Je veux dire, j'ai été incroyablement attirée par toi, j'ai senti mes jambes flancher quand t'as posé les yeux sur moi. Et la suite, tu la connais. Ca fait un certain temps que l'on couche ensemble. Et j'adore ça, se précipita-t-elle d'ajouter dans un petit rire. Je trouve qu'on est en symbiose dans ces moments là. Mais je trouve aussi qu'on est en symbiose le reste du temps... Au début, je ne réfléchissais pas à ce qu'il se passait entre nous. Tout était clair et tu pouvais partir pour une autre du jour au lendemain, je le savais. Mais depuis quelques semaines, j'ai l'impression que notre relation a évolué et qu'on est proches d'une toute autre façon. On est proches pour tout, tout le temps. Tu connais tout de moi quasiment.
La jeune femme avait jusque là, posé son regard un peu partout autour d'elle, agitant de temps à autres les mains en s'exprimant. Mais la suite s'avérait beaucoup plus personnelle et elle décida d'affronter le regard de son interlocuteur.
- Maintenant, je ressens des choses que je n'ai jamais connu avec d'autres garçons ou d'autres filles. Je ne sais pas vraiment ce que c'est, ça m'a l'air positif mais parfois ça me fait du mal. Par exemple, quand je viens te voir, j'ai le ventre qui se tord, je stress et je me réjouis à la fois. Je peux pas te résister. Et maintenant, si je pense au fait que tout ça peut s'arrêter un jour, et bien j'ai peur. J'ai peur et je me sens triste. Je me retrouve à me demander comment je ferais sans toi. Je me surprends même à imaginer des projets et un futur. Et au fond, je ne sais même pas ce que toi tu penses de moi, qui je suis pour toi ni même ce qu'il en est de ta vie sentimentale. Alors ça m'effraie et je me contente de rester là à feindre l'aisance, comme si tout ça me convenait très bien, en mode je suis la fille cool qui ne te prend pas la tête. Mais au fond, ça commence à me bouffer, continua-t-elle sans déloger son regard de celui de Trevor.
- Je suis juste bien à tes côtés, vraiment bien. Mieux que je ne l'ai jamais été avec personne ni seule. Je crois que tout ça, tout ce que je te dis là, ça s'appelle avoir des sentiments. Ou même être amoureuse. Alors tu m'en voudras pas de sembler stupide et ignorante mais j'ai jamais été amoureuse de personne. Alors ça me déstabilise... Donc en gros, la réponse à ta question de tout à l'heure, c'est oui. J'aimerais vraiment être avec toi pour de vrai. Que nous formions un couple et qu'on s'aime. Que tu m'aimes. Que tu penses à moi, que tu parles de moi, qu'on se fasse des cadeaux, qu'on se dispute et qu'on se réconcilie. Que je sorte les crocs à chaque petite conne qui te regarde de trop près... Et surtout, je veux t'être fidèle. Même si en fait... Je te le suis déjà depuis un bon moment. Il n'y a plus que toi que dans ma vie, qui puisse me toucher, me faire l'amour... J'ai même arrêté de voir Feliks pour toi, tu vois...
Après ce long discours, la jeune femme pinça sa lèvre. Elle avait tout dit et même plus que ce qu'elle ne s'était imaginé. Elle avait imaginé un tas de scénarios de ce moment mais jamais celui là. En fait, il était plus simple et moins romantique que dans ses rêves. Elle était néanmoins contente d'avoir porté ses couilles. Peut-être que Trevor n'aurait jamais fait le pas si elle avait attendu. Elle ne lui en aurait jamais voulu, pourtant. A présent, tout un tas d'émotions s'entremêlaient. Elle aurait voulu pleurer toutes les larmes de son corps, se libérer de cette tension et s'excuser d'être aussi bête. Son coeur ne tarderait pas à jaillir de sa poitrine tant il cognait fort et rapidement. Elle ne s'attendait pas à ce que Trevor lui fasse une déclaration d'amour digne d'une comédie romantique, mais elle espérait qu'il aille dans son sens et qu'il exprime au moins un peu ce qu'il éprouvait pour elle, si seulement il éprouvait quelque chose d'autre que du désir sexuel. Elle se perdit à nouveau dans les méandres noisette des yeux de celui qu'elle appelait « son sucre » et imprima son visage à tout jamais dans sa mémoire.
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