My name is Luka ☂ I lived on the second floor...

La vie à Boston les avaient tous changé. Liam Jefferson rentrait de plus en plus tard et souvent avec un taux indécent d'alcool dans le sang. Sa paye il l'avait dépensé plus d'une fois dans les cercles de jeu et dans les bars. Il préférait désormais la compagnie d'une bouteille de bourbon à celle de sa femme et son fils. Liam commençait aussi à devenir violent. Oh non il ne frappait pas sa femme, ni son fils. Il cassait seulement beaucoup trop de vaisselle. Theresa restait de marbre, tous les jeudis soir elle partait pour la journée laissant Luka chez la voisine, madame Parker. Une mère célibataire qui s'occupait déjà de son fils de deux ans l'aîné de Luka se prénommant Gregor. Les deux petits garçons jouaient souvent à se lancer une balle de baseball au pied de l'immeuble, avant de remonter au premier étage pour prendre le goûter chez son ami. Les années passèrent et rien ne s'arrangeait. Theresa s'absentait de plus en plus souvent et Liam avait sombré dans un alcoolisme profond qui l'avait envoyé trois fois à l'hôpital en trois ans. Son septième anniversaire, Luka le passa chez celle qu'il considérait maintenant comme sa seconde maman. Pourtant, un jour un fait tout à fait surprenant se produit. Theresa qui n'était habituellement pas là le jeudi était resté toute la journée à la maison. Elle préparait le diner pour son mari. Lui aussi n'était pas comme d'habitude, il était sobre quand il est rentré. Cela faisait depuis le déménagement qu'une telle chose ne s'était pas produite. Luka, lui, s'était enfermé dans sa chambre. Il était sur son lit en compagnie d'un catalogue qu'il dévorait des yeux. Ses doigts parcouraient le papier glacé avec fébrilité. Jamais il n'avait vu quelque chose d'aussi beau et d'aussi parfait. Une bulle s'était formée autour de lui, une bulle qui était imperméable à la voix aigüe de sa mère qui l'appelait pour le dîner. La porte de sa chambre s'ouvrit brusquement sur la silhouette impressionnante de son père. La colère était imprimée sur son visage et quand il vit sur quoi son fils s'extasier il rentra dans une colère noire. Les pages du catalogue montraient des hommes posant à moitié nus pour la promotion d'une célèbre marque de sous-vêtement. Il sortit de la chambre du garçon en hurlant des propos homophobes à destination de son fils. Arrivé dans le salon il s'empara d'une bouteille d'alcool qu'il vida de moitié avant de retourner voir son fils. Theresa avait essayé de le retenir avant d'être violemment projette contre le sol. Elle pleurait à l'embrasure de la porte regardant impuissante son fils se faire frapper à coups de ceinture en cuire. Impuissante face aux cris de douleur de son enfant.

Recroquevillé dans son lit Luka pleurait tous les soirs depuis l'incident. Un an s'était écoulé. Il ne dormait plus, n'avait plus très faim et ses yeux rougis par la honte et la tristesse avait perdu de leur lueur. Son père continuait de se montrer violent envers lui, les coups de ceinture lui avaient lacérés le dos et le torse. Il se sentait mal d'avoir déçu son père. Il se détestait et se demandait comment il avait pu trouver quelque chose d'attrayant dans un corps d'homme. Il avait peur de sortir de sa chambre et refusait de voir Gregor. Il ne voulait plus voir de garçon. Luka se mura, alors dans un silence complet et restait souvent seul dans l'appartement refusant d'en sortir. Il n'allait plus à l'école. Sa mère aussi se faisait battre, quand elle sortait avec ses lunettes noires, elle expliquait ses blues par le fait qu'elle s'était « battue contre une hystérique dans un magasin parce qu'elles voulaient la même robe ». Luka faisait extrêmement attention à ce qu'il faisait dans l'appartement. Pour son père tout était devenu prétexte à battre sa femme ou son fils. Un soir, Luka laissa éclater un verre d'eau sur le sol sans le vouloir. Ce soir-là les coups de son père se firent si violents que le corps de Luka se mit à saigner. Ses cris il ne put les retenir. Des cris aiguës d'une rare détresse. Soudain on tambourina à la porte. Liam stoppa ses coups et la porte céda sous le coup de pied d'un policier. Il neutralisa Liam tandis que son coéquipier prit Luka entre ses bras. Madame Parker était effondrée sur le palier. C'est elle qui avait appelé la police, alertée par les cris de Luka. Theresa était en état de choc. Assise sur le sofa, elle ne parlait plus, ses mains étaient posées sur sa bouche et les larmes roulaient abondamment sur ses joues. Le cauchemar était fini, mais à quel prix.

Theresa ne se remit jamais de ce sombre épisode. Elle fut internée dans un hôpital psychiatrique et Liam fut jugée pour ses actes. Le juge l'envoya en prison pour une vingtaine d'années et il lui est également interdit de s'approcher à plus de cent mètres de son fils. La garde de Luka fut donc attribuée à Suzanne Parker, qui s'est battue pour pouvoir l'accueillir chez elle. Petit à petit Luka commençait à guérir. Tout doucement il reprenait la route de l'école en compagnie de Gregor. À dix ans le garçon devenait un adolescent et il décida de changer. Son enfance tragique l'avait fait grandir trop vite. Très vite il développa un sentiment de méfiance envers tout le monde et il se métamorphosa. Quand il voyait Gregor qui était un garçon paresseux et obsédée par tout ce qui avait une poitrine, Luka ne put s'empêcher de vouloir lui ressembler. Gregor était plein d'assurance, intelligent et manipulateur. C'était devenu son modèle. Il grandit avec lui s'imprégnant tous les jours un peu plus de la personnalité de Gregor. Il se mit à s'intéresser aux filles, à jouer avec elles. Il devenait très populaire dans son école. Il brillait par son intelligence et son côté sportif, bien que parfois son comportement pouvait paraître étrange aux yeux des autres. Le contact physique devait venir de lui sinon il se sentait mal à l'aise. Il essayait de grandir comme n'importe quel adolescent. Il voulait juste être un garçon normal. Et bien que les blessures physiques furent pansées par Suzanne, son coeur, lui, était et resterait profondément tailladé.

Luka continuait de grandir et c'est à l'âge de dix-sept ans que tout bascula dans sa vie. Après avoir multiplié les petites-amies, l'adolescent avait décidé de faire une pause au niveau de sa vie sentimentale. Il voulait se concentrer sur son avenir et commença à postuler pour différente faculté. Des cinq facultés qu'il souhaitait intégré, celle d'Harvard était celle qu'il convoitait le plus. L'avantage c'était que Cambridge était à dix minutes de route de chez Suzanne. Il pouvait donc se rendre devant le campus et observer avec attention la vie étudiante. Un jour, alors qu'il traînait dans Harvard Square, Luka croisa la route de Paul, un étudiant français de deuxième année. Les deux jeunes hommes s'étaient bousculés alors que Luka envoyait un message. L'accent français de l'étudiant avait tout de suite intéressé. Ils sympathisèrent et se voyaient deux fois par semaine. La France décrite par Paul attirait beaucoup le Texan. Les garçons devinrent très vite de très bons amis et Paul aidait le garçon à perfectionner son français. Un jour les deux jeunes hommes s'étaient posés dans un parc et commencèrent à discuter et à se chamailler. En se battant Paul se retrouva à califourchon sur Luka. Les yeux bruns du Texan toisaient ceux du Français avec envie. Leurs lèvres s'unirent ce qui plut d'abord à Luka. Soudain tout ce qu'il essayait d'oublier depuis ses huit ans lui revint en pleine figure. Le magazine, les modèles en caleçon, ses doigts caressant leurs courbes, son père en furie et les coups, les coups toujours plus violents. Luka repoussa violemment le garçon, sa respiration était saccadée et il se recroquevilla sur lui-même comme quand il était petit. Paul se confondit en excuses et demanda à son ami ce qui n'allait pas, mais Luka restait silencieux. Il n'avait jamais parlé de son passé.

L'heure de partir pour la faculté approchait. Luka profitait de ses vacances avec le plus de filles possibles, il voulait oublier ce qu'il s'était passé avec Paul. Gregor avait intégré depuis deux ans l'université de Boston. Il se voyait régulièrement et le jeune homme voyait bien que quelque chose n'allait pas chez Luka. Les deux garçons étaient devenus au fil des années comme des frères. Gregor connaissait Luka mieux que personne et la surconsommation de filles n'était pas naturelle. Luka savait qu'il allait devoir subir un interrogatoire et chercha à fuir. Il ne voulait pas admettre devant sa seconde famille son attirance malsaine qui avait détruit sa vraie famille. Gregor le força à parler et de fut les yeux embrumés que son frère lui avoua la honte qu'il ressentait à trouver les hommes aussi attirants que les femmes. Gregor fut tout d'abord surpris de la violence de tel propos. S'en suit une longue discussion, Gregor mit sa mère dans la confidence et ensemble, ils essayaient de convaincre Luka que ce n'était pas mal d'être bisexuel et que ce n'était pas lui qui avait détruit sa famille. Luka reprenait doucement confiance en lui et s'était rendu compte de l'erreur qu'il avait commise en repoussant Paul. Les lettres d'admissions arrivèrent par la suite et il obtenue sa place à Harvard. Il avait choisi d'étudier le français dans l'espoir de recroiser Paul. Et c'est sur Harvard Square que le jeune étudiant avait retrouvé son frenchie. Il fut la première personne à connaître le passé de Luka. Après les explications du jeune Texan, les deux jeunes hommes reprirent contact avant de finalement entamer une relation amoureuse qui dura deux ans. La rupture se fit en douceur. Paul obtenu son diplôme de littérature anglaise et dut retourner en France pour terminer ses études et Luka entamait sa troisième année d'étude à Harvard et décida de travailler comme serveur afin de gagner sa vie et d'aider sa seconde mère, Suzanne, qui devait assumer les frais scolaires de deux universités privées, malgré les nombreuses bourses dont ses fils bénéficiaient. La vie de Luka avait changé grâce aux Parker et il continuait de rendre visite le plus souvent possible à Suzanne. Il était fier de ce qu'il était devenu et la vie à Harvard lui avait apporté l'épanouissement qu'il attendait depuis son arrivée dans le Massassuchet.