ANDREANNA ✱ What if we never go out ?

Je venais d'entendre cette putain d'interview, et je ne savais pas si je devais me réjouir ou pleurer toutes les larmes de mon corps. On nous avait appris que la maladie n'était pas contagieuse, et qu'en somme, nous pouvions rendre visite aux autres malades des étages hors du notre.. Ils avaient aussi identifié certaines cellules, mais n'avaient pas de remède, et surtout... Surtout, ils avaient dit que la maladie était mortelle. Je m'étais préparé psychologiquement à cette éventualité, mais malgré tout, j'étais morte de peur. Après une nuit passée à faire des crises d'angoisse, j'avais fini par me lever à sept heures du matin, et par appeler une infirmière pour demander à faire une visite à un patient que je savais ici.. Arrivé un peu avant moi... Andreas. Il se trouvait au troisième étage, et c'est le coeur lourd que je m'avançais vers la chambre du troisième étage, le cherchant du regard, longeant le mur tellement même marcher m'en demandait beaucoup. Je finis par le trouver, dans son lit, endormi. Il arrivait à se reposer, c'était déjà ça.. Et je n'avais tellement pas le coeur de le réveiller, que je tirais le fauteuil le plus près de son lit à côté de moi, me roulant en boule dedans pour regarder Andreas sagement. Il semblait épuisé.. Et mal. Comme tout le monde dans ce foutu hôpital. Mais au moins.. Si les choses devaient mal tourner.. Je pouvais le voir.

Je n'avais pas passé une très bonne nuit, je dois l'avouer. Cela faisait plus de trois semaines que j'étais enfermé dans ce trou à rat et je n'en pouvais plus. Les personnes malades ne cessaient d'arriver, comparé au nombre de guéris qui sortaient de cet hôpital. Je devais avoir un cas assez grave pour être resté aussi longtemps dans cette chambre de quarantaine, j'étais complètement explosé. Heureusement que Mina était passée me voir, je n'aurai pas tenu le coup si je n'avais pas vu la présence de quelqu'un de sain. Nous avions tous des têtes d'enterrement ici, surtout depuis que l'annonce était tombée. J'essayai de me battre et de rester fort face à cette affolante nouvelle, mais vu mon état, c'était très difficile. Je ne m'étais pas rendu compte qu'une jolie petite blonde était assise à mes côtés, j'avais dû m'assoupir quelques minutes. Quand je reconnais le visage de ma meilleure amie, un sourire s'étire sur mon visage. Elle a l'air si triste, et si fatiguée. Je me redresse en baillant, prenant ses mains dans les miennes. J'avais été vaguement mis au courant qu'elle était là elle aussi, mais pas dans le même étage. « On a vraiment le don de se mettre dans des situations désagréables nous deux. » Je faisais bien entendu référence à la soirée que nous avions passé dans la nuit noire, jusqu'à l'aube. Cette fois, le contexte était beaucoup moins drôle, et nous étions très malades. « Ça va toi ? » Je savais pertinemment que non, mais j'espérais qu'elle tenait le coup.

Cette interview ne voulait plus quitter mon esprit, me hantant chaque heure inlassablement. Est-ce que nous allions tous sortir de cet hôpital, ou allions nous nous laisser mourir sur ces lits d'hôpital, dans l'attente désespérée d'un remède ? Je ne pouvais pas empêcher mon esprit de divaguer dans les pensées les plus sombres, et ce jusqu'à ce qu'Andreas émerge doucement, se redressant pour prendre mes mains dans les siennes. Doucement, je resserrais alors l'étreinte de nos doigts. « On a vraiment le don de se mettre dans des situations désagréables nous deux. » Je haussais doucement une épaule, regardant autour de nous les autres lits, les autres patients, l'hôpital entier en somme. « Pour le coup on a visé fort, je dois l'avouer.. » Marmonnais-je doucement, avant de reporter mon attention sur Andreas qui me regardait. « Ça va toi ? » Je baissais les yeux sur son matelas, inspirant doucement pendant que mes pouces venaient caresser les dos de ses mains doucement. « J'ai connu des jours meilleurs, moi qui pensais que ma grossesse à l'approche du terme était le summum du désagréable, j'étais loin du compte... » C'est clair que pour le coup, j'aurais donné n'importe quoi pour retrouver mon ventre énorme et mes crampes si ça me débarrassait de cette maladie. « Et toi ...? J'suis désolée si je t'ai réveillé.. » Je me redressais à peine sur le fauteuil, me penchant au dessus du lit pour embrasser la joue de mon meilleur ami.

Je grimace, conscient que notre situation est complètement déplorable. Cette maladie m'avait contaminé en si peu de temps que j'avais à peine pu m'en rendre compte - sauf quand j'avais atterri dans cet hôpital. Je ne supportais plus ces murs blancs qui m'entouraient, la toussotements de personnes malades, la fatigue continuelle.. Je voulais vraiment sortir d'ici, et Roxanna avait l'air d'être du même avis. Heureusement que j'avais quelqu'un à qui parler finalement. « J'ai jamais été enceint alors je peux pas comparer. » Je blague en souriant - faiblement certes, mais sincèrement. Même après plus de trois semaines de conditionnement, je n'avais pas perdu mon sens de l'humour, et je voulais surtout redonner le sourire à ma meilleure amie. Mains entrelacés, nous prenions des nouvelles d'un de l'autre et ça me faisait du bien de savoir qu'elle n'était pas au fond du trou. « T'inquiète pas, je dormais mal de toute façon. » Dès que j'étais contrarié ou malade, je cauchemardais presque à chaque fois. Faith peuplait en général ces rêves, et même si je donnais tout pour l'oublier, elle était toujours là. « Tu as un peu dormi cette nuit ? » dis-je, après qu'elle m'ait fait un petit bisou sur la joue.

« J'ai jamais été enceint alors je peux pas comparer. » Miracle, Andreas venait de m'arracher un sourire, qui plus est un sourire sincère, chose de plus en plus rare depuis que j'étais enfermée ici. « Le contraire m'aurait étonnée pour être honnête. » Non, sans blague, comme si Andreas pouvait être enceint, bawi. Je pinçais les lèvres pour esquisser un nouveau sourire léger, puis m'excusais au passage si je l'avais réveillé en arrivant. « T'inquiète pas, je dormais mal de toute façon. » Hm... Lui aussi... J'pense que c'était le cas de beaucoup de patients dans cet hôpital de toutes façons, parait que ça fait partie des symptômes, les crises d'angoisse, les insomnies... Je ne supportais pas ça. « Tu as un peu dormi cette nuit ? » Me demanda alors mon meilleur ami, comme s'il avait lu dans mes pensées. Je passais ma langue entre mes lèvres, et haussais les épaules en regardant le sol de l'hôpital. « Vaguement.. Les infirmières ont été obligées de me donner des médocs, mais ça ne m'a pas aidé plus que ça. » Je mordais l'intérieur de ma joue, ajoutant, pensive « Et puis disons que les nouvelles sur cette putain de maladie n'aident pas à dormir.. » J'essayais de jouer les femmes fortes, mais la vérité, c'est que j'étais tétanisée.

Je ricane bêtement à ma propre blague, heureux de la voir sourire. Son teint est terne et elle parait si faible, ça me donne mal au coeur. Je déteste savoir ma meilleure amie triste et malade, et j'aimerai qu'elle aille mieux dès que possible. Nous discutons brièvement des événements concernant cette épidémie, ce qui nous ronge le moral à tous les deux. Je n'aurai jamais pensé être aussi souffrant. « Oui je comprend.. C'est le flip total je dois t'avouer, c'est la première fois que je suis confronté à un truc du genre. » A mon avis, Roxanna devait elle aussi vivre un truc pareil pour la première fois. C'était impensable d'attraper une maladie comme ça à notre époque.. du moins c'est ce que je croyais. « On va guérir t'en fais pas, tu pourras dormir dans ton petit lit très bientôt. » Je lui adresse un petit clin d'oeil, amenant ses mains vers mon visage pour lui déposer un petit bisou. Je sens qu'elle a peur, mais forte comme elle est, elle préfère se cacher. Elle a toujours trop intériorisé, et ça me déchire de savoir que ça bouillonne complètement à l’intérieur. « T'as un peu de compagnie à ton étage ? »

« Oui je comprend.. C'est le flip total je dois t'avouer, c'est la première fois que je suis confronté à un truc du genre. » C'est pas comme si on avait le droit à des entraînements spéciaux contre les épidémies, après tout. Personne n'était prêt pour ça, ni Andreas, ni moi, et d'un certain côté j'étais rassurée de voir que je n'étais pas la seule à flipper. Néanmoins, mon meilleur ami tenta rapidement de me rassurer. « On va guérir t'en fais pas, tu pourras dormir dans ton petit lit très bientôt. » Il porta mes mains à ses lèvres pour les embrasser, me faisant esquisser un sourire alors que je serrais doucement ses doigts entre les miens. « J'espère... Je suis pas du genre sociable quand je suis malade, alors cohabiter avec des inconnus me pompe l'air.. » Je ne supportais pas de me lever le matin et de naviguer entre les malades, puis cette vitre, les visites, comme si nous étions des animaux dans un zoo.. Ca n'arrangeait rien. « T'as un peu de compagnie à ton étage ? » Je grimaçais face à la question d'Andreas, et secouais la tête de gauche à droite. « De toutes les personnes dans la même vague de malades que moi, je ne connais presque personne... Mon ex est venu me voir, mais je lui ai fait une telle crise de nerfs que je suis pas sure de le voir revenir. » J'avais supplié Jude de prendre soin des enfants, faisant au passage une sublime crise de panique. Je soupirais, et me redressais pour me hisser au bord du lit d'Andreas pour m'asseoir juste à ses côtés. « Et toi alors, ça va, y a du monde que tu connais ..? »

Il est vrai que de se retrouver avec de parfaits inconnus avait le don de m'agacer. Je n'étais déjà pas dans mon assiette et comme Roxanna, ce n'était pas ma tasse de thé de cohabiter avec des gens que je ne connaissais pas. Nous n'étions même pas tombés dans le même étage tous les deux, et ça me chagrinait beaucoup. J'étais déjà inquiet pour ma meilleure amie et j'aurai grandement préféré qu'elle soit tous les jours avec moi afin que je puisse prendre soin d'elle. « Heureusement que t'as pu venir me voir alors, sinon t'aurais tuer quelqu'un ! » m'exclamais-je en souriant, essayant de détendre l'atmosphère. Nous étions tous deux sous antibiotiques, fatigués et malades, il fallait essayer de faire passer la pilule le plus facilement possible. Je savais Roxanna fragile et je ne voulais pas qu'elle soit au plus mal, je n'aurais pas pu le supporter. « Merde qu'est-ce qui s'est passé ? » J'avais vaguement entendu parler de ce gars. En même temps, Roxanna était quelqu'un d'assez discret qui ne présentait jamais ses problèmes aux autres.. même à moi. Elle gardait toujours son mal être sans se confier, et c'est ça qui me faisait le plus peur. A sa question, je pense tout de suite à Mina, espérant qu'une future relation éclose après cette fichue épidémie.. Je souris bêtement. « Dans mon étage, personne, mais une amie est venue me voir il y a deux jours. Mina Frost tu connais ? En fait je crois qu'on est plus qu'amis maintenant, elle m'a fait des confidences et de mon côté, c'est réciproque donc voilà. » Je n'hésitais pas une seconde à me confier à Roxanna, c'était ma meilleure amie et je savais qu'elle se réjouirait pour moi.

« Heureusement que t'as pu venir me voir alors, sinon t'aurais tuer quelqu'un ! » Andreas, ou l'art de détendre l'atmosphère avec classe. J'esquissais un sourire, hochant doucement la tête en guise de réponse à son affirmation. « C'est un peu ça l'idée.. » Surtout vu les crises que j'étais capable de taper... Comme celle que j'avais fait à Jude le jour ou il était venu me voir à l'hôpital. « Merde qu'est-ce qui s'est passé ? » Je passais ma langue entre mes lèvres, avant de pincer celles ci, l'air pensif. Comment formuler ça sans l'alarmer ? « Disons que je lui ai demandé de me promettre de prendre soin des enfants s'il m'arrivait quelque chose... Et il a refusé d'me faire la promesse. Alors j'ai crisé. » C'était aussi simple que ça, j'avais explosé sans la moindre raison, littéralement. Je finis par détourner la conversation, demandant à mon meilleur ami s'il avait vu des gens qu'il connaissait. « Dans mon étage, personne, mais une amie est venue me voir il y a deux jours. Mina Frost tu connais ? En fait je crois qu'on est plus qu'amis maintenant, elle m'a fait des confidences et de mon côté, c'est réciproque donc voilà. » Je ne connaissais pas cette dénommée Mina, mais au vu du sourire béat d'Andreas, je devinais que je ne tarderais pas à faire sa connaissance. « Plus qu'amis, hm ? Je ne connais pas cette jeune fille, mais vu le sourire qu'elle te donne, elle doit être spéciale. » Je me penchais pour embrasser la joue du jeune homme, avec un sourire aux lèvres. « Je suis contente pour toi. »

Entendant ses explications, je ne peux m'empêcher de rester bouche bée. Je suis à la fois choqué et énervé de ce que Jude avait pu lui dire quelques jours plus tôt. Si j'avais moi-même été le père de ces enfants, je n'aurais pas hésité une seconde pour les prendre en charge. « Il est sérieux ? » Question purement rhétorique, mais c'est la seule chose que je trouvais à dire. Je me met à toussoter, ma gorge me fait un mal de chien et j'en ai vraiment assez. Je marmonne dans ma barbe. « Saleté de maladie.. » Je voulais vraiment sortir d'ici, je ne supportais plus ce confinement obligatoire en ce qui me concerne, et vu la tête de ma meilleure amie, ce devait être pareil. Nous en vînmes à parler de Mina, peut-être ma future petite amie je l'espère. J'affichais un sourire benêt mais j'avais bien besoin de ça dans cette épreuve. Cette éventualité de sortir avec elle après qu'on me trouve un remède m'aidait à me battre. « Oui elle est géniale. Merci Roxy. » répondis-je gentiment à la jeune femme, affichant toujours un beau sourire sur mon visage. « Et toi ? Pas de rencontres ici ? » Roxanna et moi sommes meilleurs amis, mais cette dernière a toujours été très secrète à propos de sa vie privée - surtout en ce qui concerne les garçons. J'osais tout de même lui demander si un garçon lui avait tapé dans l'oeil récemment.