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"Y'a pas qu'le café, qu'est chaud, gamin !"
Regarde le monde, les enfants dansent au Soleil, tout est si beau. Les arbres plient sous un vent violent, les Hommes, les Femmes s'échinent à garder un peu d'une sainte dignité. L'Amérique vit à cent à l'heure, les voitures filent sur les routes goudronnées, un artiste tristement célèbre est entrain de s'envoyer un rail de coke, et la publicité ronge peu à peu les magnifiques façades des somptueux bâtiments.
Le monde est beau, sa torpeur face aux rébus de la société s'envole, et tout est beau. La maladie n'est qu'un vilain souvenir, on souffle bien vite sur les guerres et la paix n'existe plus. La guerre non plus, on vit heureux, main dans la main, tous frères, tous sœurs. Uotpique rêverie ? C'est pourtant ce à quoi était entrain de penser le jeune professeur de sociologie dans l'une des plus belles facultés au Monde. Damien Bradford écoute cette mélodieuse musique qui joue à la radio. Une jeune femme est assise, là, à ses côtés, et Louis Armstrong achève sa somptueuse chanson dans une apothéose musicale. Très vite, il est remplacé par Ray Charles, et Damien ne peut s'empêcher d'augmenter le volume. Il file, à toute allure sur les avenues de Cambridge, dans le but d’arriver dans un café plus ou moins fréquentable. Il ne sait pas où il va, il ne sait même pas où il souhaite aller. Il n'a qu'une idée en tête, éloigner sa nouvelle amie de l'Université, et surtout, des mauvais souvenirs que ce lieu lui rappelait certainement après l'appel, le mauvais appel qu'elle avait reçue par cette belle journée.
Le professeur toussota légèrement, cette climatisation à la con allait le faire tomber malade, et la situation était mystique, magique. Ray Charles criait Hit The Road Jack à plein poumon pendant que le professeur ne pouvait s'empêcher de chantonner de sa voix acide. Il avait pris quelques cours de chants, dans sa jeunesse, c'était même l'un de ses points forts, peut-être, ou un point faible d'ailleurs, parce qu'il n'avait jamais chanté en public, il n'aimait ni la popularité ni l'idée de se voir jeter par une Major après que cette dernière ait pompé son pognon, et sa gloire future. Il en avait rien à secouer, son rôle de professeur faisait largement son bonheur, c'était ça, ouais, son bonheur.
Il baissa la climatisation, et le volume alors que cette saloperie de Johnny Cash entamait une célèbre chanson. Il aimait pas Cash, trop doué de ses mains, trop fort. Il avait envie de voyager en ce moment, Suisse, Toulouse, les destinations étaient multiples pour se ressourcer loin du crime et des accidents.
Tournant, engageant un virage comme un fou, il stabilisa sa voiture devant la destination, ce serait Luna Caffe, un chouette lieu, agréable à vivre, sympathique et visuellement bien organisé. Un truc de famille par excellence, une institution détestable, certes, mais bon, y'avait du café et des sandwichs, et une journée n'était réussie que si il y avait du café et à bouffer. Alors qu'il allait couper son moteur, Georgia, autre œuvre magistrale de Charles débutait. Il s'envola au rythme diabolique de l'Amérique raciste, de l'Amérique idiote.
-J'aime Charles, il te rappelle que même le plus grand homme n'est pas à l'abri de la vie, et de sa connerie monumentale. En fait, je crois que j'aime le Jazz depuis ma plus tendre enfance.
Il lui fit un petit sourire, et en sortant, s'exprima.
-Le Jazz, c'est beau, pas autant que toi, mais c'est beau.
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