(+ Ryan) please, tell me you're not busy now...

Depuis que Thaïs avait fait la connaissance de Ryan, il lui arrivait parfois de se rendre au Cambridge Common, ce parc public à la merveilleuse odeur d’herbe fraîchement coupée en espérant le croiser, comme les quelques fois où ils s’étaient vu en dehors de l’université. Au départ, ce qui devait juste être une demande de conseils à un étudiant en psychologie s’était bientôt transformé en amitié approfondie et aujourd’hui encore, si elle se rendait au sein de ce parc, c’était bien dans l’espoir de le trouver. Accompagnée de sa chienne, Gaïa, un magnifique labrador dont Caleb lui avait fait cadeau pour Noël, Thaïs vagabondait entre les différentes allées de ce parc jusqu’à ce qu’un parfum qu’elle connaissait n’effleure ses narines. Ni une ni deux, elle se dirigea vers les grandes tables en bois où les habitants de Cambridge déjeunaient en cas de beau temps pour mieux se planter devant le jeune homme, non sans se dire au passage qu’elle avait certainement dû être chien dans une autre vie pour posséder un tel flair. « J’ai définitivement du bol que tu mettes toujours le même parfum et que je puisse le reconnaître… » avoua-t-elle non sans esquisser un sourire amusé, quasiment persuadée qu’il s’agissait bien de lui. « Je te cherchais justement… est-ce que tu aurais quelques minutes à m’accorder ? » demanda-t-elle, penaude. S’il lui disait être occupé… elle n’était pas sortie de l’auberge.

Thaïs avait vu juste… ah, mais quel talent ! Pour un peu, elle était prête à dire qu’elle avait été chien dans une autre vie et cette image l’amusait au plus au point. Mais ce qui la fit éclater de rire immédiatement, en revanche, ce fut bien évidemment la réplique de Ryan. « Yeah je t’ai reconnu comment que je suis trop forte t’as vu ce talent un peu !! N’empêche ne change pas de parfum, celui-ci te vas très bien, on en mangerait ! » plaisanta-t-elle de son cœur sans pour autant lâcher la laisse de Gaïa alors qu’elle se penchait vers Ryan pour lui faire une bise sur chaque joue. Il avait dû s’y faire depuis le temps, la jolie blonde était extraordinairement tactile avec tout le monde, et s’avérait être un véritable rayon de soleil irradiant tout sur son passage malgré sa cécité et les difficultés qu’elle rencontrait constamment dans la vie de tous les jours. Qu’importe, Thaïs savait très bien se focaliser sur les petits bonheurs qu’on lui offrait, et la proposition de Ryan en faisait bien évidemment partie. « J’étais déjà conquise à l’entente du mot « chocolat » ! Ce sera avec un grandissime plaisir !! » reprit-elle en sautillant littéralement avant d’accepter son bras, ne s’offusquant aucunement de son aide bien au contraire. Certes, elle ne l’acceptait pas de n’importe qui, mais malgré leur amitié toujours naissante et plutôt récente, il fallait dire ce qui est, la tempétueuse blonde ne repousserait jamais une main tendue par ce fier militaire. Il était plus à même de l’aider que bien d’autre et rien que pour cela, il méritait toutes les louanges du monde. « Bon d’accord tu es plus assis mais tu veux que je t’en apprenne une bonne ? Une excellente même ? Je vais avoir un bébé pour septembre ! Désolée c’est un peu brutal comme annonce mais je ne pouvais pas me taire davantage, j’ai trooop envie de partager ça avec toi !! » demanda-t-elle, penaude. S’il lui disait être occupé… elle n’était pas sortie de l’auberge.

« Extraordinaire peut-être pas ! Disons qu’au bout de six ans heureusement que j’arrive à me débrouiller un peu toute seule sinon tu imagines, mais je serais un boulet à la cheville de tout le monde… déjà, j’ai appris juste avec une canne, ma princesse n’est arrivée qu’après, ce qui m’a permis d’apprendre d’autant plus de choses par moi-même ! » avoua-t-elle, bien que sa chienne lui soit actuellement d’un grand secours. Il faut dire que Thaïs reste d’une maladresse légendaire et que pour elle, être couverte de bleus à force de se cogner partout n’est qu’une longue habitude. Ryan ne l’avait pas encore trop vue à l’œuvre en la matière, et pour cause, ils restaient toujours plus ou moins assis ou bien il la guidait en lui prenant le bras par conséquent il lui évitait bien des désagréments et autres hontes. « Eh bien… je suis la plus heureuse du monde évidemment ! Je veux dire, moi ma famille elle craint du boudin alors forcément, en avoir une à moi, c’est plus que je n’aurais pu espérer… mais ça me fait peur, aussi, j’avoue. Tu imagines, si je suis toute seule avec le bébé et qu’une catastrophe arrive ? Je ne suis pas sûre de pouvoir gérer et ça m’angoisse tu ne peux pas imaginer ! Caleb va avoir une carrière assez prenante et bon, il faudra bien que je me fasse à l’idée qu’il ne sera pas toujours là pour me moucher le nez mais ça me fout quand même les jetons… tu as des enfants, toi ? Ou alors peut-être que tu en connais ? C’est fréquent chez une femme enceinte l’impression de tout faire de travers ? »

La jolie blonde ne put décemment s’empêcher de secouer négativement la tête de droite à gauche. « Mais tes recrues ne sont pas privées de l’un de leur sens… et heureusement d’ailleurs ! Tu sais, j’ai l’habitude de faire confiance à mon ouïe ou mon odorat, c’est la raison pour laquelle je porte uniquement des chaussures à talons, afin de sentir les différences de son suivant que je sois dans un couloir ou devant un espace vide par exemple. Ce genre de réflexe, cela fait longtemps que je l’ai acquis heureusement pour moi ! Ceci dit, avec mon chien c’est d’autant plus facile maintenant parce qu’il est mille fois plus intuitif que je ne le serai jamais. Et également, il m’évite de me prendre quinze poteaux dans la tronche par jour… ça m’en fait des hématomes en moins ! » ironisa-t-elle tout en haussant les épaules, se laissant guider par Ryan non sans boire littéralement ses paroles, comme à son habitude. Toutefois, Thaïs prit rapidement le gobelet de chocolat, enveloppé avec beaucoup de précautions par nul autre que le jeune Winthrop tandis qu’elle le remerciait d’un sourire radieux, comme à son habitude. Rien qu’au fumet délicat se dégageant de son chocolat, elle s’en léchait les babines par avance. « Oh tu sais je suis danseuse… l’exercice physique, j’en fais tout le temps bien que je vais devoir bientôt ralentir et arrêter à cause du bébé. C’est un choix que je fais volontiers. Mais il ne faut pas que je prenne trop de poids non plus… raisonnablement disons. Je n’ai pas envie de causer le moindre dommage au bébé… »

Thaïs trouvait presque cela drôle que Ryan compare leurs deux existences : d’un côté, la demoiselle vivait dans le noir le plus complet depuis six ans maintenant, et de l’autre, le soldat faisait face à la guerre, la mort et des atrocités que l’irlandaise ne pouvait même pas imaginer dans ses cauchemars les plus abominables. En somme, la jolie blonde peinait à comprendre comment il pouvait faire le rapprochement entre leurs deux réflexes… Thaïs n’avait pas besoin de se faire confiance pour défendre sa vie, mais juste pour améliorer son existence, toute la nuance restait là et dieu sait combien elle était de taille justement. « Tu sais Ryan, les trois quart du temps je me fais confiance… depuis le temps, encore heureux j’ai envie de te dire ! Mais bon, il m’arrive comme à n’importe qui d’avoir des crises d’angoisse, ça doit être renforcé par les hormones de grossesse aussi je suppose. Ceci dit pourquoi compares-tu ton métier à ma situation ? Toi, te faire confiance c’est vital, surtout pour te sortir de la merde. Moi c’est un peu moins primordial, tu ne crois pas ? » demanda-t-elle, frappée par une curiosité plutôt vive. Ryan lui était apparut comme un modèle à suivre dès leur première rencontre, et dieu sait pourtant combien elle mettait du temps à faire confiance à autrui. Mais avec le militaire, c’était passé tout seul, comme une lettre à la poste à vrai dire… « Tu entends quoi par m’entraîner avec toi ? Hey je suis danseuse pas sportive de haut niveau, ne va pas me faire un parcours du combattant… ceci dit pourquoi pas, même si pour l’instant j’ai aussi besoin de conseils disons humains. Tu as des enfants toi ? T’es expérimenté pour ça aussi ? »