DE DECEMBRE 2013 À JANVIER 2014 ▶ Elle m'avait regardé comme si j'étais barge, comme si je n'étais plus moi-même. Elle n'avait pas compris qu'après des années à m'être ainsi éloigné de ma famille, sans aucun contact, jamais, ou du moins non réciproque, je ressente tout d'un coup le besoin de retrouver ça. Elle m'avait aussi avoué d'un air coupable qu'elle s'en voulait de m'avoir fais passer autant de temps avec sa propre famille. C'est vrais que, lorsqu'on passe sept heures par jour avec la famille de sa copine, on a tendance à penser la sienne. Leah n'avait pas été très fine là-dessus, mais il n'y avait pas que ça et je le lui avais dis. Je ne voulais pas qu'elle se croit coupable de je-ne-sais-quoi. Car c'était infondé. Je n'avais pas envie de courir retrouver ma mère ou mon père. J'avais assimilé depuis des années d'être plus ou moins un orphelin. C'était un choix que j'avais fais. Enfin, ma mère l'avait fait pour moi, mais je l'avais un peu cherché. Et je ne me plaignais jamais de ma situation. Ca m'avait filé un coup d'apprendre que ma mère s'était barrée à Hong Kong, mais je ne l'avais pas montré, me contentant d'un haussement d'épaules et d'un "je suis bien parti, moi". Pourtant, ça m'avait légèrement blessé cette histoire. Car ça sonnait étrange. Si mon père s'était bien vite détourné de moi pour concentrer toute son attention sur Olympe, ma mère avait toujours été plus juste vis-à-vis de moi. Elle m'aimait davantage, c'était ce que je m'étais toujours figuré, mais cette pensée avait été ébranlée le jour ou elle m'avait viré de chez moi. J'avais lut dans son regard un espèce de dégoût manifeste à mon regard et j'en étais tombé de très haut. Mon estime pour elle avait baissé, tous les bons souvenirs terrassés par ce sale éclat dans ses yeux, ce jour-là. Mais je m'en étais relevé. La distance, celle qui est physique, ça fait du bien, quoi qu'on en dise. Mais si elle m'avait terriblement déçu, je ne m'étais jamais imaginé qu'elle puisse s'éloigner de mon père. Ils avaient toujours été solidaires dans leurs décisions : ni l'un ni l'autre ne remettait en question la parole de l'autre, faut dire qu'ils avaient des principes aussi absurdes l'un que l'autre en ce qui nous concernait ma soeur et moi, nous et notre éducation. Alors apprendre qu'elle avait put partir loin de lui et loin d'Olympe, bien qu'elle n'ai jamais été aussi proche d'elle qu'elle l'était de moi, ça m'avait parut assez dingue. J'avais moins suivi mon père au fil des dernières années. Je lui en voulais, mais ça c'était depuis tant d'années que c'était devenu habituel, je vivais très bien avec, m'étant fait à l'idée que même si j'acceptais tout ce qu'il me demandait, il ne me porterait jamais l'attention que j'estimais mériter en tant que son fils.
Je ne décidais pas de déménager car je voulais retrouver mes parents, redevenir leur enfant, en quelque sorte. Je n'étais plus ce garçon désespérant en manque d'attention qui s'était mit à la fumette, à la drogue et d'autres conneries soit-disant pacifistes, mais j'avais également renoncé à mon rôle de petit garçon modèle. Revenir voir mon père, ça consistait à faire un bon énorme dans le passé : ça revenait à remettre ma vie entre ses mains, à le laisser me caser avec une fille sans doute désespérément chiante, à le laisser m'enfermer à nouveau dans cette cage. Je ne regrettais pas d'être parti. Je regrettais simplement les circonstances. Je regrettais de mettre attaqué à ma santé, (Il ne m'avait même pas fallu plus de quelques semaines pour décrocher à tous ses trucs, dès lors que j'avais décidé d'intégrer une université de mon choix) car ce n'était pas intelligent et définitivement pas du César Jones. Je ne regrettais pas toutes ses nuits ou j'avais fait le mur, couvert par nos employés qui, heureusement, m'avait toujours porté dans leurs coeurs. Ca m'avait permit de pouvoir vivre, car non, avoir l'école à la maison, fréquenter uniquement des gens choisis par vos parents, laisser vos parents choisir vos fringues, le plus petit et infime détail de votre apparence et même de votre personnalité, du moins en surface, ce n'est pas vivre. Pourtant, une fois à Oxford, ma petite crise d'adolescence derrière moi, j'avais vite été nostalgique de la classe qui avait l'habitude de me caractériser. Je n'étais pas à l'inverse de ce que mes parents cherchaient à me faire devenir. Votre éducation vous influence, que vous le vouliez ou non. Je n'aimais pas avoir à dîner dans des restaurants pas assez raffinés, ni sortir en jogging, comme si je fonçais à la salle de sport, ni les gens incapables de se tenir en publique. Par dessus tout, ma petite période drogue & co. m'a rendu particulièrement amère à propos des gens qui en consomment. Car ce genre de trucs vous créer un bonheur factice, plus superficiel que je ne pourrais jamais l'être. J'avais rencontré Leah à Oxford, quasiment à mon arrivée. Elle ressemblait un peu à ses filles que mes parents me présentaient à répétition, sauf qu'elle avait plus de caractère et, détail non négligeable, personne ne me forçait la main pour venir lui parler.
Je l'aimais bien, suffisamment pour m'être installer en appartement avec elle, mais je ne l'aimais pas assez pour qu'elle puisse réussir à me convaincre de rester. J'avais fait suivre l'ensemble de mes résultats et de mon dossier à Harvard et j'avais été accepté. Rien d'anormal : j'avais toujours eu d'excellentes notes. Tout d'abord, pour faire plaisir à mes parents, puis tout simplement car j'avais rien contre les cours et que je voulais avoir un bon métier. Autrefois, je me prédestinais à reprendre les affaires de mon père, mais à présent... Ca aurait été bizarre, pas vu la situation actuelle. On allait peut-être finir par se retrouver. Après tout, j'allais retrouver Olympe, moi qui pensait ne plus la revoir. Cela avait peut-être été un peu dingue de ma part de penser que j'étais capable de vivre sans ma famille, sans ma petite soeur. J'avais adoré Olympe dès l'instant ou ma mère m'avait expliqué, alors que j'avais trois ans, qu'il y avait une petite fille dans son ventre. A l'époque, maman avait reprit le sport depuis environ un an et je la voyais moins, plutôt confié à des baby-sitters. Ainsi, j'avais été très heureux d'apprendre que la famille allait s'agrandir avec l'arrivée de ma petite soeur. Je me figurais que j'allais beaucoup jouer avec elle, qu'on allait très bien s'entendre. J'avais pas trop eu tort. Bien sûr, on se disputait, mais c'est impossible d'y couper entre frère et soeur. Je m'étais toujours efforcé de la protéger de l'influence de nos parents, essayant de l'emmener avec moi quand j'échappais en secret à notre quotidien réglementé à la minute près. C'était elle qui me manquait le plus. Notre vie n'était pas parfaite, très loin de là, mais elle demeurait sans doute ma plus solide alliée, déjà quand on était gosses. Mes parents étaient déjà très sévères, alors si en plus, il avait fallut vivre tout ça tout seul... Non, j'étais vraiment heureux d'avoir une petite soeur. Elle s'imaginait sans doute le contraire, mais je l'avais suivi au fil de ses années, tout comme j'avais suivi nos parents. Je demeurais curieux à son sujet. Je voulais savoir si elle était heureuse, si elle allait bien. Je voulais continuer à jouer les grands frères, ou que je sois. Voilà pourquoi j'embarquais pour Cambridge. Pour elle. Peut-être qu'elle n'avait pas besoin de moi, mais je m'étais inquiété en apprenant qu'elle avait rompu ses fiançailles, naturellement arrangées par notre gentil papa. J'avais laissé du temps s'écouler. J'en étais pas super fier. Mais cette fois-ci, je revenais vers elle. Peut-être qu'Olympe n'avait plus besoin de moi, mais j'avais accepté l'idée d'avoir pour ma part besoin d'elle.