(+ Jimmy) Je ne veux plus être ton amie imaginaire

Il était tard, il faisait froid mais je ne voulais pas bouger même si mes doigts gelés demandaient grâce. Je voulais absolument terminer de dessiner le couple qui s’étreignait non loin de moi. Ils étaient magnifiques, ils étaient émouvants et moi, je ne pouvais m’empêcher d’être touchée par leur amour au point de pleurer doucement et silencieusement d’émotions. J’avais toujours été trop émotive pour mon propre bien mais qu’importe, j’étais touchée par ce moment volé. Je terminais de dessiner quand je sentis une présence s’asseoir à côté de moi. J’essuyais mes joues baignées de larmes pour tourner mon visage vers l’homme. Je le connaissais bien, il était à la fois un ami, un protecteur, un confident mais aussi le pire lâche que la terre ait compté. « Tiens… Tu es tout seul, tu viens me parler » reniflais-je en essayant d’être méchante, distante mais c’était peine perdue. Je tenais trop à Jimmy pour lui faire longtemps la tête mais je commençais à souffrir de ses rejets répétitifs car il ne voulait pas assumer notre amitié. Je ne comprenais pas pourquoi, je n’étais pas idiote ni moche alors pourquoi continuait-il à ne pas me dire bonjour dès que nous étions en public ? J’étais fatiguée mais comme d’habitude, il suffirait qu’il me sourit, qu’il me fasse une promesse qu’il ne tiendrait pas pour que je lui pardonne. J’étais bien trop naïve et gentille mais c’était ma nature profonde, je ne pouvais pas la changer. « C’est quoi l’excuse du jour ? » demandais-je en fermant mon calepin. Vue l’heure qu’il était, nous n’allions pas tarder à être seuls dans le parc.

Jimmy. Tout un programme à lui tout seul mais j’adorais cet homme mais il avait un seul défaut qui me rendait malade de colère ou de tristesse : le fait qu’il n’assume pas notre amitié. C’est vrai, je ne comprenais pas pourquoi il ne voulait pas dire que je suis son amie. Après tout, je ne suis pas désagréable à regarder ni même à écouter alors quel était le problème ?! Enfin pour le moment, j’étais simplement heureuse de le retrouver bien que mes propos pouvaient prétendre le contraire. « Tu sais très bien que ta présence m’incommode pas…Ce n’est pas quand l’odeur de tes chaussettes » rigolais-je doucement avant de rougir doucement quand il passa sa main sur ma joue pour mieux me prendre la main par la suite. « C’est le couple que je viens de dessiner. Ils avaient si heureux ensembles, si amoureux que ça m’a touché. Je sais que tu vas te moquer mais tu sais que je suis affreusement romantique et sensible alors zut ! J’assume » marmonnais-je avant de prendre sa main qui tenait la mienne pour faire passer son bras autour de mes épaules, venant ainsi me blottir contre son torse. « Il fait froid alors tu me sers de bouillotte » souriais-je doucement tandis que le parc se vidait peu à peu de ses visiteurs. « Tu vas bien ? » lui demandais-je avec curiosité tandis que je profitais de son étreinte pour faire le plein de tendresse. J’étais un véritable gouffre de tendresse de tout de manière.

« Pourquoi devrais-je songer que je vais tomber sur un connard ? Laisse-moi mes illusions espèce de cynique ! Je les aime mes contes de fées et puis, faudrait encore qu’un homme s’intéresse à moi et ce n’est franchement pas le cas. » soupirais-je car il fallait être honnête, ce n’était pas comme si les prétendants s’accumulaient à mes pieds mais de tout de façon… « Grand-mère s’est mise dans la tête de me marier avec le jardinier. Il est… pour le coup et afin de reprendre tes mots, un véritable connard. Tu te rends compte que pour le premier rendez-vous arrangé, il m’a ramené un saucisson genre c’est le plus romantique des cadeaux et il n’a fait que parler de lui » râlais en me blottissant davantage dans ses bras, frottant ma joue contre son torse comme pour quémander de la tendresse. J’étais une véritable petite boule de tendresse, ce n’est pas avec moi que vous vous prendriez la tête bien au contraire. Je n’aimais pas les conflits mais je n’étais pas non plus une jeune femme qui se laissait marcher sur les pieds. Disons qu’une fois les limites de ma patience atteinte, valait mieux ne plus se trouver sur mon chemin sinon gare aux dégâts. « Tu vas bien mon Jimmy ? » lui demandais-je en m’écartant légèrement pour plonger mon regard dans le sien. J’espérais sincèrement qu’il pourrait rester en ma compagnie assez de temps qu’on puisse discuter tous les deux ou tout simplement profiter de la présence de l’autre. « De nouvelles jeunes femmes pleurent-elles derrière toi ou tu t’es assagi un peu ? »

Jimmy était véritablement un amour avec moi, dommage que la donne change dès lors qu’il avait un public face à lui. Je m’étais longuement et très souvent interrogée en vain sur la question. Je ne comprenais pas et surtout, j’avais fini par me remettre en question. Peut-être que sans le savoir, j’avais mauvaise réputation ou alors, il me considérait comme une bête curieuse, une gamine qu’il était préférable de cacher pour ne pas avoir honte. Dans le fond, j’avais fini par culpabiliser mais je tenais tellement à notre amitié que je ne pouvais pas m’empêcher de lui pardonner et rechercher sa tendresse. J’avais besoin de lui. « C’est pour ça que tu n’as jamais cherché à me séduire et qu’aucun homme non plus ?! Je suis peut-être trop gentille, trop bambi pour être attirante… » soupirais-je tandis qu’une idée folle germait dans mon esprit. Pauvre Jimmy, il n’était pas au bout de ses peines avec moi. En tous les cas, je lui confiais ma dernière mésaventure à savoir mon mariage forcé avec un adorateur du saucisson. « Pitié, pour un jardinier, je m’étais attendu à un bouquet de fleur magistral pas à un saucisson et puis, il est toujours à me montrer ses muscles comme si cela allait me faire craquer… Grand-mère veut que je devienne une fille de bonne famille à savoir mariée, tenant une maison et ne la ramenant pas trop ! En somme, elle voudrait que j’oublie toute ambition, autant demander à un Mather d’arrêter de faire la fête » grognais-je car je possédais quand même mon petit tempérament. Enfin, j’étais bien dans ses bras que j’en fermais les yeux, glissant une petite plaisanterie au passage. « Mon pauvre, tu vas devoir embaucher un assistant pour tenir à jour ton agenda » pouffais-je de rire avant de lâcher ma petite bombe. « Tu veux bien m’aider à devenir sexy ? »

Il est vrai que je me remettais souvent en question ces derniers temps. Je n'y pouvais rien, je commençais à avoir les hormones qui me chatouillaient les reins. Même le plus innocent des anges finit par être tenté par la luxure à force de la voir s'étaler sans vergogne sous son nez. Je voyais mes amis être heureux en couple ou au contraire se déchirer au nom de l'amour. Il était normal que cela commence à me donner envie. Malheureusement, je n'exerçais que peu d'attrait chez les hommes -en même temps, quoi de plus naturel, je n'étais pas une séductrice dans l'âme. Enfin, je n'étais pas malheureuse pour autant, Jimmy m'apportait cette bulle de tendresse que j'appréciais tant. Je rigolais avec lui avant de le forcer à se réinstaller correctement car mine de rien, je ne voulais pas quitter ses bras chauds. "D'accord, d'accord... Je n'ai rien dit mais avoue quand même que je rencontre des soi-disant séducteurs qui se transforment en agneaux devant moi... C'est à se poser des questions" plaisantais-je avant de lui avouer mes dernières mésaventures qui le firent beaucoup rire. Je lui tirais la langue par principe. "Je te promets rien, grand-mère veut A-B-S-O-L-U-M-E-N-T que je l'épouse. Elle a qu'à se le farcir elle-même" bougonnais-je car personnellement, je le lui laissais bien volontiers. Je changeais rapidement de sujet pour parler de ses conquêtes et j'éclatais de rire. "Mon pauvre, tu es débordé... Tu veux peut-être un massage pour te soulager de tout ce poids sur tes épaules?" le taquinais-je. Le pauvre, avec toutes ses amantes, il allait finir par s'épuiser songeais-je non sans humour. Je ne pus m'empêcher néanmoins de lui demander un service pour le moins étrange. "Mais je ne veux pas être comme elles... mais je rougis dès qu'un homme me parle, c'est...chiant ! Ça se trouve, je ne sais même pas embrasser!" râlais-je pour le coup.