Cher Journal,
Je pensais pas un jour écrire un journal intime, surtout pas à mes dix-huit ans. C'était plutôt le genre de trucs qu'on faisait quand on a dix ou quatorze ans, dans le genre en pleine crise d'adolescence, là où on mettait tous ses problèmes d'ado. D'un côté, je regrettais de plus l'être. C'est vrai quoi, on avait pas trop de soucis quand on était jeune, hors le monde des grands est bien différent. J'avais dix-huit ans, j'avais terminé le lycée et avait eu mon bac avec mention, mais j'avais besoin de me confier quelque part où on ne pourra pas me juger. Il fallait être honnête, même tes meilleurs amis peuvent t'écouter et faire comme s'ils te comprennent, mais dans leur tête pensent tout autre. C'est ce qui m'est arrivé, et donc la raison pour laquelle j'ouvrais ce journal intime, qui allait bien sûr rester totalement intime. C'est peut-être une envie passagère, je ne vais peut-être plus jamais ouvrir ce journal, ou même finir par le brûler mais là, de suite, j'avais envie d'écrire.
Après cette petite introduction, on peut parler maintenant de moi. Karlie Kovalevski et je suis née le 1er Octobre 1990 à Londres. J'ai un frère et une sœur jumelle, non-identique. Je trouve ça dommage en fait. Pas que je sois jalouse, mais ma sœur est d'une beauté tellement parfaite, être sa sœur jumelle identique ne m'aurait pas dérangé. Puis il y a notre frère aîné, Kenny qui a trois ans de plus que nous. Puis il y a nos parents, que j'aime plus que tout même si notre père n'était pas souvent là durant notre enfance. Pour vous dire, je voyais plus souvent ma voisine que lui. Et c'est tout question frères et sœurs. Heureusement d'ailleurs, ma famille me suffit amplement. Il y a aussi des cousins, mais je ne vais pas tous les citer. J'ai passé une enfance plutôt heureuse. Avec Apple, quand on était petites, on arrivait pas bien à nous différencier. On avait la même couleur de cheveux, à peu près de yeux aussi, donc difficile de bien nous différencier si on ne nous connaissait pas bien. Puis les vêtements n'arrangeaient rien, notre mère nous mettait les mêmes vêtements, alors c'était d'autant plus difficile. Mise à part ça, je n'avais jamais manqué de rien. Ma famille a toujours été aisée, j'étais assez capricieuse durant mon enfance mais en grandissant, je voyais tout ce que ma mère faisait pour nous et il ne fallait pas abuser des bonnes choses. Alors, histoire de faire honneur à ma famille, j'étudiais du mieux que je pouvais et mon travail portait ses fruits, puisque j'avais eu de bons résultats.
Mais une chose est venue perturber cela.. L'anorexie. Durant la période de l'adolescence. Il faut dire que ça a été une période assez mouvementée dans ma vie. D'abord le déménagement de Londres à New-York, l'anorexie et bien sûr les premier petits copains. Enfin bref, pour en revenir à l'anorexie. Je mangeais que très peu, voir des fois pas du tout et ça avait duré quelques temps. Je maigrissais de plus en plus, j'avais du mal à suivre correctement les cours et donc évidemment, mes résultats en prenaient un coup. Mes parents pensaient que ça n'était qu'une petite passe et que j'allais me reprendre, mais ça avait continué encore et quelques temps après, ils s'en étaient rendus compte. Ça avait été radical, mes parents m'avaient envoyés à Londres chez mes grands-parents. Je l'avais vécu plutôt mal mais je ne pouvais pas contester, leur décision était déjà prise. Par chance, ma sœur jumelle, elle, avait été plus sage et discrète, car même si elle était aussi tombée là-dedans, elle avait eu la chance de ne pas tomber entre les filets de nos parents.
J'étais donc restée à Londres chez mes grands-parents jusqu'à un an. Ce n'était plus la même chose avec eux, ils étaient constamment sur mon dos, à rester avec moi jusqu'à ce que je termine mon assiette. Les premières fois, je vomissais dans la salle de bain ensuite, mais ils l'avaient bien vite compris et ils étaient comme collés à moi. Je détestais ça sur le coup et je n'avais qu'une envie, fuir, mais à l'heure d'aujourd'hui je ne pouvais que les remercier d'avoir fait cela, car je me rendais compte que je risquais ma vie si je continuais. J'avais repris un poids normal, j'allais mieux et mes notes s'amélioraient de nouveau. Je n'avais pas eu de réel attachement durant cette année que j'avais passé à Londres, mais je m'étais faite des amis avec qui j'avais gardé contact. Puis, pas de copain non. Avec mes grands-parents qui étaient assez strict surtout au début et mes problèmes de santé, j'avais pas la tête à avoir un copain, il fallait l'avouer. Bref, j'étais donc revenue à la fin de l'année. J'avais seize ans, et je pouvais maintenant retrouver mes amis et ma famille. Ils m'avaient manqué, mais j'en avais beaucoup voulu à mes parents de m'avoir envoyés là-bas. Je l'avais perçu comme une trahison, comme s'ils n'avaient pas assez de temps à m'accorder, alors ils m'envoyaient comme ça à Londres, sans remords. Mais j'avais été trop aveuglée par la haine à ce moment-là, il avait fallu que je me calme d'abord avant d'ouvrir les yeux.
Parlons un peu de mes relations avec mon frère et ma sœur jumelle. Mais commençons d'abord par Kenny. Quand il a grandi, il a commencé à comprendre qu'il était le nouvel homme de la maison. Après tout, notre père n'était pas souvent là alors il fallait quelqu'un pour veiller sur nous. Il a toujours été protecteur que ce soit envers Apple ou moi. C'était plutôt amusant, jusqu'à l'adolescence. On venait de déménager à New-York, il se prenait vraiment au sérieux. Comme toutes les filles de mon âge, j'aimais sortir, fréquenter des garçons mais c'était pas possible avec Kenny. Dans ces moments-là, je préférais qu'il reste à sa place et non pas prendre celle du père. Mais je n'avais pas eu à subir ça longtemps, puisque j'avais du partir pour Londres à cause de mon anorexie. J'avais gardé contact avec Kenny, on se parlait souvent au téléphone car mine de rien, il me manquait beaucoup. J'avais un manque durant toute une année, celui d'un frère protecteur qui était prêt à me protéger face à tout. Bon, certes, j'avais mes grands-parents qui prenaient leur rôle vraiment sérieusement, mais je me rendais compte qu'il avait vraiment rempli sa mission et après tout, sans lui, je me serai trempée dans des drôles de situations et j'aurai fréquenté des mauvaises personnes s'il n'était pas là pour me mettre un stop quand il le fallait. Puis, quand je suis rentrée, quelques temps après c'était la rentrée scolaire et il était maintenant à Harvard.
Maintenant, c'est au tour d'Apple. Je peux dire des millions de choses sur elle, mais je ne vais pas tout dire maintenant.. On était comme cul et chemise gamines. C'était nous deux contre le reste, et malheureusement ça s'était brisé durant l'adolescence. J'avais un peu l'impression que depuis que je suis née jusqu'à maintenant, toutes les choses les plus importantes de ma vie s'étaient passées durant mon anorexie. Car oui on avait été en froid, et c'était en quelque sorte en rapport avec cela. Apple était considérée comme la petite fille sage et parfaite de la famille. Aucun des parents n'avaient jamais compris qu'elle était anorexique aussi. Certes, elle perdait du poids aussi mais ils ne pensaient pas qu'elle était « comme » ça. Alors forcément, j'étais jalouse. Premièrement de sa beauté, son succès et j'avais toujours pensé qu'elle était la chouchou des parents. Car pendant que j'avais été envoyée chez mes grands-parents à Londres, elle était restée là elle, et elle avait continué tranquillement sa vie. Je n'étais pas une garce néanmoins, et malgré ma jalousie je n'étais pas capable de la balancer. Puis de toute manière, ils ne m'auraient pas cru même s'ils allaient tout de même garder un œil sur elle de plus près. Pendant cette année à Londres, même si j'étais revenue les vacances, j'étais restée très distante. Je prenais des ses nouvelles quand je parlais au téléphone avec Kenny ou mes parents, puisqu'elle souhaitait me parler des fois, mais rien d'autre. Puis après mon retour, ça avait fini par s'arranger. Je la croisais tous les jours et je me remémorais les bons moments entre sœurs, c'était impossible de ne pas craquer au final.
Bien sûr, il y a encore des choses à dire mais je le garde pour une prochaine fois, s'il y en a une évidemment..