don't move, i am painting you [ft. Mateo]

Tel un petit oisillon qui cherche à s'envoler pour la première fois, je retombais peu à peu sur mes propres pattes depuis l'accident tragique qui m'était arrivé. Ne plus voir ne signifiait pas ne plus vivre, au contraire : au début c'était peut-être bien ma façon de voir les choses, mais maintenant, j'avais plus qu'envie de découvrir les beautés de la vie d'une autre manière qu'avec les yeux, et ça fonctionnait. Je testais de nouveaux trucs, de nouvelles méthodes en dessin, je passais plus de temps avec les gens qui me tenait à coeur et sincèrement, ça avait des répercussions fort positives sur moi et sur mon moral. Mes cauchemars ne disparaissaient peut-être pas, mais ils étaient moins puissants et moins effrayants au petit matin, lorsque je me réveillais en sueur, les yeux grands comme des billes.

Cela devait bien faire une ou deux semaines que j'avais publié cette annonce indiquant que je me cherchais un modèle humain pour tester de nouvelles techniques. En quoi étaient-ce de nouvelles techniques? Dessiner et peindre sans les yeux étaient quelque chose de très difficile. Mais de réalisable. Il suffisait que je tâte, que j'analyse avec le bout de mes doigts, que je touche chaque parcelle d'un objet pour que j'arrive à reproduire la copie exacte de ce que je souhaitais faire. Avec un humain, c'était pareil, mais je n'avais jamais expérimenté, et j'en avais envie... J'avais donc posté une annonce et aujourd'hui, deux semaines plus tard, je recevais un appel d'un inconnu s'appelant Mateo m'indiquant qu'il était intéressé d'essayer. Parfait, alors! Un rendez-vous fut vite donné et je me préparai pour être prête pour la séance dans l'après-midi. La salle d'Arts plastique serait l'endroit idéal. Il y avait de nombreux petits locaux qui se prêtaient bien pour des trucs du genre. J'attendis donc, le pinceau en main, assise calmement à l'endroit où le rendez-vous avait été fixé, la personne qui s'était gentiment portée volontaire pour développer mes techniques. J'étais un peu stressée, c'est sûr, puisque c'était la première fois que j'avais à toucher quelqu'un, un parfait inconnu qui plus est, pour pouvoir dessiner. Mais la gêne passerait vite, je n'en doute pas. Je l'espérais, du moins!