One day baby we'll be old,
oh baby we'll be old
and think about the stories
that we could have told...► Il y a des enfants qui font la joie de leurs parents. Ceux-là explosent de fierté, de bonheur et d’arrogance parfois, mais comment leur en vouloir ? Il regardent leur progéniture avec ces yeux qui vous promettent toutes les plus belles choses du monde, il pourraient leur élever des monuments, rien que pour prouver au monde à quel point leurs marmots sont des dieux. Ils pourraient hurler dans les rues leurs noms, juste pour le plaisir, et les couvrir de tout ce que ce monde compte de beau et de meilleur. Ces enfants là vous sourient avec ce regard qui dit «Je suis aimé», ou «Je suis le meilleur». Ils sont heureux en somme, et répandent autour d'eux cet aura si particulier propre à ceux qui ont eu la chance de naître beau et talentueux. Moi je n'ai jamais fait la joie des miens, aussi loin que je me souvienne, et même plus loin encore, durant les premières années de ma vie que ma mémoire n'a su imprimer, j'ai toujours été une déception. Celui que l'on regarde avec un air affligé, ou parfois encore pire, avec un sourire triste, emplis de pitié. La pitié est sûrement le pire sentiment du monde. Avec de la haine vous pouvez faire beaucoup de mal avec un peu de temps, mais il vous suffira d'un seul de ces regards mouillé pour détruire tout les espoirs d'un être, oui, un seul regard apitoyé vous suffira à le détruire. Je me dis souvent que j'aurai préféré qu'il me batte plutôt que cette froide humiliation qu'il m'a fait subir tout au long de ma vie. Jamais mon père n'a éprouvé la moindre fierté pour moi, le second fils de la lignée Hoffman.
Je suis né trois semaines avant la date prévue, et par cet acte, le premier, celui qui fit office de préambule dans ma vie d'être humain, je causais à la famille Hoffman la perte douloureuse qu'ils ne manquèrent jamais de me rappeler. Oui par ma naissance, je précipitais ma mère dans la mort. C'est pourtant très rares de nos jours qu'une femme meurt en couche dans notre pays gavé de richesses et de privilèges, peut -être une chance sur 1000, et cette «chance» ce fut moi. Maria Hoffman était une femme d'une grande beauté et d'un caractère d'une force impressionnante, personne ne s'était préparé au prix de cette vie qu'elle m'offrait. Je pesais seulement la moitié du poids attendu, et j'ai passé ma première semaine dans une couveuse de la maternité du grand hôpital de Berlin. J'avais un frère de cinq an mon aîné, un beau petit garçon au sourire d'ange dont les cheveux de la couleur des blés sous le soleil rebondissaient gracieusement aux rythme de ses rires. Il ressemblait beaucoup à ma mère, à notre mère. Père avait toujours admiré cet enfant joyeux et doux dont les joues grassouillette affichaient continuellement une joie franche et contagieuse. Mas quand il me vit moi, petit garçon rachitique dont les ternes cheveux châtains peinaient à apparaître, c'est presque s'il n'eut pas un haut-le-cœur. Dans cette famille qui respirait la réussite et la beauté de toutes part, j’étais comme une mauvaise blague, une erreur en somme. Il ne m'a jamais vraiment reconnu comme son fils d’ailleurs. J'avais eu l’audace, en plus de mon incapacité visible, de m'emparer de la vie de celle qui avait toujours compté plus que tout pour lui, comme pour Julian, mon frère. Alors dès mon premier jour, il a commencé à nourrir pour moi ce mépris qui n'a cessé d'augmenter avec les années.
Pourtant j'ai essayé de le séduire, tant de fois et par tout les moyens, mais chaque fois se reflétaient dans son regards vide ce dédain et cette froideur qu'il me réservait. Je n'ai guère arrangé ces sentiments en grandissant, mon corps maigre et fragile que j'ai gardé jusqu'à la fin de mon adolescence. J’étais ce petit garçon pâlichon qui se cache dans la salle de classe pour lire au lieu de jouer avec ses petits camarades durant les récréation, une paire d'épaisses lunettes enfoncées sur le nez. Mon corps mince et faible aurait pu convenir à une fillette, mais certainement pas au fils de Phillip Hoffman, riche et séduisant propriétaire de l'une des pus grandes chaînes d’hôtel de luxe d'Europe. Lorsque nous descendions de la voiture que notre chauffeur conduisait jusqu'au portail de l'école privé très élitiste où l'on nous envoyait mon frère et moi, les gens jetaient des regards surpris, comment ce ridicule petit avorton pouvait-il être le frère de ce si beau petit garçon qui attisait la jalousie de toutes les mères?! Bien qu'étant alors encore très jeune, je comprenait déjà parfaitement les regards condescendants que l'on m'adressait à l'époque, et la honte me prenait alors aux tripes, me forçant à m'éloigner de ce frère si parfait dont je salissait la rayonnance. Pourtant contrairement à ce à quoi vous vous attendiez sûrement, Julian a toujours été bon et chalereux avec moi. Lorsque ses amis avaient le mauvais goût de rire en se moquant du «piteux petit Hoffman», Julian leur rabattait leur caquet d'un mot dure et sévère, puis il venait vers moi, sécher mes larmes avec son mouchoir en m'offrant le plus beau des sourires. Bien sure j'aurais pu exprimer ma colère et me venger de ce grand frère qui semblait tout droit sortis du soleil lui-même, mais qui aurait pu haïr une telle personne ? Pas moi. J'aimais ce frère qui malgré lui représentait tout ce que l'on me reprochait. Au fond Julian n'y était pour rien, il n'avait pas demandé à devenir ce parfait petit ange qu'il était, il avait lui aussi subit la vie, mais elle avait été des plus clémentes à son attention, il ne devait plus lui rester beaucoup de qualités quand mon tour fut venu. J'avais beau travailler comme un forcené, passer mes nuit sur mes livres et mes cahier, je n’égalais jamais les performance qui venaient si naturellement à mon frère, j'avais beau m’entraîner encore et encore, je demeurait l'éternel perdant, et mon père me le rappelais chaque fois avec l'un de ces regards qu'il n'adressait qu'à moi. Oui je suis sans le moindre doute sa plus grande déception. Le secondaire se poursuivit de la même façon, j’essayais pourtant désespérément de ressembler à Julian. Au parfait Julian. Sans succès.
C'est lorsque j'entamais ma troisième année de secondaire qu'il entra à l'université. Bien évidement il fût accepté à Harvard avec les honneur, étudiant l’économie avec assiduité, obtenant une place dans la même confrérie que mon père avant lui. Père rayonnait de fierté lorsqu'on lui parlait de son fils, à tel point qu'il finit presque par me tolérer moi et mon éternelle seconde place. Puis arriva le jour J. Celui où j'ai découvert qu'il existait une, non deux choses auxquelles j’étais bien meilleur que Julian. C'est arrivé de la façon la plus inattendue possible, J'entrais en première année de lycée, et ce soir-là Père avait bu avec quelques amis dans le petit salon qui jouxtait son bureau. Je rentrait de l'institut en traînant les pieds, me cachant derrière mes cheveux trop long pour ne rien voir, j’espérais qu'ils m’oublieraient. Manque de chance, ou geste de la providence, je ne sais toujours pas aujourd’hui à qui attribué cet instant, mais tout est-il que Père me vit- ou m’entendit- passer devant sa porte. Voyez-vous, malgré mes excellent résultats et ma conduite jusqu'ici exemplaire, j'avais ce jour-là eu l’audace de répondre aux raillerie des élèves plus âgés, une réponse pourtant timide et fort peu provocante, mais on ne répond pas lorsque l'on est «inférieur» à l'institut. Une bagarre éclata inévitablement, et pour la première fois je sentais la force de Julian dans mes bras maigres, j'osais me défendre. Un surveillant d'études ne tarda pas à arriver, et lorsque la directrice nous interrogea, je fus évidemment désigné comme le déclencheur de cet «événement». J'eu beau me défendre de tout mon possible, le terne et sombre petit Hoffman ne méritait certainement pas sa confiance. Ce fut le renvoi, provisoire certes, mais cela reste un renvois. Père était fou de rage, un Hoffman renvoyé pour mauvaise conduite, c'était une nouvelle honte que j'amenais sur sa maison. Il ne pris guère le temps de m’expliquer la chose, me dit simplement avec ce regard froid, que cette nuit je ne dormirais pas chez lui, qu'il ne tolérerait pas que je dérange ses amis, et me mis tout simplement à la porte. Bien sure j'aurais pu appeler Julian, il aurait tout arrangé, mais la honte que j’éprouvai m'en empêcha. C'est comme cela que je me retrouvait cette nuit-là à marcher seul dans les rues vides de Berlin. Je n'avais alors jamais fréquenté la ville la nuit, et j'avais un peu de mal à savoir ou je me trouvais. C'est alors qu'une jeune femme me fonça littéralement dedans. Elle devait avoir trois ou quatre ans de plus que moi, et une chevelure superbe. Elle fut projetée en arrière par le choc, puis leva les yeux vers moi prête à crier, mais lorsqu'elle croisa mon regard, le siens s'illumina. «Ben ça alors, Le frère de Julian! C'est toit nan ? C'est fou c'que vous vous ressemblez !» Je la regardais avec des yeux ébahis. Elle connaissait Julian, et surtout elle trouvait que je lui ressemblais ?! Avait-elle besoin de lunettes ? Moi ressembler à Julian, je n'en revenait pas. Elle en me laissa pas le loisir de lui poser la question et m’entraîna à sa suite, «Viens avec moi ! 'faut qu'les autres voient ça !» Ce jour-là je rencontrait alors pour la première fois cette bande de joyeux fêtards qui devinrent par la suite mes meilleurs amis. Parmi eux il y avait ce type à qui je dois tout, encore aujourd’hui. Markus. C'était le DJ de la petite boit dans laquelle elle m'avait entraîné, et visiblement celui que tous le monde appréciait ici, malgré ses airs de gorille en colère. J'ai eu sur le coup assez peur de cet homme terriblement impressionnant qui s'avançait vers moi avec un grand verre de vodka. «Alors c'est toi l'ami d'X?» me demanda-t-il l'air surpris, puis sans attendre ma réponse il remit le verre entre mes mains et retourna devant ses platines avec un sourire, «On discutera tout à l'heure !» me dit-il en montant le volume de la sono X déboula alors devant moi avec un grand sourire, «viens danser !» m'ordonna-t-elle sans me laisser d'autre choix que de la suivre, le cerveau embrumé de vodka, sur la piste de danse. Je ne me souviens plus vraiment de la suite, mais sais qu'au petit matin, lorsque l'euphorie que l'alcool m'avait offerte commença à se dissiper, Markus vint me voir. «Hé toi, tu bouge bien pour un gringalet d'ton genre !» Me dit-il avec un grand sourire, j'ai balbutié qu'il ne devait pas se moquer de moi, que c'était la première fois. Il m'a lors regardé avec un air très différent, beaucoup plus sérieux. «Viens ici demain à 8 heure» m'ordonna-t-il alors avant de se retourner vers ses amis, tandis que je passait la porte, les yeux pleins d'étoiles. Évidemment lorsque je passais la porte de la maison, Père déboula devant, écumant de rage, et jeu droit à un sermon plus humiliant que tout ce que j'avais connus jusque-là, mais ses mots glissaient sur moi sans m'atteindre, j'étais encore émerveillé par ma nuit. Le lendemain je me retrouvait à l'heure indiquée devant la boite à attendre Markus qui m’accueillis d'une tape sur l'épaule qui faillis bien me renverser. «Bon, gamin, j't'éxplique, ici on danse , j'veux dire pour nous, avant qu'ça ouvre, avec quelques potes. D'puis qu'Georg nous a laché pour étudier, on a b'soin d'un nouveau gars. C'est juste pour le studio, rien dehors, enfin pas avec toi, c'est juste pour travailler. Ca t'tente ?» Je le regardais avec des yeux ronds et balbutiais que je n'savais pas danser, il me coupa la parole d'un geste de la main, puis me dit simplement «T'as le rythme, c'est sure qu'il faudra t'muscler, puis l'reste on s'en charge, on est là pour ça» Et sur ces mots il me présenta à la petite bande. C'est ainsi que sans comprendre comment je me retrouvais à intégrer «le Crew». Les entraînements n'étaient pas faciles, mais pour la première fois je trouvais quelque chose qui n'était qu'à moi, quelque chose à quoi j'étais vraiment bon également. Nous alternions street dance et musculation pure et dure, et je senti mon corps changer de jour en jours, de mois en mois, avec mon assurance. C'est aussi Markus qui m’initia à la console, me faisant pour la première fois tâter ses platines. Il semblerais qu'à ça aussi je sois vraiment bon. Je suis devenu vraiment un bon danseur, avec les années je suis devenu le meilleur. Nous sortions dans la ru, mais aussi sur les battles, et mon nom commençait à se faire connaître. La danse m'offrait tout ce qui m'avait toujours manqué, et une fois lancé, j'vais l'impression de m'envoler , comme un oiseau.
J'ai gagné en assurance, en joie de vivre, en tout ce qui m'avait alors fait défaut. C'est comme ça que je suis devenu le Felix sympa et drôle que tous le monde adore, mais au fond je reste toujours ce gamin qui tremble à chaque fois qu'il passe la porte de chez lui. Père me méprisait de plus en plus, me reprochais mes notes en chute, mes amis répréhensible, et mon apparence digne d'un «voyou de banlieue». C'est avec joie que je lui annonçait pourtant il y a deux ans mon admission à Harvard, dans la section danse. Il n'eut pour moi qu'un regard apitoyé et répondit que la danse c'était bon pour les femmes. Ce jour-là je renonçait définitivement à lui plaire. Ce fut plus dure de l'annoncer au Crew, et si leurs premières réactions furent des insultes et des regards furieux, ils finirent par me féliciter. Markus seulement fait promettre de rien oublier de c'que j'avais appris ici dans ma belle école. Voilà comment je suis arrivé ici il y a deux ans. Au début tout était presque parfait, puis y a eu la bombe. Celle qui m'a pris mon frère. Celle qui a tout gâché, tout cassé, tout enlevé. Je ne danse plus, je ne danserais sûrement plus jamais. Je n'en ai plus le droit, plus après ça. J'étudie les multimedias et la musique, je suis passé derrière les platines. Je suis vraiment doué, on me le dis souvent, mais je n'oublierais jamais les ailes que me procuraient la danse. Bien sure j'aime composer, sentir le son évoluer dans mes veines avant de le répandre dans la salle bondée, avec tout ces gens qui me sourient, mais ça ne remplace pas. Si ça avait été le cas, je me le serait également interdit. Oui j'ai changé, je ris moins, je ne rêve plus, et je bois beaucoup plus. Bien sure toutes les portes s'ouvrent devant mes doigts de fées dans le monde merveilleux des noctambules, mais j'ai beau remplir mon nez de poudre, avaler tous les cachetons et acides du monde, rien ne me permet de m'envoler comme je le faisais. Je suis comme un moineau qui a lui-même coupé ses ailes. Mon genou restera bousillé, je pourrais toujours marcher, même courir, mais danser, c'est finit, je n'y arrive plus. Je ne peu plus voler comme je le faisais. Alors à quoi bon continuer, si c'est pour rester cloué au sol ?
Depuis la mort de Julian, Père ne m'adresse plus un seul mot, lorsque vous lui poserez la question, il vous répondra qu'il n'a plus d'enfant. Il m'a dit de ne revenir que lors de mon héritage, et de l'oublier. Pour lui, j'aurai du mourir à la place de Julian. Il n'a pas totalement tort.
Ah oui, vous voulez surement une information croustillante à vous mettre sous la dents dans toute cette histoire ? Eh bien sachez que je suis toujours puceau, si si. Non pas que j'n'ai jamais eu de chances de le faire ou l'envie, j'en ai eu pas mal même, mais je n'sais aps vraiment pourquoi, je ne me sent pas prêt à donner cette part intime de moi-même. Je n'ferais certainement pas ça avec n'importe qui.