Try it again ☼ Idylle

La bibliothèque, les cours, c'était toute la vie de Dylan, lorsqu'il ne tentait pas par tous les moyens d'aller passer sa soirée ailleurs lorsque Peter était couché et dormait comme le petit ange qu'il était. Dylan ne voulait pas rester chez lui, sentir cette tension qui émanait de son épouse. D'ailleurs, elle pétait les plombs très souvent dernièrement. Elle s'était mise en tête que son mari la trompait avec « une plus belle et plus jeune qu'elle » et les crises de jalousie étaient les pires. Lorsqu'elle le traitait de bon à rien, c'était déjà quelque chose, lorsqu'elle le rabaissait sans arrêt et le mettait dans des situations pires que douloureuses. Mais lorsqu'elle faisait une crise de jalousie et qu'elle le griffait, le frappait, le pousser contre le mur, renversant des objets au passages et réveillant parfois le petit, Dylan avait l'impression qu'elle le tuerait. Et oui, il redoutait cet instant où elle le réduirait à néant, tant psychologiquement que physiquement et là il devrait dire adieu au monde. Il ferma les yeux avant de se concentrer de nouveau sur le bout de code qu'il avait devant les yeux. De toutes les programmation, la programmation fonctionnelle était certainement celle qu'il aimait le moins. Cependant, il restait un bon étudiant et excellait même dans cela. Il fut dérangé par un bruit, sur le côté, quelqu'un avait tiré la chaise à côté de lui et venait de s'installer. Il posa ses yeux bleus sur la personne qui venait de prendre place. Un visage familier : Idylle. Ce qu'elle pouvait le déstabiliser cette fille. Il avait l'impression qu'elle pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert et cette sensation était plus que désagréable. Il lui offrit tout de même un sourire avant de mettre le point virgule final à son code et de le compiler. Il reporta de nouveau son attention sur Idylle. Elle le regardait depuis tout à l'heure ou il rêvait ?

Dylan faisait ce qu'il pouvait pour se concentrer, mais le fait que la demoiselle le regardait avec autant d'insistance ne lui plut pas trop et le déstabilisa même. Mais il parvint à terminer son exercice très rapidement avant de finalement poser ses yeux sur Idylle. Il l'observa en silence alors qu'elle venait de prendre la parole, quand à elle, très sûre de ce qu'elle était en train de dire. Il eut un petit sourire. Alors comme ça la demoiselle farfelue aux cheveux roses s'y connaissait en Ocaml ? Cela ne l'étonnait même pas. « Tu m'excuseras pour la saleté du code, mais je voulais me débarrasser de ça, ce n'est pas particulièrement intéressant ni même pertinent comme exercice. Trop scolaire. » Il eut un nouveau sourire. Elle n'avait pas l'air méchante, ni même d'avoir de mauvaises intentions, même si le Dunster n'avait pas vraiment compris pourquoi elle était soudainement venu étaler sa science. Il espérait juste qu'elle n'était pas venu le draguer, ou qu'elle n'était pas étudiante en journalisme faisant un stage dans une entreprise bidon qui cherchait des scoops sur les hommes politiques ou les écrivaines dépressives. Sinon il aurait vite fait de la flairer et de l'envoyer balader. Il avait beau s'être transformé en garçon plutôt timide et renfermé avec le temps, ce n'était pas pour autant qu'il se laissait marcher sur les pieds (mis-à-part par Gloria, bien sûr... Mais Gloria, c'était de sa faute. Dydy croyait dur comme fer qu'il était l'unique responsable du malheur dans sa famille). Mais il avait décidé de se montrer poli, même s'il s'avérait que la jeune femme aux cheveux roses étaient venue lui casser les pieds. Il la connaissait très peu. Juste son prénom, appris dans une conversation, à la volée. Il lui sourit une dernière fois avant de fermer le clapet de son ordinateur portable et de le ranger dans le sac. D'un côté, Idylle l'attirait, il avait envie de la connaître davantage, de comprendre ce qu'elle voulait, mais d'un autre, elle lui faisait peur et il avait envie de fuir, de lui dire qu'il était désolée, mais qu'il avait cours. « T'as pas des choses à apprendre ? Ou à lire ? » lui demanda-t-il finalement, en rougissant sous son regard si pesant posé sur sa petite personne. Etre observé, il détestait cela. Surtout que pour le coup, il avait l'impression qu'elle le déshabillait du regard, qu'elle apprenait rien que d'un coup d'oeil les moindres détails de sa vie privée et intime. Il avait la sensation qu'elle pouvait voir chacune des marques de scarification de son corps, chacune des cicatrices de brûlures... Bref, elle le faisait nettement flipper.

Le jeune homme regardait la demoiselle assise à ses côtés, claquant le clapet de son ordinateur. Il avait la sensation que cette personne allait bientôt vouloir l’éplucher comme s'il était une banane. Et c'est très facile d'ôter la peau d'une banane. Dylan était quelqu'un de très fragile, alors il pouvait à tout moment péter un plomb. C'était ce qu'avait dit l'autre imbécile de psychologue qu'il était allé voir pour « résoudre ses problèmes de couple ». Oui, à une certaine période, Gloria avait voulu arranger les choses. Elle disait que c'était de sa faute si rien ne se passait comme il le fallait entre eux. Et il la croyait de plus en plus. Il faisait juste tous les efforts du monde pour élever leur fils dans de bonnes conditions. Il sourit face à la sûreté que la demoiselle aux cheveux roses avait dans la voix. Elle parlait comme si elle était sûre qu'il n'allait pas partir, comme s'il était une connaissance de toujours. C'était vrai qu'ils s'étaient déjà parlé plusieurs fois, mais rien qui ne puisse véritablement les lier. Dylan fit mine qu'il devait partir, allait dire à l'instant qu'il avait un cours important auquel il devait assister, ou même qu'il devait aller chercher son enfant à l'école primaire, mais la jolie demoiselle reprit la parole plus vite que lui. Il eut un léger rire face à sa question. Elle était douée pour rattraper les situations celle-là. « Je ne pourrais rien t'apprendre, c'est sûr. » déclara-t-il. Oui, à force d'entendre de la part de sa femme qu'il était une merde finie qui ne pouvait rien apporter à la société, il avait tendance à se rabaisser lui-même. Même si Gloria revenait toujours sur ce qu'elle disait et se confondait en excuses pour qu'il lui pardonne son comportement. Et le pauvre fou lui pardonnait. Fallait croire qu'il l'aimait encore, ou alors qu'il avait été si follement amoureux qu'il ne pouvait plus se passer d'elle. Mais c'était surtout pour Peter. Cet enfant méritait d'avoir une enfance joyeuse et de rire sans cesse et pour toujours.
« Mais si ça t'amuse, j'adore le saumon à l'oseille. » déclara-t-il. « Mais je mange mal. Presque tout le temps des frites et des hamburger ou des pizzas. Je ne cuisine que pour les autres.» conclut-il ensuite. C'était vrai, il faisait de bons petits plats à peter, Swan et Gloria, mais pas pour lui. Il lui rendit son sourire. Avant de rire de nouveau. Une personne s'était tournée vers eux et leur avait lancé un regard mauvais, car ils faisaient un peu de bruit pour ce lieu qu'était la bibliothèque. Ce n'était pas propice aux bavardages.
« Alors qu'est-ce que ça t'as appris sur moi ? » demanda-t-il, entrant dans son jeu.

Dylan rangeait ses affaires tout en écoutant ce que la demoiselle avait à lui dire. Alors il était capable de rire. Il sourit de plus bel. Oh ça oui, il en était capable. D'ailleurs, il n'y avait rien de mieux que le rire et les sourires pour cacher son malaise et surtout son mal être. Tout le monde ne voyait que du feu derrière les airs enjoués de notre jeune homme. Comme c'était souvent le cas de ceux qui souffrent. Enfin de toute façon, l'on obtenait que ce que l'on semait. Et il avait mal semé, c'est tout, il n'avait pas été un bon garçon, il avait joué avec le feu et s'était brûlé, et il devait payer pour toutes les fautes et les erreurs commises. C'était sa vie, son destin. Il regarda la demoiselle tendrement, elle était amusante, celle-là. Sortie de nulle part, elle affichait un ton joyeux et une sûreté d'elle-même carrément extraordinaires. On aurait dit qu'elle croyait en chaque parole prononcée. Vraiment sûre d'elle. Au début, Dylan avait trouvé Idylle très énervante avec cet air presque hautain de fierté, mais là, en cet instant, cela le faisait plus sourire qu'autre chose.
« Vas-y, dis que je me néglige pendant que tu y es!» répondit-il par une boutade à la demoiselle. Elle venait de dire qu'il prenait moins soin de lui que des autres. Et elle n'avait pas tord, il ne pensait qu'à son fils et même à Gloria, combien-même elle le faisait souffrir sans cesse. Idylle ne parlait plus, le flot de paroles inondant les esprits dont elle avait fait preuve était terminé. Mais Dydy était certain qu'elle devait avoir encore un tas de pensées à exprimer et il eut envie de rire à cette idée.
« Oh tu sais, je suis un piètre professeur et de toute façon, je ne donne pas de cours de cuisine, c'est pas ma vocation. Et je te l'ai dit je suis de ceux qui n'apprennent rien aux autres que ce qu'ils ne veulent entendre. » Il rit encore un peu. C'était vrai, il imaginait déjà les crises de jalousie de Gloria et les articles des journaux people qui parlaient de son père et donc de lui, au passage. Il devait toujours se montrer parfait, toujours. Son père comptait sur lui pour jouer les familles parfaites, sinon il risquait bien de perdre les élections...