C'est en une belle matinée claire que Dylan naquit, le 29 avril 1988, alors que rien n'avait prédit sa venue. Il n'était pas forcément un cadeau pour ses parents, qui venaient à peine de se marier. Sa mère, mannequin de profession, aurait très certainement trouvé une façon d'avorter si elle avait su être enceinte, et ce afin de toute bonnement garder la ligne. Mais, malheureusement, ou fort heureusement pour notre cher jeune homme, elle ne découvrit sa grossesse que le jour même de l'accouchement, elle avait fait ce que les médecins appellent un déni de grossesse. A sa naissance, Dylan ne respirait pas, il fallut beaucoup d'efforts de la part de l'équipe médicale pour qu'il pousse enfin son premier cou sous l'effet de l'air entrant dans ses poumons. Ce fut donc en se battant que notre jeune homme entra dans la vie. Mais les années qui suivirent, son enfance ainsi que son adolescence, il les passa dans un monde où il ne manquait absolument de rien, sauf peut-être d'amour. Il voyait rarement son père, trop occupé à mener de front sa carrière en politique. Et sa mère, n'en parlons pas, elle passait sa vie sous les lumières des projecteurs. Trop âgée déjà pour continuer en tant que mannequin, elle envahissait les petits et grands écrans en tant qu'actrice. D'ailleurs, actuellement, elle incarne un personnage emblématique dans une série reconnue internationalement. Elle incarne une femme croulant sous les problèmes familiaux et la tension au boulot. Dylan s'est toujours demandé comment elle pouvait être une bonne actrice dans un tel rôle, elle qui ne s'était jamais préoccupée de sa famille, surtout de son fils. Seulement question de bien le parer pour que tout paraisse au mieux dans les émissions grands publics et les magazines people. Dylan ne sait même pas s'il ressent des sentiments purs envers son géniteur et sa génitrice.
Au lycée, il déconnait, usait de la célébrité de son nom pour faire de grosses bêtises, si on peut appeler ça ainsi. Il n'hésitait pas à fumer quelques joints et à jouer les durs avec quelques gamins un peu paumés de la vie, aussi riches que lui, mais bien plus paumés. Mais au fond, il ne leur voulait aucun mal. Il mûrissait au fur et à mesure des années, devenant peu peu un homme respectable, bien qu'ayant certains écarts de conduite. Il n'a jamais joué avec le cœur des filles, loin d'être un Don Juan. D'ailleurs, suite à un dîner organisé par son père, une soirée mondaine de celles qu'il détestait tant car obligé de s'habiller convenablement et de garder les convenances, il rencontra la femme qui bientôt deviendrait son épouse. Elle avait presque vingt ans de plus que lui. Pourtant, cela n'empêcha pas la passion d'agir. C'était une écrivaine, femme posée et attentionnée, mais surtout à poigne. Il lui plut instantanément et vice versa. Dylan, après leur rencontre s'était même jeté sur tous les écrits qu'elle avait publiés pour la séduire davantage. Soirée de dédicaces, soirées mondaines, rencontres pour des associations caritatives, tout était prétexte à la voir. Lorsqu'il entra à l'Université de Fordham en Droit, pour suivre la volonté de son père, il était déjà marié. Marié à cette femme splendide, répondant au nom de Gloria. C'était elle qui avait voulu lui mettre la bague au doigt, certainement car elle parvenait très bien à entrevoir le pouvoir qu'elle pourrait avoir sur le jeune homme. Mais à l'époque, il ne se doutait de rien. Gloria avait une fille, âgée de 13 ans le jour du mariage et issue d'un homme décédé dans un tragique accident de la circulation. Un fille qui s'était aussitôt prise d'affection pour Dylan, qu'elle considéra davantage comme un grand-frère que comme un beau-père, même si vue d'un certain angle, cette relation paraisse presque incestueuse.
Gloria tomba enceinte peu après le mariage et donna naissance à un petit garçon, âgé à présent de cinq ans. Pour Dylan, cet enfant est une bénédiction. Il ne pensait pas être père si vite, mais vu l'âge de sa femme, c'était le moment où jamais alors la situation était logique. Il voulait pour son enfant ce qu'il y avait de meilleur, mais surtout pouvoir lui offrir l'amour qu'il n'avait jamais reçu de ses propres parents. Il jongla donc entre couches et études, mais au bout d'un an, la situation devînt complexe, d'autant plus que le droit n'était vraiment pas sa voir. Lui, ce qu'il aimait, c'était développer des logiciels, apprendre des langages de programmation dans des livres et bidouiller des réseaux. Il lui fut donc logique de changer de voie, tout bonnement. La famille déménagea donc pour Cambridge car il avait été admis à l'Université de Harvard. Une fierté pour ses parents et son épouse.
Et ce fut à partir de ce déménagement que les choses dégringolèrent. Après de multiples disputes avec ses éditeurs, Gloria ne parvint plus à écrire des livres corrects, jetant tout ce qu'elle avait passé des jours à composer sur son ordinateur. Un vrai gâchis. Elle commença à boire, sans que Dylan n'en comprit honnêtement la raison. Une vraie alcoolique. Elle buvait même devant leur fils, Peter, et devant sa grande-soeur. Dylan avait beau s'occuper d'elle chaque soir, lorsqu'elle était ivre, prenant soin de sa personne comme de la prunelle de ses yeux, les choses ne firent qu'empirer. Elle se mit à devenir de plus en plus violente à son égard. Des violences, au début isolées, puis, de plus en plus fréquentes. L'adolescente de la famille, âgée de près de 16 ans, fut placé dans un internat d'excellence, ce qui fit qu'elle ne remarqua pas les débordements de sa mère, et heureusement pour elle. Mais pour notre étudiant en informatique, c'était humiliation sur humiliation. Insultes, coups, griffures à répétitions. Des situations toujours semblables et invivables. Un soir, elle lui avait même reversé une casserole d'eau bouillante sur les bras, d'où découla une brûlure au 3ème degré, dont les marques sont encore présentes. Dylan ne parvient plus à supporter toute cette haine déversée sur lui, mais il tente par tous les moyens de passer outre et ne cesse de veiller sur son épouse lorsqu'elle tombe ivre morte. Il est vrai qu'ivre, elle ne représente presque pas de danger, mais sobre, elle l'affronte, comme s'il était responsable d'un mal qui la ronge. Ce qu'il supporte le moins ce sont les insultes et les humiliations. Les coups, les brûlures, les griffures et les strangulations ne sont qu'un détail à côté de sa souffrance psychologique.
Heureusement, elle n'osa jamais levé la main sur Peter, sans quoi notre jeune informaticien aurait divorcé sur le champs. Mais le gamin adore sa mère, alors il n'a pas le cœur à se lancer dans des démarches... Il ne veut pas faire de mal à Peter, et il a peur de le perdre. Si personne ne le croyait ? Après tout, son épouse a 43 ans, il en a 25. Qui croirait-on dans un tribunal, une femme d'âge mûr disant qu'elle souffre du délaissement de son mari ou un jeune homme vigoureux affirmant être battu par cette même femme ? Et puis de toute façon, cette histoire doit être de sa faute, quelque part. Au fond, il ne mérite peut-être pas une vie saine. Et puis, gloria lui paraît si honnête et si sincère lorsqu'elle s'excuse et l'embrasse pour se faire pardonner de ses actes ultérieurs. Après chaque dispute, elle demande pardon, elle fait la belle, avant d'aller noyer ses regrets dans l'alcool. Alors Dylan s'autodétruit, mais juste un peu. Mourir n'est pas le but, il veut être là pour son fils. Mais quelques petites scarifications permettent parfois de libérer la douleur moral trop profondément ancrée dans son esprit et qui lui mord ainsi les entrailles...