Acting like nothing happened (Dixie)

La rentrée était arrivée et le summer camp me manquait déjà. Pourtant, comme tous les matins il me fallait prendre le chemin de la fac. Je roulais machinalement vers le campus, la tête ailleurs, me repassant les évènements de cet été. Malgré la rupture entre Val et Sateen, deux de mes amis qui s’étaient séparés avant le SC, l’été n’avait pas été morose. Val remontait la pente doucement mais surement, Calypso et moi nous nous étions réconciliés, pour finalement nous mettre en couple à la fin de l’été, et j’étais enfin épanoui et heureux avec la jeune femme. Pourtant je restais prudent, craignant que cette petite bulle de bonheur n’explose à tout moment. J’étais loin d’avoir eu un comportement irréprochable l’année dernière. Je n’avais pas hésité à profiter de mon célibat pour enchainer les histoires sans lendemain et je craignais que certaines de ces aventures ne jettent comme une ombre au tableau. Mes préoccupations du moment concernaient Dixie, une mather. La jeune femme avait fini dans mon lit le temps d’une nuit à l’issue d’une soirée particulièrement arrosée. Val, qui ignorait tout de cette histoire, m’avait confié qu’il avait des vues sur la brune et qu’ils avaient dansé de manière très sensuelle ensemble mais ce qui m’inquiétait le plus c’était la complicité de plus en plus forte qui semblait se développer entre elle et Caly. J’arrivai sur le parking et je repérai justement la silhouette de miss Hawson. Je me garai et sortis de mon véhicule en refermant ma portière avant d’avancer vers elle. « Hey Dixie. » l’interpellai-je. Elle était seule et c’était l’occasion ou jamais de s’expliquer. « Salut ! » fis-je une fois arrivé à sa hauteur. Je passai ma main dans ma nuque, gêné. Par où commencer ? Lui dire que Valentin m’avait parlé d’elle ? Lui confier que je m’étais mis en couple avec Calypso, chose que ma petite amie avait déjà du lui raconter de toute façon ? Evoquer directement la nuit qu’on avait passé ensemble ? « Euh… Ca va toi ? » demandai-je simplement. Oui, j’optais pour une version toute différente, j’étais loin d’être à l’aise et je ne voulais pas non plus avoir l’air d’agresser mon interlocutrice. Je devais juste m’assurer qu’elle et moi soyons sur la même longueur d’onde.  Après tout, ce n’était pas non plus dans son intérêt que notre histoire sorte de l’ombre.

Une quatrième année s’annonçait à Harvard depuis le retour du Summer Camp. Je devais avouer avoir passé de très belles vacances. Ma rentrée s’était même assez bien déroulée, je dois dire, sur plusieurs points, alors que sur certains autres, c’était très loin d’être joyeux pour moi. Mes problèmes d’argent n’avaient rien de bien pour moi, mais une autre chose me titillait l’esprit ces temps-ci, et c’était Valentin. Bon, c’était compliqué, avec lui. Je ne sais même pas ce qui se passait entre nous. De l’attirance? Du simple «on baise et on reste amis»? Je ne saurais mettre le doigt sur le mot qui décrirait notre relation, mais c’était vraiment compliqué, quoique très plaisant. Enfin, excepté les problèmes d’argent et le phénomène inexplicable d’une relation agréable avec ce bel italien, il y avait aussi mon dilemme de rester ou de partir d’Harvard. Ainsi, je m’étais exclue dans un coin peu fréquenté du campus afin de peser le pour et le contre d’un possible départ. Je recommençais malheureusement mes vilaines habitudes ; moi qui avait arrêté toute consommation de drogue à partir du début de l’été, je devais avouer recommencer pour déstresser, et ce très fréquemment… C’est tout à fait concentrée et perdue dans mes pensées que je ne réalisai pas que se trouvait derrière moi un jeune homme qui ne m’était pas inconnu. En me retournant, je reconnus immédiatement Priape. Un ex coup d’un soir. Le récent petit-ami de Calypso, alias ma meilleure amie, alias la fille qui a toujours été amoureuse de ce même coup d’un soir à qui je n’avais jamais reparlé après cette seule nuit. Et pour terminer, le meilleur ami de Valentin. Putain, quand même. Je m’entourais bien, ouais… Il me salua. Un long moment de silence perdura alors que je le fixais, la bouche entrouverte, ne sachant que répondre à un simple salut de sa part. Je recouvrai mes esprits, et mon bon sens par la suite, en jetant au loin mon joint. Espérons qu’il ait pensé que c’était une cigarette ; je n’avais pas envie qu’il dise à son meilleur pote que j’recommençais à me droguer. Parce que c’était faux…en partie. « Oh euh… salut! » Je lui offris un léger sourire, puis chassai ces inquiétudes de ma tête – par rapport à mon déménagement possible -, afin de me concentrer sur l’arrivée de Priape. « Ça va, ça laisse aller, mais ça va! Exténuée par la reprise des cours, mais ça va… J’avais répété quatre fois ça va, à croire que ça n’allait peut-être pas aussi bien que ça. Mais bon, on s’en fou, après tout. « Et toi?» Étant de nature assez directe, je ne m’empêchai pas de me lever, puisque j’étais assise contre le mur d’un bâtiment quelconque du campus, puis lançai quand même gentiment et poliment à mon interlocuteur : « Y’a trois options qui t’emmènent à venir me parler. Soit t’as besoin d’aide par rapport à Calypso, soit t’as des pulsions sexuelles inassouvies, et bien que je sache être un très bon coup, je me dois de refuser, parce que tu n’es pas sans savoir que Caly est ma meilleure amie, ou soit tu as un truc important à me parler… Alors? » Bon, un peu d’humour pour détendre l’atmosphère assez étrange ne ferait pas de tord non plus… Ne restait plus qu’à attendre de savoir laquelle des trois raisons l’amenait à me parler de nouveau.

La jeune femme sembla étonnée de me voir ainsi l’approcher. C’était vrai que nous ne nous étions pas reparlé depuis cette fameuse nuit, elle devait surement se demander ce que je lui voulais. Elle resta d’ailleurs un moment quelque peu interloquée devant moi avant de réagir et de jeter sa clope au loin pour ensuite me saluer à son tour. Mon regard suivit un instant le mégot qui volait, un peu suspect, doutant un instant qu’il s’agisse d’une simple cigarette mais très vite mon attention se recentra sur Dixie. Après un sourire timide, elle me répéta à plusieurs reprises qu’elle allait bien, mais le fait qu’elle insiste autant sur son « ça va » lui faisait perdre tout crédit et je ne pus m’empêcher de me demander si quelque chose ne clochait pas. C’était peut être juste que le fait de se trouver face à moi la gênait, après tout je n’étais pas des plus à l’aise moi même. « Euh, ça va, un peu crevé aussi mais c’est la reprise c’est normal. » répondis-je lorsqu’elle me retourna la question sans savoir vraiment quoi ajouter de plus. Je n’étais pas vraiment venu l’aborder pour discuter de la rentrée et de ses effets sur notre petite santé, non. Je cherchais déjà dans ma tête le moyen le plus délicat et le plus habile pour lancer le sujet de notre fameuse soirée passée ensemble. D’ailleurs, mon interlocutrice s’en doutait très bien puisqu’après s’être levée, elle s’avança en me questionnant, me devançant, elle me posa carrément la question de ce qui me poussait vers elle, glissant au passage une petite allusion à notre dernière rencontre… « En fait c’est un peu un ensemble de choses qui m’ont conduit vers toi… » commençai-je. « Enfin les pulsions sexuelles inassouvies n’en font pas partie… » ajoutai-je aussitôt avec un petit sourire amusé. Nous étions seuls tous les deux et je me sentais étrangement tendu depuis le début de cette discussion alors entendre Dixie parlait avec une telle décontraction et se permettre même une touche d’humour me rassurait presque et je sentis la pression redescendre d’un cran. « Je voulais parler avec toi de ce qu’il s’est passé entre nous la dernière fois… » Les souvenirs de cette délicieuse nuit en sa compagnie étaient toujours bien présents dans mon esprit bien qu’embrumés par les effets de l’alcools que j’avais consommé alors. Je me rappelais très bien avoir passé un très bon moment mais à présent c’était une histoire ancienne et je ne voulais surtout pas qu’elle resurgisse et que cela vienne troubler l’équilibre du récent couple que nous formions Caly et moi. « Je pense qu’il serait préférable pour toi comme pour moi que personne n’entende parler de cette histoire… » Et surtout pas Val ou Calypso…

Souhaiter que quelque chose ne se soit jamais passé ne faisait pas partie de mes «cordes de vie». Fallait assumer le passé, comme je me le répétais si souvent. Mais parfois, il faut avouer que certaines choses méritaient d’être oubliées et non d’être remises à la surface. Comme ma courte aventure avec Priape. De le voir ainsi devant moi aujourd’hui ravivait en ma mémoire certains agréables souvenirs, c’est sûr : on ne peut le nier, mais qui ne se reproduiraient jamais, et c’était bien mieux comme ça. De un parce qu’il sortait maintenant avec Calypso, ma meilleure amie, qui n’avait vraiment d’yeux que pour lui, mais aussi parce qu’il était le meilleur ami de Valentin, et si ça venait à être découvert, alors…ce ne serait bon ni pour moi, ni pour lui… Bien sûr, le simple fait de m’imaginer le pire en cet instant me fit légèrement perdre mes moyens et m’empêcha de tenir au début des propos cohérents. Quelle belle idiote je faisais! Enfin bref, Priape ne semblait pas plus sûr de lui que je ne l’étais de moi, alors ça me rassurait un peu, du moins. À l’entente de sa voix, je recouvrai un peu mes esprits et ma confiance, alors je décrochai un sourire un peu plus à l’aise. « Ouais, mais bon, des p’tits remontants une fois de temps en temps, ça fait le boulot. T’as pas recommencé, ein? » Je faisais bien sûr référence à la drogue. Si je me souviens bien, il n’avait pas voulu en toucher lorsque l’on avait passé la nuit ensemble, alors je doutais qu’il ait recommencé à ce jour : surtout que Calypso essayait de me faire arrêter. Bon, j’étais pas assez addicte à la drogue pour être claquée vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ce qui me permettait facilement de jouer le jeu de l’innocence lorsqu’elle me posait des questions à ce sujet. Je ne voulais pas mentir à ma meilleure amie, mais sur ça…C’était pas vraiment un mensonge, si? À la réponse de Priape, l’atmosphère se détendit complètement d’un coup, ce qui me fit le plus grand bien. J’éclatai de rire et croisai les bras sur ma poitrine. « Heureusement que ça n’en fait pas partie, parce que je ne saurais les combler. Enfin, je ne voudrais pas les combler, de toute façon. » Un clin d’œil amusé dans sa direction, et je m’adossai cette fois-ci au mur du bâtiment derrière moi. Un bref instant, je me mis à réfléchir avant d’hausser les épaules, puis d’afficher un sourire en coin. « Quelle dernière fois? » Sur un ton qui voulait lui indiquer que j’avais bien compris ce qu’il cherchait à me parler, que je me tairais à la vie à la mort, et que j’étais de son avis. Après tout, on avait tous les deux nos raisons…. Comme il me l’indiqua clairement par la suite, ce qui me fit hausser un sourcil de curiosité. Voulait-il insinuer par là le simple fait que ça ruinerait sa relation avec Calypso et son amitié avec Valentin ou autre chose? Du genre… savait-il ce qui s’était «passé» entre moi et son meilleur ami au Summer Camp? Savait-il ce qui s’était passé une autre fois ici-même, il y a à peine quelques jours, dans l’appartement de son meilleur pote? « Comme pour moi? Caly’, je ne lui en aurais pas parlé de toute façon, parce que je sais à quel point elle t’aime et à quel point ses yeux brillent en te voyant. Mais… que veux-tu dire d’autre par le ‘’il serait aussi préférable pour toi’’? Parce que je sens que tu sais quelque chose… » Alors là, j’étais gênée, quand même! Mes joues prirent un soudain teint rosé, ce qui devenait de plus en plus fréquent, chez moi, rah!