Spencer - we need to talk.

Spencer était une fille vertueuse. Droite. Pleine de valeurs. Le genre à vouloir toujours faire le bien autour d'elle, ne jamais blesser autrui. C'est un léger coup de canif à ses principes qu'elle avait donné avec Walter. Même si au fond ce n'était pas bien méchant, la demoiselle se sentait coupable et avait eu du mal à trouver le sommeil la veille. Walter, c'était le frangin d'Alexander. Et c'est pour ça qu'elle était venue vers l'Eliot. Complètement intéressée, et maintenant plus très fière. Poussant un profond soupire, elle se dirigea d'un pas lent vers le restaurant où ils avaient rendez-vous. Elle n'avait aucune envie de le voir. Enfin, plutôt, elle n'avait aucune envie de le voir pour lui balancer qu'elle connaissait Alex, et que leur rencontre au Summer Camp, ses questions, son insistance sur sa famille n'était dû en rien au hasard. Lorsqu'elle était venue l'aborder, c'était pour une raison précise. Puis vous connaissez la chanson.. à force de le côtoyer, Spencer s'y est attachée au Walter, et pas seulement car il lui a permit de se rapprocher de son frère. Pour ce qu'il est. Mais rien ne l'oblige à la croire après tout. Ainsi, c'est avec l’appréhension rongeant ses nerfs que Spencer se pointe à l'East Coast Grill, tripotant nerveusement ses boucles blondes. Il est là, il l'attends. Elle réponds à son sourire par un plus discret, presque timide, et s'assoit juste en face de lui, oubliant la politesse d'un salut plus prononcé. « Hey.. salut. » Génial, encore plus coincée que d'habitude. Comme s'ils ne s'étaient pas vus régulièrement pendant l'été. Une inspiration profonde. « Hum.. j'voulais te parler d'un truc. C'est pour ça que je voulais qu'on se voit. » Ouais, bon, c'est maladroit, dit comme ça on dirait qu'elle n'en avait pas vraiment envie. Mais bordel, ça lui brûle les lèvres depuis qu'elle a revu Alexander. Ces lèvres qu'elle pince, pas des plus à l'aise. Les cachotteries, c'est définitivement pas son truc.

D'une confiance inébranlable, le bellâtre fixait la timide, se permettant une aisance qui n'était pas partagée. Elle, était facilement désarmée. Le regard bleu planté sur ses traits n'aidant en rien. Inutile de préciser que c'était même pire. La porcelaine de ses joues se teintant légèrement de rose, malgré tous les efforts pour garder une constance nécessaire. Là, tout de suite, Spencer était une gamine perturbée par les billes trop insistantes du plus beau garçon de la classe, voyez. Celui qui ne doute pas un instant de son influence, de son aura. Comment pourrait-il ? Face à la blonde qui ne fait que jouer avec ses lèvres, ce n'est pas maintenant que ça va commencer. Mais elle sait qu'elle a un avantage, un doux AS dans sa manche. Une carte « Alexander » dont il ne se méfie pas. Quand elle sera posée sur la table, le reste viendra. Tout ce que la demoiselle a gardé sous silence, son métier, sa place à Harvard, toutes ces questions qu'elle a éludé habilement cet été. Si au moins il la laisse s'expliquer, ce qu'elle redoute, malgré ce fin sourire qu'il lui arrache par sa réplique taquine. Soit moins charmant Walter, ça m'aiderait. « … bon d'accord, je me lance. » Ses prunelles océans cherchent un point d'encrage, ignorant soigneusement la silhouette masculine. Les mots ont du mal à se mettre dans le bon ordre dans sa bouche. Alors plutôt que de s'élancer dans un monologue qui n'en finit pas, elle choisit la facilité. « Mon nom.. » Sacré fardeau hein. Un instant, elle se demande si vraiment il est utile de lui dire. Peut-être qu'elle peut repousser, profiter encore quelques instants de la délicieuse présence de l'Eliot, prolonger les vacances. Mais non, il est temps d'être adulte un peu. « Tu ne le connais pas, et il y a une bonne raison à ça. » Puis, elle balance dans un souffle, rapidement, de façon à peine audible : « Spencer Vaughn Strudwick. » Et elle respire, délivrée.